Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
L

livret ouvrier,

document de police indispensable à l'ouvrier pour être embauché : créé en 1781, rendu obligatoire en 1803, il est supprimé en 1890.

Afin d'« entretenir la subordination parmi les ouvriers des pays manufacturiers », les lettres patentes du 12 septembre 1781, qui renouvellent aux travailleurs l'interdiction de s'assembler, réglementent le congé, que le patron doit porter sur un livret, document à la fois de quittance et d'identité. Tombé en désuétude, ce livret de police, qui met les compagnons sous la tutelle des maîtres, est ignoré de la Révolution, qui contrôle cependant la main-d'œuvre (loi Le Chapelier, 1791). Mais il est rétabli sous le Consulat avec la loi du 22 germinal an XI (12 avril 1803) et, surtout, l'arrêté du 9 frimaire an XII (1er décembre 1803), qui le rend obligatoire et en détermine les modalités. Pour être conforme, il doit mentionner l'identité et le signalement de l'ouvrier, ses emplois successifs, ainsi que le nom et l'adresse du patron. Remis lors de l'embauche à ce dernier, qui le restitue à l'ouvrier une fois la tâche accomplie, il doit être visé par la police ou la municipalité à chaque déplacement, et doit indiquer la destination suivante. Sans lui, l'ouvrier, considéré comme vagabond, peut être passible de six mois de prison. Placé sous une surveillance policière constante et dans une sujétion économique et juridique, l'ouvrier est ainsi neutralisé, bien que l'obligation du livret ne soit pas toujours respectée, notamment dans le bâtiment. Étendu aux ouvriers des établissements industriels et aux domestiques sous le Second Empire (loi du 22 juin 1854), le livret est supprimé, sous la IIIe République, par la loi du 2 juillet 1890.

Locarno (traité de),

série d'accords conclus par sept États (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Belgique, Tchécoslovaquie et Pologne) réunis dans cette cité du Tessin (Suisse) du 5 au 16 octobre 1925.

Cette conférence s'inscrit dans une période de détente des relations internationales, incarnée par les ministres des Affaires étrangères français et allemand : Aristide Briand et Gustav Stresemann. Elle aboutit à plusieurs traités : par un pacte garanti par le Royaume-Uni et par l'Italie, la France, la Belgique et l'Allemagne reconnaissent mutuellement leurs frontières. Un accord de non-agression (sauf dans l'hypothèse d'une attaque allemande contre la Pologne ou la Tchécoslovaquie) est signé et la démilitarisation de la Rhénanie est confirmée. Des conventions d'arbitrage entre la France, la Belgique, la Pologne, la Tchécoslovaquie, d'une part, et l'Allemagne, d'autre part, prévoient, en cas de crise, de recourir à la négociation et d'interdire le passage à travers le Reich d'une armée envoyée par la Société des nations (SDN) en Europe centrale. Enfin, deux pactes d'assistance franco-polonais et franco-tchécoslovaque sont également signés. L'Allemagne améliore ainsi son image (elle est admise à la SDN en septembre 1926) et va pouvoir bénéficier d'investissements anglo-saxons. La France, qui peut compter, en cas d'agression allemande, sur le Royaume-Uni (lequel refuse en revanche de garantir les frontières germano-tchèque et germano-polonaise), souhaite prolonger ces négociations pour stabiliser les frontières orientales de l'Allemagne, élaborer une organisation économique de l'Europe et limiter l'entente germano-soviétique. Ce traité ne survivra pas à la remilitarisation de la Rhénanie (7 mars 1936).

Locmariaquer,

commune située sur une presqu'île à l'entrée du golfe du Morbihan, qui abrite certains des plus célèbres monuments mégalithiques de Bretagne (Table des marchands, Grand Menhir brisé, etc.).

Signalés dès le XVIIe siècle et étudiés dès le XIXe siècle, ces monuments ont fait aussi l'objet d'investigations très récentes, qui en ont renouvelé l'interprétation. Le dolmen de la Table des marchands était englobé dans un vaste cairn de pierres sèches. La chambre funéraire comprend, au fond, une grande dalle triangulaire ornée de plusieurs rangées de crosses en relief. Sa dalle de couverture, qui comporte plusieurs signes gravés (hache, crosses, bovidé), est l'un des trois fragments d'un immense monolithe de granite de 14 mètres de haut, dont la partie centrale a été utilisée pour recouvrir le dolmen de l'île de Gavr'inis. Il semble que plusieurs grands monolithes se dressaient à l'origine à Locmariaquer, avant d'être abattus, brisés et réutilisés. Ainsi du célèbre Grand Menhir brisé, le plus grand mégalithe de France, cassé - intentionnellement - en quatre (ou cinq) morceaux. Il mesurait à l'origine 20,30 mètres de haut, pesait 350 tonnes et comportait également quelques gravures.

À proximité se dresse le dolmen d'Er-Grah (ou Er-Vinglé), dont le tertre atteignait 168 mètres de long, et, plus loin, le dolmen du Mané-Ruthual, recouvert d'une dalle gravée et brisée, ainsi que celui du Mané-Lud. La chambre funéraire de ce dernier, ornée de gravures (dont des bateaux à rames), était englobée dans un vaste tertre, qui contenait aussi plusieurs petits menhirs surmontés chacun d'une tête de cheval. Le dolmen du Mané-er-Hroëk était recouvert d'un tertre de 100 mètres de long et 11 mètres de haut. Orné de gravures, il contenait une série d'objets remarquables, réalisés en roche verte, dont 106 haches d'apparat, un anneau-disque, ainsi que plusieurs dizaines de perles. Situé sur une plage, le dolmen coudé dit « des Pierres plates » contient également des gravures ; il date d'une phase plus récente du néolithique.

Loire (châteaux de la),

demeures royales, seigneuriales ou bourgeoises, situées dans le Blésois et la Touraine, en Anjou et dans le Berry.

Échelonnée entre le début du XVe siècle et les premières années du XVIe siècle, leur construction procède, selon les cas, par réaménagement d'anciennes forteresses ou édification de nouvelles résidences.

Au sortir de la guerre de Cent Ans, le retour de la paix et de la prospérité voit l'émergence d'un goût pour des demeures plus vastes et plus ouvertes. Sous Charles VII et Louis XI, les châteaux de la Loire font figure de compromis : Le Plessis-Bourré, Chaumont, Ussé, Langeais et Plessis-lès-Tours rappellent les édifices défensifs, mais amorcent une évolution vers les résidences plaisantes. Paris est délaissé, et le Val de Loire, riche région agricole où les villes de Tours et d'Orléans développent leurs activités commerciales, attire une cour encore semi-nomade. Plus de la moitié des conseillers de Louis XI sont d'ailleurs originaires de la région et y possèdent leurs biens.