évêque constitutionnel et homme politique (Vého, près de Lunéville, Meurthe-et-Moselle, 1750 - Paris 1831).
Farouchement attaché à l'idéal de fraternité et aux droits de l'homme, l'abbé Grégoire, chrétien républicain, doit sa renommée à son combat en faveur de la citoyenneté des juifs et des Noirs, et à sa lutte constante contre l'esclavage. Fidèle à sa vocation religieuse et à son désir de former des citoyens, cet abbé opiniâtre et d'une grande intégrité ne renonce jamais à ses convictions, qu'il soit député à la Constituante (1789-1791), à la Convention (1792-1795), au Conseil des Cinq-Cents (1795-1798), au Corps législatif (1800), ou sénateur (1801-1802). Il est aussi membre de l'Institut, qu'il contribue à fonder et dont il est exclu à la Restauration (1816), et commandeur de la Légion d'honneur (1803), distinction qu'il refuse d'ailleurs.
Ce fils d'un tailleur d'habits, ordonné prêtre en 1776, devient célèbre avec l'Essai sur la régénération physique, morale et politique des Juifs (1788). Aux États généraux, il joue un rôle essentiel dans le ralliement du clergé au tiers état, puis maintient, lors de la prise de la Bastille, la cohésion de la Constituante, qu'il préside alors et dont il est l'un des plus importants orateurs. Cherchant à concilier religion et révolution, il défend le bas clergé lors du débat sur la Constitution civile du clergé, à laquelle il est le premier à prêter serment (1790). En février 1791, il est élu évêque du Loir-et-Cher, où il déploie une intense activité pastorale, puis combat avec succès la déchristianisation en l'an II, inventant le terme « vandalisme » pour dénoncer les menées des iconoclastes. Fidèle à l'Église constitutionnelle, qu'il tente de réorganiser sous le Directoire, il démissionne de son évêché à l'annonce du Concordat, en 1801, et refusera de se délier de son serment jusque sur son lit de mort.
La haine obsédante qu'il porte aux rois pousse l'abbé Grégoire à les dénoncer vigoureusement dans un discours prononcé le 21 septembre 1792, devant les membres de la Convention, qui décrète le même jour l'abolition de la royauté. Son vote en faveur de la condamnation de Louis XVI, en janvier 1793, lui vaudra l'accusation de régicide et l'interdiction de siéger après avoir été élu député de l'Isère, en 1819. Membre du Comité d'instruction publique dès 1792, il développe une pensée pédagogique centrée sur la lutte contre l'obscurantisme et l'intégration de tous dans la nation, et contribue à fonder le Conservatoire des arts et métiers ainsi que la Bibliothèque nationale. Déchu sous la Restauration, il continue cependant de militer contre l'injustice et pour la tolérance dans le monde. À sa mort, ce sont des dizaines de milliers de Parisiens qui portent son cercueil au cimetière tandis que Saint-Domingue prend le deuil public. Ses cendres sont transférées au Panthéon, en 1989.