Bugeaud (Thomas Robert),
marquis de la Piconnerie, duc d'Isly, maréchal de France (Limoges 1784 - Paris 1849).
Issu d'une famille de hobereaux du Limousin, ce noble devient soldat à 20 ans en s'engageant dans les armées napoléoniennes. Mis en congé sous la Restauration, il retourne dans son domaine natal, où il expérimente de nouvelles techniques d'exploitation agricole, et prépare son élection à la députation. Il est rappelé par Louis-Philippe, qui lui confie la garde de la duchesse de Berry en 1832, puis le charge de réprimer l'insurrection républicaine de Paris en avril 1834, ce qui lui vaut une grande impopularité.
C'est en 1836 que Bugeaud est envoyé pour la première fois en Algérie. Sa mission consiste à protéger l'installation de l'armée française sur les côtes algériennes, contre les tribus insoumises menées par Abd el-Kader. Bugeaud est alors hostile à l'idée d'une colonisation de l'Algérie, qu'il estime dangereuse et chimérique. Aussi, après une première victoire à la Sikkah, négocie-t-il avec son adversaire la convention de la Tafna (mai 1837), qui fait de larges concessions à l'émir. Mais, en 1840, la trêve est rompue : Abd el-Kader lance ses troupes sur la plaine de la Mitidja et déclare la guerre sainte aux Français. Le maréchal Bugeaud est alors envoyé une seconde fois en Algérie avec le titre de gouverneur général. Rallié dès lors à une politique de conquête totale du territoire algérien, il réorganise l'armée d'Afrique : augmentation des effectifs, création de colonnes mobiles, amélioration de l'ordinaire des soldats. La « méthode Bugeaud », conduite avec opiniâtreté et une certaine cruauté, qui privilégie la guerre d'embuscade et les razzias, finit par porter ses fruits. Après la victoire d'Isly (août 1844) sur les armées marocaines alliées à Abd el-Kader, Bugeaud traque sans répit l'émir, qui se rend en décembre 1847. Dans le même temps, sa conquête se double d'un effort de colonisation agricole et d'une politique arabe originale (administration indirecte, bureaux arabes), qui oppose Bugeaud à la hiérarchie civile et militaire d'Algérie. Démissionnaire en 1847, il regagne la France, où il meurt du choléra après un éphémère retour à la vie politique.
Ce personnage, qui fait partie intégrante de la légende de la colonisation, se distingue par son énergie et son imagination, par son autoritarisme allié à une certaine ampleur de vue. Il peut être considéré comme le précurseur des grands conquérants coloniaux tels Gallieni ou Lyautey.
Buisson (Ferdinand),
pédagogue et homme politique (Paris 1841 - Thieuloy-Saint-Antoine, Oise, 1932).
Issu d'une famille protestante, Ferdinand Buisson, agrégé de philosophie en 1868, a refusé de prêter serment à l'Empire. Exilé volontaire à Neuchâtel, il exprime avec éclat, aux premiers Congrès de la paix - Genève (1867), Lausanne (1869) -, son souhait de voir un jour « l'abolition de la guerre par l'instruction ». Rentré en France après Sedan, il est le chargé de mission du ministère de l'Instruction publique aux Expositions universelles de Vienne (1873), de Philadelphie (1876) et de Paris (1878). Le 10 février 1879, Jules Ferry le nomme directeur de l'enseignement primaire, fonction qu'il remplira jusqu'en 1896 : sa longévité à ce poste clé justifie que Charles Péguy ait vu en lui « le principal organisateur de l'enseignement primaire en France ». Son Dictionnaire de pédagogie, publié de 1882 à 1886, puis mis à jour en 1911, reste l'un des monuments les plus représentatifs de l'œuvre accomplie en ce domaine par la IIIe République. Titulaire de la chaire de pédagogie à la Sorbonne de 1896 à 1902, il la cède à Émile Durkheim, après avoir été élu député radical-socialiste de Paris. Dreyfusard, membre fondateur de la Ligue des droits de l'homme, il demeure après la guerre, en dépit de sa défaite électorale de 1924, l'un des inspirateurs de la politique radicale. En 1927, il partage avec l'Allemand Ludwig Quidde le prix Nobel de la paix.
bureaux arabes,
organismes coloniaux créés en Algérie par le général Lamoricière et officiellement mis en place par Bugeaud en 1844, dans les territoires sous autorité militaire.
D'abord conçus comme une structure de renseignement et de contact avec les indigènes, ils deviennent un véritable organe administratif décentralisé. On en dénombre une cinquantaine. Chaque bureau contrôle une vaste subdivision et se compose de quelques officiers, d'un interprète, d'un médecin, de deux secrétaires (arabe et français) et de quelques troupes. Ces hommes sont tout à la fois soldats, administrateurs, informateurs, juges et conseillers d'une communauté dont ils apprennent la langue et partagent parfois le mode de vie, s'imposant comme les interlocuteurs naturels des musulmans. Si certains d'entre eux abusent de leur pouvoir, d'autres font preuve d'un réel souci d'améliorer le sort des indigènes. Affaiblissement de l'aristocratie locale, éclatement et sédentarisation des tribus, progrès agricole et sanitaire : tels sont les résultats contrastés d'une politique souvent jugée paternaliste. Dans le même temps, les bureaux arabes s'attachent à défendre les droits des indigènes contre les spoliations territoriales des colons, ce qui leur vaut l'hostilité de l'administration civile. À la suite du rétablissement d'un régime civil en Algérie, en 1870, ils disparaissent progressivement. Les bureaux arabes ont représenté la tentative de mener une politique mixte fondée à la fois sur le protectorat et la domination, politique qui cède finalement la place à une pratique plus assimilationniste.
Burgondes,
peuple ostique (proche des Goths) sans doute venu de l'île danoise de Bornholm, et qui, au début du Ve siècle, s'installe dans l'ancienne province de Germanie et en Gaule du Nord, puis, en 443, obtient un statut de fédéré en Sapaudia (ouest de la Suisse, nord de la Savoie, sud du Jura).
Au début du VIe siècle, le royaume burgonde s'étend de la Champagne méridionale à la Durance, et des Cévennes à la Suisse centrale. L'archéologie et la toponymie (noms en -ens) attestent une forte présence des Burgondes dans le sud de la Bourgogne (qui leur doit son nom). Le roi Gondebaud (vers 480/516) a su réaliser l'unité du royaume et créer des alliances par une habile politique matrimoniale : en 494, son fils Sigismond épouse une fille de Théodoric, roi des Wisigoths ; en 493, sa nièce Clotilde se marie avec Clovis. Son principal souci a été de trouver un débouché en Méditerranée.