Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

Vénètes,

peuple gaulois qui occupait un territoire correspondant à l'actuel Morbihan et qui a laissé son nom à la ville de Vannes (Gwenned, en breton).

Plusieurs autres peuples protohistoriques ont porté le nom de « Vénètes » : Homère mentionne des « Hénètes », et les Vénètes les plus connus, ceux établis au nord de l'Adriatique, parlaient une langue proche du latin et ont laissé leur nom à la Vénétie. On rapproche aussi de cette racine le nom de « Wendes », donné par les Germains aux Slaves les plus occidentaux (ou Sorabes).

Les Vénètes de Bretagne sont, au moment de la guerre des Gaules, le peuple le plus puissant d'Armorique, et leurs monnaies - comptant parmi les plus anciennes qui existent - circulent largement. Navigateurs experts, ils contrôlent les côtes et le commerce avec les îles Britanniques, en particulier celui de l'étain. La ferme fortifiée de Paule, près de Rostrenen, offre sans doute une idée de la prospérité des aristocrates de cette région. En l'an 56 avant J.-C., les Vénètes, après s'être apparemment soumis à César, se révoltent et prennent la tête d'une coalition antiromaine formée par les peuples de l'Ouest. César, qui s'est procuré des navires et en a fait construire d'autres, les affronte dans une bataille navale, sans doute près de la presqu'île de Rhuys, et parvient à les vaincre en déchirant leurs lourdes voiles de cuir avec des faux montées sur des perches. Il fait exécuter les dignitaires et vendre les simples citoyens. Les Vénètes font néanmoins partie de la coalition générale menée par Vercingétorix en 52 avant J.-C. À l'époque gallo-romaine, leur chef-lieu est Darioritum (l'actuelle Vannes), et Locmariaquer est une autre ville importante : on y a retrouvé un théâtre, un temple et des demeures de notables.

ventôse an II (décrets de),

décrets des 26 février et 3 mars 1794 prévoyant la redistribution des biens des suspects aux patriotes indigents, et constituant, selon l'historienne Mona Ozouf, les « mesures les plus avancées qu'une Assemblée révolutionnaire ait jamais votées ».

Le 8 ventôse an II (26 février 1794), Saint-Just, rapporteur au nom des Comités de salut public et de sûreté générale, assure que « celui qui s'est montré l'ennemi de son pays n'y peut être propriétaire » : « Abolissez la mendicité qui déshonore un État libre ; les propriétés des patriotes sont sacrées, mais les biens des conspirateurs sont là pour tous les malheureux. Les malheureux sont les puissances de la terre ; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent. » La Convention décrète le séquestre des biens des « ennemis de la Révolution », qui seront détenus jusqu'à la paix, puis bannis à perpétuité. Le 13 ventôse an II (3 mars 1794), après avoir entendu un autre rapport de Saint-Just - conclu par la célèbre formule : « Le bonheur est une idée neuve en Europe » -, l'Assemblée demande aux communes de recenser les « patriotes indigents », qui seront ensuite « indemnisés avec les biens des ennemis de la République » selon des moyens fixés après le recensement. Mais, après le 1er novembre 1794, la Convention thermidorienne revient sur les décrets des 8 et 13 ventôse, indirectement rapportés sans avoir eu le temps d'être appliqués, comme le constate Françoise Brunel.

L'interprétation de ces décrets divise les historiens. Pour Jaurès, ils sont un « expédient », une « déclaration de guerre cachée » contre les cordeliers (dont la propagande vise les sans-culottes, et qui sont arrêtés le 23 ventôse), mais annonceraient pourtant « les institutions sociales ». Georges Lefebvre et Albert Soboul ont repris le premier point de cette analyse : « manœuvre politique », « tactique » liée aux circonstances (la crise sociale et politique de ventôse), les décrets, à la portée sociale effective limitée, seraient destinés à retrouver la confiance des sans-culottes. Albert Mathiez, lui, les relie aux autres mesures du printemps, notamment à la loi sur l'assistance du 22 floréal (11 mai 1794), et y voit l'annonce d'une « politique sociale » ayant pour but « l'expropriation d'une classe au profit d'une autre ». À l'instar de Mathiez, Françoise Brunel souligne aujourd'hui comment ces décrets s'inscrivent dans un programme montagnard cohérent, repris et précisé dans d'autres textes (Billaud-Varenne, Barère) qui définissent un véritable « projet », non réductible à une « manœuvre ». Mona Ozouf rejette, elle aussi, la thèse du calcul politique et lit les décrets comme « l'anticipation d'une révolution autre », non pas sociale (Mathiez), mais « morale, qui ne s'accomplira qu'avec la conversion des hommes au bien ».

Vercingétorix,

chef gaulois (vers 72 avant J.-C. - Rome, 46 avant J.-C.).

Vercingétorix est à la fois un personnage historique, l'organisateur malheureux d'une coalition générale conduite contre l'occupation romaine en Gaule, et un personnage mythique, entré au XIXe siècle dans la galerie des fondateurs de l'identité nationale française. Le détail des faits historiques est obscurci par cette fonction seconde, d'autant que notre unique source d'information est le récit de César, la Guerre des Gaules (De bello gallico), au moins autant œuvre de propagande mise au service d'une ambition personnelle que travail d'historien.

Chef politique et tacticien.

• C'est au livre VII - le dernier - de la Guerre des Gaules, qui narre la campagne décisive de 52 avant J.-C., que Vercingétorix fait son entrée. Le contexte politique semble alors favorable aux Gaulois : la situation très troublée à Rome à la fin de l'année 53 a donné à penser à plusieurs peuples gaulois, qui venaient d'être soumis par les légions romaines à six années d'occupation et de ravages, que César ne serait pas à même, depuis l'Italie, de rejoindre ses légions restées cantonnées en Gaule. Le projet d'une révolte généralisée prend corps à l'initiative des Carnutes qui, au jour dit, en janvier 52, massacrent en guise de signal les commerçants romains installés à Cenabum (Orléans). Un aristocrate arverne, Vercingétorix, décide de prendre le relais. Fils de Celtillos, un notable jadis mis à mort pour avoir tenté d'être roi, il se débarrasse, à la faveur d'une révolte populaire, de la prudente opposition de l'aristocratie arverne, puis prend la direction des opérations. Selon l'usage de l'époque, il se donne des garanties en demandant aux différents peuples coalisés de lui remettre des otages, et fixe pour chacun d'entre eux le quota de guerriers et la quantité d'armes à lui fournir.