Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
A

anciens combattants,

soldats ayant participé aux combats et, plus spécifiquement, soldats de la Première Guerre mondiale.

Figures sociales nouvelles de l'entre-deux-guerres, vecteurs du souvenir, mais aussi animateurs de sociabilités inédites, les anciens « poilus », forts de convictions morales et politiques définies, restent longtemps assujettis à l'image fallacieuse et déformante des Croix-de-feu ou des défilés du 6 février 1934.

Avant tout, les anciens combattants sont les témoins et les acteurs de la Première Guerre mondiale, véritable traumatisme dont ils vont véhiculer, par leurs lettres, leurs récits écrits ou oraux, des images contradictoires : le souvenir de l'horreur - la mort intime, la mort attendue, la mort reçue et, pis encore peut-être, la mort donnée - y côtoie celui de la fraternité dans les tranchées. Avant même la fin de la guerre se pose le problème du sort matériel des mutilés et des blessés démobilisés. C'est ainsi que les premières associations d'anciens combattants sont fondées, dès 1915, sur des revendications d'ordre pratique plus que moral. Après 1918, elles foisonnent et reposent sur des critères médicaux - l'Union des aveugles de guerre, ou les Gueules cassées, regroupant les plus grands invalides -, militaires ou professionnels, mais aussi politiques : la Fédération ouvrière et paysanne est d'orientation socialiste, tandis que l'Association républicaine des anciens combattants fondée par Henri Barbusse (1916), l'auteur du Feu - l'un des best-sellers de la littérature combattante avec les Croix de bois (1919), de Roland Dorgelès -, est clairement d'obédience communiste. Ce réseau associatif devient, à la fin des années vingt, un véritable mouvement de masse, dont les deux piliers sont l'Union française (900 000 membres) et l'Union nationale des combattants (800 000 adhérents). Les anciens combattants représentent alors un mouvement d'environ trois millions de personnes, soit la moitié des soldats ayant survécu au conflit.

Politiquement, les anciens combattants se caractérisent - parfois - par un antimilitarisme hérité de la haine de l'ancien troufion à l'égard de l'officier et - très souvent - par un pacifisme inébranlable, dont le chantre fut Aristide Briand, et la garante, la Société des nations (SDN). Le 11 Novembre, fête nationale des anciens combattants, est à la fois une cérémonie civique - et non militaire - et une célébration funéraire où le chant patriotique donne sa signification républicaine au sacrifice des disparus. Dans l'ensemble, le discours de l'ancien combattant se veut plus moral que politique : l'opposition mythique entre le monde politicien et l'univers du soldat exposé aux risques de la guerre, la volonté de sauvegarder la communauté d'esprit des tranchées et le refus de voir la société traversée de clivages suscitent, tout au long de l'entre-deux-guerres, un antiparlementarisme spécifique qui, toutefois, est davantage l'expression de l'insatisfaction face à une IIIe République défaillante que le symptôme d'un quelconque fascisme français.

Anciens et des Modernes (querelle des),

nom générique donné aux polémiques littéraires qui voient s'affronter, entre la seconde moitié du XVIIe siècle et le début du XVIIIe, les tenants de la supériorité des auteurs modernes et les défenseurs des modèles antiques. La querelle des Anciens et des Modernes comprend plusieurs phases distinctes, et elle engage des protagonistes différents au fil des années.

La première controverse oppose les partisans d'une épopée nationale et du merveilleux chrétien aux zélateurs des mythologies païennes. Contre le Clovis de Jean Desmarets de Saint-Sorlin (1657) ou le Charlemagne de Louis le Laboureur (1664), Boileau proclame, dans son Art poétique (1674), l'excellence des lettres anciennes. Même si les Modernes sont vaincus, faute d'avoir étayé leurs thèses par des œuvres suffisamment probantes, le joug de l'Antiquité n'en subit pas moins un premier ébranlement.

L'affaire des Inscriptions (1676-1677) fait rebondir la polémique autour de la question suivante : faut-il employer le français ou le latin pour les inscriptions des tableaux et monuments historiques ? C'est à l'Académie française, le 27 janvier 1687, que débute la phase la plus aiguë de la Querelle. On y lit, en effet, le poème de Charles Perrault le Siècle de Louis le Grand, dans lequel l'auteur déclare préférer « le siècle de Louis au beau siècle d'Auguste ». L'exaltation du présent contre le passé déchaîne les foudres de Boileau, à qui s'allient La Fontaine et La Bruyère. Perrault rédige les quatre tomes de son Parallèle des Anciens et des Modernes (1688-1697), auxquels Boileau répond par ses Réflexions sur Longin (1694). Le conflit entre les deux hommes ne s'apaise qu'en 1694, grâce à la médiation d'Antoine Arnauld, qui obtient une réconciliation publique.

La dernière phase de la Querelle s'ordonne autour d'Homère. L'helléniste Anne Dacier livre au public, en 1699, une traduction de l'Iliade qui ne masque ni les longueurs ni les répétitions du texte original. En 1713, Antoine Houdar de La Motte tire de cette édition une version largement amputée et versifiée. Mme Dacier s'élève aussitôt contre ce sacrilège. Cette fois, c'est Fénelon qui réconcilie les adversaires dans sa Lettre à l'Académie (1714) : il exhorte les Modernes à égaler et à dépasser les Anciens.

Ainsi prend fin une longue polémique où les questions de personnes ont sans doute joué un rôle aussi important que les exigences d'ordre esthétique. Par-delà les excès de l'un et l'autre camp, par-delà une violence polémique qui interdit souvent aux protagonistes de poser les problèmes avec la clarté requise, la querelle des Anciens et des Modernes fait résonner une question essentielle : celle des rapports qu'entretiennent les œuvres d'art du présent avec l'héritage d'une civilisation.

Andorre,

principauté souveraine des Pyrénées, placée depuis la fin du XIIIe siècle sous l'autorité de deux coprinces : l'évêque d'Urgel et le roi de France (prérogative qui passe ensuite au président de la République française).

En 988, le comte d'Urgel cède à l'évêque de cette ville les terres « fiscales » que Charles le Chauve avait données à l'un de ses prédécesseurs en 843. À son tour, le prélat les restitue en fief à la famille des Caboet au début du XIe siècle. Devenu héréditaire, ce fief passe par mariage à la famille des Castelbon (vers 1185), puis à celle des comtes de Foix (vers 1208). Les relations entre l'évêque et ses vassaux sont souvent difficiles. L'intervention du roi d'Aragon leur permet, en 1278, de conclure un accord de « paréage » qui instaure un condominium sur la vallée (partage du tribut, ou questia, présence des bailes des deux autorités, aide militaire due aux deux seigneurs). Transmis au roi de Navarre, l'héritage des comtes de Foix échoit à la France lors de l'accession d'Henri IV au trône.