Lotharingie,
royaume carolingien de 855 à 870, puis, de façon intermittente, jusqu'en 991, dont le nom vient de celui du roi Lothaire II.
À la mort de l'empereur Lothaire, en 855, son royaume, longue bande de terres entre la France et la Germanie, est partagé entre ses trois fils : Louis obtient l'Italie et la couronne impériale, Charles, la Provence, et Lothaire II, la partie septentrionale qui s'étend de la mer du Nord aux Alpes et du Rhin à l'Escaut et à la Meuse. Avec Aix-la-Chapelle et de puissantes et anciennes abbayes comme Prüm ou Lobbes, les évêchés de Metz, Cologne et Trèves, cette région est le berceau de l'identité carolingienne. Des cinq royaumes qui ont succédé à l'Empire de Charlemagne (outre les trois royaumes des fils de Lothaire, subsistent la Francia occidentalis de Charles le Chauve et la Francia orientalis de Louis le Germanique), la Lotharingie de Lothaire II est celui qui connaît, jusqu'à la fin du Xe siècle, le sort le plus mouvementé.
En effet, Lothaire II n'a pour héritier qu'un bâtard, fils de sa concubine Waldrade. Pour légitimer son fils, il répudie son épouse Teutberge, à l'indignation de l'archevêque Hincmar de Reims, qui soutient les intérêts de Charles le Chauve, oncle et héritier potentiel de Lothaire. Tantôt résistant, tantôt se soumettant au pape, Lothaire II meurt en 869 sans que la répudiation de Teutberge soit certaine, et sans que Waldrade soit légitimée. Il laisse son fils bâtard à la merci de Charles le Chauve et de Louis le Germanique, qui s'entendent en 870, lors du traité de Meerssen, pour dépecer la Lotharingie.
Dix ans plus tard, Louis III, fils de Louis le Germanique, réunit les deux parties de l'ancien royaume de Lothaire pour l'intégrer dans la France orientale. Cette intégration était peut-être prématurée puisque le roi de Germanie Arnulf reconstitue de 895 à 900, pour son fils Zwentibold, un éphémère royaume de Lotharingie. La région revient au fils légitime d'Arnulf, Louis l'Enfant, jusqu'à sa mort en 911, date à laquelle le roi des Francs carolingien Charles le Simple, pressé par le Lotharingien Renier au Long Col, s'en empare. Pour peu de temps cependant, car le roi de Germanie Henri l'Oiseleur récupère la Lotharingie à son profit dès 923. Il en est complètement maître en 925 et marie sa fille au fils de Renier au Long Col, Gilbert, duc de Lotharingie en 928.
Durablement intégré au royaume de Germanie, le duché est partagé en Haute et Basse-Lorraine en 959 et connaît une éphémère restauration des Carolingiens en 977 : pour affaiblir le roi des Francs Lothaire, l'empereur Otton II restitue à Charles, frère de ce dernier, la Basse-Lorraine (le nord du duché). Charles de Basse-Lorraine est sacré roi en 978 par l'évêque de Metz Thierry, mais il meurt en 991 et l'aventure tourne court, ce qui met un terme définitif aux destinées royales des Carolingiens. Au XIIe siècle, on ne parle plus que de la Lorraine, partie septentrionale de l'ancienne Lotharingie.
Loubet (Émile),
homme politique, président de la République de 1899 à 1906 (Marsanne, Drôme, 1838 - Montélimar, Drôme, 1929).
Fils de paysans, cet avocat républicain gravit tous les échelons du cursus politique classique : maire de Montélimar en 1870 (suspendu en 1877), député en 1876, président du conseil général en 1880, il devient sénateur en 1885, exerçant la présidence des commissions des Finances et des Douanes. Ses participations successives au gouvernement correspondent à des périodes troublées : il est ministre des Travaux publics au début de 1888, au moment de la crise boulangiste, et président du Conseil et ministre de l'Intérieur en 1892, alors que se produisent des attentats anarchistes et qu'éclate le scandale de Panamá, responsable de la chute de son gouvernement. En 1896, il est élu président du Sénat, puis, à la mort de Félix Faure, président de la République, le 18 février 1899. Ce provincial effacé, modéré et simple est alors vivement attaqué par les nationalistes qui voient en lui le « candidat des dreyfusards et des panamistes ». La tentative de coup d'État de Paul Déroulède, qui échoue lamentablement, puis l'agression physique dont il est victime au champ de courses d'Auteuil poussent Émile Loubet à faire appel à Waldeck-Rousseau, qui forme un cabinet de Défense républicaine (juin 1899-juin 1902). Trois mois plus tard, il signe la grâce de Dreyfus, qui venait à nouveau d'être condamné par le conseil de guerre de Rennes à dix ans de détention.
En matière de politique extérieure, les voyages officiels du président Loubet - en Russie, au Royaume-Uni et en Italie - confortent la politique du ministre des Affaires étrangères Théophile Delcassé (alliance franco-russe, Entente cordiale, neutralité italienne), qu'il ne soutient pas, toutefois, lors de la crise de Tanger, en juin 1905. En politique intérieure, il se refuse à contrer Émile Combes (président du Conseil de juin 1902 à janvier 1905, qui bénéficie du soutien du Bloc des gauches), dont il réprouve pourtant la politique anticléricale. Sa retraite politique est définitive à l'issue de son septennat, qu'il est le premier président à achever normalement.
Loucheur (loi),
loi sur l'habitat social conçue par le ministre du Travail Louis Loucheur, et votée en 1928.
L'insuffisance du logement social en France devient particulièrement criante après la Première Guerre mondiale. Certes, des sociétés anonymes d'habitations bon marché (HBM), depuis 1889, et des sociétés de crédit immobilier, depuis 1908, ont pour fonction de permettre aux ménages modestes d'accéder à un logement. Dès 1912, il existe même des offices publics de HBM, qui vont se multiplier après la guerre (192 en mai 1923 ; 218 en mai 1928). En 1925, Henri Sellier, maire de Suresnes, crée l'Union des HBM. Toutefois, les efforts dans ce domaine restent dispersés et, surtout, insuffisants. Les faibles avantages fi-nanciers concédés aux sociétés publiques ou privées de HBM ne leur permettent pas de mettre en chantier suffisamment de logements. L'action de Louis Loucheur se situe dans ce contexte. Député du Nord, une région dévastée par la guerre, il entend relancer l'habitat social. Sa loi, très ambitieuse, est votée en juillet 1928. Elle prévoit un programme de construction de 260 000 logements sur cinq ans. À cette fin, une avance de 90 % du montant des travaux est consentie aux constructeurs de HBM (200 000 logements prévus). La loi crée également une catégorie d'habitations moins sommaires, les immeubles à loyer modéré (ILM), aidés à hauteur de 40 %, puis de 70 % en 1930 (60 000 logements prévus).