Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
B

blindés.

C'est en 1916 que le char de combat fait son apparition sur le front occidental, presque au même moment dans les différentes armées alliées.

En France, le père de « l'artillerie d'assaut » est le général Estienne, qui entend utiliser le char pour rompre les fronts fortifiés et réhabiliter la guerre de mouvement. Malheureusement, les premiers engins fabriqués par Schneider et Saint-Chamond sont des forteresses roulantes, lentes, peu maniables et très vulnérables, ainsi qu'on peut le constater lors de l'offensive d'avril 1917 au Chemin des Dames. En revanche, les chars légers Renault, équipés d'une tourelle tous azimuts, joueront un rôle décisif, en liaison avec l'infanterie et l'artillerie, lors des contre-offensives victorieuses de Foch en 1918.

Une arme mal employée.

• Pendant l'entre-deux-guerres, l'armée française ne néglige nullement le char. À partir de 1935, le réarmement accorde la priorité à la construction de nouveaux véhicules. Au 10 mai 1940, l'armée aligne plus de 3 000 chars modernes, disposant même d'une légère supériorité sur la Wehrmacht. Mais, si les chars français sont bien protégés, ils disposent d'un armement inégal ; ils sont surtout lents et leur rayon d'action est trop limité. Deux défauts majeurs les affaiblissent : des liaisons radio embryonnaires et une conception tactique qui, en dépit des avertissements d'un de Gaulle, mise sur la dispersion plutôt que sur la concentration. En effet, indépendamment des blindés affectés à la cavalerie, le char reste considéré comme un engin d'appui de l'infanterie. C'est seulement pendant la « drôle de guerre », après des années d'hésitation, que le commandement se décide à créer trois divisions cuirassées, conçues cependant, à la différence des panzers, comme des engins de colmatage d'une brèche éventuelle sur le front, et non comme une arme de rupture. Finalement, en mai-juin 1940, l'arme blindée française est détruite, sans avoir pu influer sur la marche des événements.

Un équipement moderne.

• En 1943, avec le réarmement des troupes françaises d'Afrique assuré par les Alliés en vertu des accords d'Anfa, les trois divisions blindées françaises sont pourvues de matériels américains, les chars Sherman et les tanks-destroyers. Il en sera encore de même à la fin des années quarante, dans le cadre de l'OTAN. Toutefois, à partir des années cinquante, l'armée blindée commence à s'équiper de matériels de fabrication nationale. L'un des premiers engins, et des plus réussis, est l'AMX 13, doté d'un canon de 105. Plus de 7 700 exemplaires sont fabriqués, dont 3 300 réservés à l'exportation. Au cours des décennies suivantes, le char de base des divisions blindées est l'AMX 30B, dont une centaine sont encore en service, suivi, dans les années quatre-vingt, de l'AMX 30B2. Aujourd'hui, les régiments blindés utilisent 650 engins de ce type. Avec son obus flèche de 105 mm et une conduite de tir laser très précise, l'AMX 30B2 dispose d'une grande puissance de feu. Mais, comparé au Léopard II allemand ou au MI américain, il souffre d'une mobilité et d'une protection insuffisantes, même si son blindage peut être renforcé de tuiles réactives Brennus.

L'avenir de l'arme blindée française repose sur le char Leclerc. D'un poids de 55 tonnes, cet engin dispose d'une conduite de tir électronique extrêmement sophistiquée, qui permet à son canon de 120 mm un tir de nuit, en marche et sur tout terrain. En principe, il devrait équiper l'ensemble des régiments blindés. Mais son coût très élevé rend hypothétique la constitution du parc de 600 engins prévu.

L'arme blindée française offre une originalité. Elle est la seule à disposer d'ERC (engins roues canon), très rapides et fortement armés. L'ERC 90 Sagaie Panhard, blindé léger de 6 tonnes, aérotransportable, est doté d'un canon de 90 mm. Quant à l'AMX 10, nettement plus puissant, il est armé d'une pièce de 105 et peut être uti-lisé comme char principal de combat. Plus de deux cents AMX 10 sont aujourd'hui en service. En dépit de l'élargissement de la menace (mines, roquettes, « munitions intelligentes »), l'armée française reste fidèle au char, en raison de sa capacité de destruction et d'évolution en « ambiance nucléaire ».

Bloc des gauches,

alliance scellée, en vue des élections législatives de 1902, par les forces politiques - radicaux, socialistes, républicains démocrates - qui soutiennent le gouvernement Waldeck-Rousseau depuis juin 1899.

Grâce à la pratique des désistements au second tour, le Bloc des gauches gagne les élections, qui portent Émile Combes à la présidence du Conseil. Le Bloc est représenté en permanence à la Chambre des députés par la « délégation des gauches », composée de membres des quatre groupes parlementaires alliés (Union démocratique, Gauche radicale, radicaux-socialistes, socialistes) ; il sert d'intermédiaire entre les élus de la majorité et le gouvernement. Les socialistes soutiennent le cabinet sans y participer. En dépit de cette structure, animée par Jean Jaurès, des divisions apparaissent dès 1904. Combes mène une politique anticléricale qui dresse contre lui une partie des modérés de l'Union démocratique ainsi que quelques radicaux : les socialistes, pour leur part, lui reprochent l'absence de toute politique sociale. En janvier 1905, Combes est contraint à la démission. L'alliance est maintenue pour obtenir le vote, en juillet 1905, de la loi de séparation des Églises et de l'État (promulguée en décembre). Mais elle se désagrège sous le ministère Clemenceau (octobre 1906-juillet 1909), en dépit de la forte représentation des radicaux dans ce gouvernement, dont la chute signifie la mort du Bloc.

L'œuvre du Bloc des gauches n'est pas mince : elle contribua largement à républicaniser la France - loi de séparation, réformes du service militaire et de l'enseignement -, à défaut de vraiment la démocratiser.

Bloc national,

coalition de formations politiques, situées majoritairement à droite et au centre, qui dirige la France de 1919 à 1924.

Le Bloc national apparaît au lendemain de la Grande Guerre, alors que persiste dans une bonne partie de l'opinion l'esprit de l'« union sacrée » : la loi électorale de juillet 1919 ayant introduit le scrutin proportionnel de liste, les divers partis se voient dans la nécessité de conclure des accords en vue des élections du 16 novembre 1919. À gauche, la SFIO, profondément divisée quant à l'attitude à adopter à l'égard de la révolution bolchevique, décide de refuser tout accord avec les partis « bourgeois », ce qui prive le Parti radical de toute possibilité d'entente avec elle. Les partis de droite et du centre (catholiques, nationalistes et républicains modérés de la Fédération républicaine et de l'Alliance démocratique) se regroupent sur les thèmes du nationalisme, de l'anticommunisme et de la stricte exécution des traités. Les radicaux présentent des listes isolées ou s'associent avec les modérés, dont l'esprit laïque ne leur paraît faire aucun doute. Au soir du 16 novembre, la victoire des listes de droite et du centre (dites « de Bloc national ») est manifeste : 400 députés de droite et du centre, 100 radicaux, 68 socialistes, sont élus au sein de la Chambre bleu horizon (elle comprend environ 50 % d'anciens combattants).