La coutume représente l'une des formes d'expression du droit positif.
Contrairement à la loi, qui est l'imposition d'une règle à la société par l'autorité souveraine, la coutume est constituée par « un ensemble d'usages d'ordre juridique, qui ont acquis une force obligatoire dans un groupe sociopolitique donné, par la répétition d'actes publics et paisibles pendant un laps de temps relativement long » (John Gillisen). Son importance varie au cours de l'histoire. On peut considérer qu'au XIe siècle, en Europe occidentale, 90 % du droit est coutumier, et 10 %, législatif. Aujourd'hui, les proportions sont inversées, le point de retournement étant situé au XVIe siècle.
Primauté de la coutume.
• Réfléchir sur la coutume suppose que l'on s'arrête sur la France médiévale, son âge d'or. Les sociétés sans écriture ne connaissent nécessairement que le droit coutumier. Aussi, le droit écrit de l'Empire romain laisse-t-il une large place à la coutume en tant que source du droit. La désagrégation des cadres impériaux a pour conséquence la disparition quasi totale de la loi, les « lois barbares » étant plutôt des coutumes mises par écrit (listes de tarifs compensatoires correspondant à certaines infractions). Malgré la volonté législative des premiers Carolingiens, cette situation perdure jusqu'au XIIe siècle. La période qui s'ouvre alors, dans la seconde moitié du XIIe siècle, et se prolonge jusque vers 1280, marque un véritable tournant dans le domaine juridique : multiplication des actes législatifs, seigneuriaux, urbains ou royaux, redécouverte du droit romain, codification du droit canonique, formulation d'un droit objectif (territorial) au détriment du droit subjectif, qui dépend de la personne à qui il est appliqué. Ces éléments tendent à imposer un droit rationnel, et impliquent le passage d'une coutume dont les règles ne sont pas énoncées préalablement à leur application à une coutume réfléchie et mise par écrit. Ce processus se concrétise via une première vague de rédaction de coutumiers, depuis le Très Ancien Coutumier de Normandie (vers 1190), jusqu'à la Coutume de la comté de Clermont-en-Beauvaisis, de Philippe de Beaumanoir (1283). Le mouvement reprend ensuite au XIVe siècle, notamment avec la Très Ancienne Coutume de Bretagne (1330), le Grand Coutumier de France, de Jacques d'Ableiges, et la Somme rurale, de Jean Boutillier, à la fin du siècle. En l'occurrence, il s'agit d'initiatives privées, d'œuvres de praticiens de la justice royale (baillis) ou princière ; elles représentent une tentative, plus ou moins concluante, de dire rationnellement le droit coutumier dans les termes savants et universels du droit romain.
La rédaction des coutumes va freiner l'introduction du droit romain en France. En effet, le partage du royaume entre pays de droit écrit (le Midi) et pays de coutumes (le Nord) date du règne de Saint Louis ; cette démarcation ne signifie pas, au demeurant, que le Midi méconnaît le droit coutumier, mais indique que le droit romain y a force supplétoire.