Doumer (Paul),
homme politique, président de la République de 1931 à 1932 (Aurillac, Cantal, 1857 - Paris 1932).
Fils d'un poseur de rails, et tôt orphelin, bachelier puis professeur de mathématiques grâce aux cours du soir, et lancé dans le journalisme par Waddington, Doumer est élu député radical de l'Aisne (1888-1889), puis de l'Yonne (1890-1896). Il entre en tant que ministre des Finances dans le premier cabinet radical, celui de Léon Bourgeois (1895-1896), avant de se rapprocher des modérés. Nommé gouverneur général de l'Indochine en 1896, il lance de grands travaux et finance une administration efficace, mettant en régies le sel, l'opium et le riz, et augmentant les impôts, ce qui provoque des tensions. À son retour en France, en 1902, il est réélu député de l'Aisne, et prend la tête de l'opposition à Combes, au sein du Bloc des gauches, dans l'affaire des Fiches. Élu président de la Chambre en janvier 1905 par la droite, il est exclu du parti radical. L'année suivante, il est battu par Armand Fallières à l'élection présidentielle, peut-être parce qu'il entend renforcer les pouvoirs du chef de l'État, et par Henri Brisson à la présidence de la Chambre. Il perd même son siège de député en 1910, avant d'être sénateur de la Corse de 1912 à 1931. Ministre d'État de Painlevé en 1917, aux Finances sous Briand en 1921-1922 et 1925-1926, président du Sénat en 1927, il est enfin élu président de la République en 1931, face à Briand, le candidat des gauches. Son mandat sera bref : Doumer est assassiné en mai 1932 par Gorgoulov, un Russe blanc qui le croit responsable d'une entente avec l'Union soviétique, et que le gouvernement Tardieu, en pleine campagne électorale, veut faire passer pour un bolchevik.
Doumergue (Gaston),
homme politique, président de la République de 1924 à 1931 (Aigues-Vives, Gard, 1863 - id. 1937).
Protestant languedocien, avocat, magistrat en Indochine et en Algérie de 1890 à 1893, puis député radical du Gard jusqu'en 1910, et sénateur jusqu'en 1924, il est ministre des Colonies de 1902 à 1905 et de 1914 à 1917, organisant à ce titre l'appel aux troupes africaines. Entre-temps, il a été ministre du Commerce et de l'Industrie, puis de l'Instruction, et président du Conseil en 1913-1914. Radical très modéré, il préside le Sénat en 1923. En 1924, une coalition des droites et des sénateurs radicaux le porte à l'Élysée, face à Paul Painlevé, candidat du Cartel des gauches. Il intervient beaucoup, avec un tact et une jovialité qui assurent sa popularité. Son mandat se termine avant que la crise mondiale affecte le pays, et ne laisse donc que de bons souvenirs. Les événements du 6 février 1934 permettent à Albert Lebrun de tirer « Gastounet » de sa retraite, pour le charger de diriger un gouvernement associant droite et radicaux. Plus proche d'André Tardieu que d'Édouard Herriot, Doumergue obtient de légiférer par décrets, souhaite faciliter la dissolution de la Chambre, s'adresse au pays à la radio, par-dessus les élus, mais il attend huit mois pour proposer des réformes, et les associe à des mesures antisyndicales. Les radicaux se ressaisissent, et il doit démissionner. Ainsi s'achève, en novembre 1934, une carrière bien remplie mais qui, au total, laissera peu de traces durables. En 1937, ses funérailles nationales laïques sont célébrées à Nîmes.
dragonnades,
persécutions subies par les protestants sous le règne de Louis XIV.
Malgré l'action des missionnaires catholiques et quelques conversions spectaculaires, telle celle de Turenne (1668), si la minorité protestante décroît, elle ne semble pas vouée à disparaître : comptant un million de fidèles vers 1600, elle en conserve 850 000 vers 1680. En Languedoc, la Caisse de conversion ne gagne au catholicisme que moins de 1 % des protestants de 1676 à 1685. Dans les régions où les réformés sont majoritaires, les abjurations sont très rares. Il apparaît alors aux évêques que, pour atteindre les individus, il faut briser l'encadrement des élites et des pasteurs. Renonçant à la persuasion, le pouvoir opte alors pour des solutions expéditives.
En mars 1681, l'intendant du Poitou, Marillac, est autorisé par le secrétaire d'État à la Guerre, Louvois, à loger chez les protestants les gens de guerre, en particulier les dragons. Cet usage abusif d'une obligation des sujets avait déjà servi pour châtier des populations révoltées, par exemple en Bretagne en 1675. Se convertir est alors le seul moyen d'éviter les brimades de la troupe : vols, saccages, coups, privation de sommeil... L'intendant prétend ainsi avoir obtenu en quelques mois 38 000 abjurations. Cependant, l'opinion européenne s'indigne ; des officiers s'inquiètent du relâchement de la discipline. Marillac est déplacé en 1682.
En juillet 1683 toutefois, quand les protestants du Midi se rassemblent sur les lieux de leurs temples détruits, le pouvoir fait de nouveau appel à l'armée. En mai 1685, en Béarn, l'intendant Foucault reprend les dragonnades, bientôt imité en Languedoc, Guyenne, Saintonge, Poitou, Normandie, Dauphiné. Pour que la conversion ne soit pas uniquement le fait des soldats, l'Église catholique organise parallèlement une campagne de missions pacifiques. L'ensemble de ces actions accompagne et justifie la révocation de l'édit de Nantes (octobre 1685) : à quoi bon maintenir le culte protestant quand ses fidèles abjuraient par dizaines de milliers ? Si elles se raréfient après 1686, les dragonnades ne prennent néanmoins fin qu'en 1698 : ce zèle contre les opiniâtres montre que la liberté de conscience garantie par la révocation n'est qu'un leurre.
Les dragonnades suscitèrent dans toute l'Europe une campagne de protestations contre les « missionnaires bottés ». Quelques catholiques français se sont également indignés. Ainsi, pour Étienne Le Camus, évêque de Grenoble, les conversions forcées déracinent le sentiment religieux en même temps que l'hérésie : un remède pire que le mal.
Drancy (camp de),
camp d'internement situé dans la banlieue nord-est de Paris, exclusivement réservé aux Juifs à partir de 1941.
D'abord destiné à la détention de prisonniers de guerre britanniques, il accueille plus de 4 000 Juifs - polonais pour la plupart -, arrêtés sur ordre des Allemands par des policiers français à Paris du 20 au 25 août 1941. Le camp est placé sous la responsabilité du préfet de police, tandis que la préfecture de la Seine est chargée du ravitaillement. La misère y est indescriptible : ni paillasse ni couverture, famine, isolement. Effrayés par une succession de décès, les médecins de la préfecture profitent de l'absence de Theodor Dannecker, chef du service des Questions juives à la Gestapo, pour faire libérer quelques centaines de Juifs, début novembre 1941. Puis l'organisation succède à l'improvisation et les conditions d'internement s'améliorent légèrement. Mais Drancy devient alors pour l'occupant une réserve d'otages, qui sont fusillés en représailles d'attentats visant des officiers allemands.