Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
N

nationalisme. (suite)

• Pourtant, un nationalisme diffus, issu du patriotisme républicain, maintient sa fidélité au régime, y compris chez de nombreux catholiques, particulièrement ceux des régions de l'Est, dont sont issus Jules Ferry et Raymond Poincaré. Ce nationalisme connaît un regain de vigueur après la crise marocaine d'Agadir (1911), qui provoque une vive tension franco-allemande. La majorité élue aux élections législatives du printemps 1914 n'est cependant pas nationaliste, puisqu'elle est plutôt hostile au service militaire de trois ans (1913), mais elle ne remet pas en cause cette loi. Attachement à la paix ne signifie pas refus des sacrifices nécessaires pour la défense de la patrie. Les principaux thèmes de l'idéologie nationaliste s'inscrivent dans le patrimoine commun à la veille de la guerre. Telle est la signification de l'« union sacrée » : le réflexe unanime est de se dresser contre l'agression injuste, non d'aller au-delà. Les doutes de 1916, les grèves et les mutineries de 1917 n'empêchent pas, en novembre 1917, le redressement spectaculaire de l'opinion publique, rassemblée pour la défense de la nation, sous l'égide de Clemenceau. La victoire renforce le courant nationaliste, mais elle demeure celle d'un ordre républicain et pacifique : la récupération de l'Alsace-Lorraine va de soi, ainsi que l'obtention d'un minimum de garanties assurant la sécurité de la France, mais les revendications des nationalistes d'extrême droite (détacher de l'Allemagne la rive gauche du Rhin, briser l'unité allemande) ne sont pas défendues par Clemenceau. Le triomphe de la majorité du Bloc national aux élections législatives de novembre 1919, si complexe et parfois si contradictoire au niveau local, traduit une sorte de consensus autour d'un nationalisme républicain, d'un patriotisme retrempé par la guerre, suffisamment mûr pour ne pas se laisser entraîner par les surenchères extrémistes. Il traduit une sorte de fusion entre le nationalisme républicain du style de la Ligue des patriotes et le nationalisme plus agressif des ligues de la fin du XIXe siècle.

Dernières mutations.

• Cette synthèse connaîtra de nouvelles ruptures lors des années 1930 et de la crise qui affecte le régime républicain. La guerre, la défaite et l'occupation en 1940 voient la résurgence éphémère du nationalisme contre-révolutionnaire d'Action française, du reste brisé et éclaté en plusieurs rameaux, dont certains se retrouvent dans la France libre. L'idée de nation a, elle aussi, éclaté à la faveur de cette guerre idéologique. Le gaullisme se veut, dès l'origine, rassembleur, et s'inscrit dans la tradition réconciliatrice du boulangisme, du bonapartisme, mais aussi de toute l'histoire de France, sans exclusive. Il a toujours eu contre lui une frange de nationalistes irréductibles, héritiers du maurrassisme, nostalgiques de Pétain et d'un catholicisme contre-révolutionnaire, qui salueront la défaite du général de Gaulle, en 1969, comme une délivrance. La résurgence du nationalisme d'extrême droite, sous la forme du Front national, n'est pas seulement un héritage du nationalisme de l'Action française ; il emprunte aussi à l'idéologie des régimes fascistes, dont il reprend à son compte les thèmes autoritaires, populistes, xénophobes et antisémites. Il cherche aussi l'appui des catholiques, mais ceux-ci se prêtent moins à cette alliance qu'au début du XXe siècle. Si ce nationalisme d'extrême droite reste limité, c'est que le sentiment national, édifié par la République depuis un siècle, est fondé sur un solide attachement à la paix civile, garant du maintien de l'union nationale.

Navarre (royaume de),

royaume pyrénéen dont la partie française est transmise au roi de France Henri IV par la mère de ce dernier, Jeanne d'Albret.

Les deux versants des Pyrénées occidentales sont occupés depuis l'époque protohistorique par les Basques. Dominés tour à tour par les Celtes, les Romains, les Wisigoths puis les Maures, les Basques conservent leur langue, tandis qu'autour d'eux les futures provinces navarraises (de la vallée de l'Èbre à celle de l'Adour) plient sous les envahisseurs.

De Roncevaux à la naissance du royaume de Navarre.

• Les guerriers basques qui massacrent l'arrière-garde de Charlemagne à Roncevaux en 778 sont aussi ceux qui résistent aux envahisseurs maures ; leur chef, Iñigo Arista, se déclare roi de Pampelune au IXe siècle. Ses descendants règnent en Navarre jusqu'en 1234. Après un siècle de lutte contre les Maures, Sanche le Grand est le véritable fondateur du royaume, qui s'étend de la côte cantabrique aux hautes vallées de l'Aragon ; en s'alliant aux ducs d'Aquitaine, il obtient la province d'Outreports, partie française de la Navarre. Saint-Jean-Pied-de-Port, porte des Pyrénées sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, voit ainsi passer pèlerins et marchands. À la mort de Sanche le Grand (1035), la Navarre connaît une éclipse jusqu'à ce qu'en 1134 Garcia le Restaurateur s'affranchisse de la tutelle aragonaise. Pour alléger la pression qu'exercent la Castille et l'Aragon, Sanche le Fort s'allie un moment aux Maures, puis les combat à la bataille de Las Navas de Tolosa (1212), d'où il rapporte les chaînes du camp de l'émir qui ornent désormais le blason navarrais.

Les dynasties françaises.

• Sans enfant légitime, Sanche choisit pour héritier en 1225 le fils de sa sœur Blanche, Thibaud Ier de Champagne, roi de Navarre en 1234. Les deux fils de ce dernier, Thibaud II et Henri Ier le Gros, règnent successivement, mais le second laisse à sa mort (1275) une fille mineure, Jeanne, réfugiée avec sa mère à la cour de France. Pour défendre la Navarre contre la Castille, le roi de France Philippe III envoie une expédition et fiance Jeanne à son fils (futur Philippe le Bel, roi en 1284). La Navarre est alors administrée comme une sénéchaussée française. À la mort de la reine Jeanne en 1305, le fils aîné de celle-ci, Louis (futur Louis X), devient roi de Navarre. Lorsqu'il meurt en 1316, les droits de sa fille Jeanne sont oubliés et Philippe V, puis Charles IV, s'intitulent « roi de France et de Navarre ». Jeanne de France, mariée à Philippe d'Évreux, n'entre en possession de la Navarre qu'en 1328. La dynastie d'Évreux-Navarre se maintient sur trois générations, jusqu'en 1425. Charles le Mauvais, fils de Philippe d'Évreux et de Jeanne, se montre plus prince français que navarrais dans son acharnement contre les Valois. Son fils Charles le Bon, lui aussi plus français que navarrais, laisse à sa mort en 1425 une fille, Blanche, mariée à Jean II d'Aragon.