Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
G

gallicanisme, (suite)

Après la Révolution, ni la monarchie ni la faculté de théologie de Paris ne retrouvent l'appui de l'opinion publique sur des thèmes gallicans. Les évêques, soumis à l'État depuis le concordat de Napoléon, trouvent en Rome un contrepoids. La position gallicane est alors marginalisée. Quelques théologiens, surtout Dupanloup et Maret, maintiennent cependant une recherche théologique de grande qualité, pour éviter la mainmise du pouvoir pontifical sur l'Église.

Le gallicanisme théologique contre la primauté et l'infaillibilité pontificales.

• Les grands gallicans - Gerson, Bossuet, Maret - ont toujours été des modérés, s'opposant à des formes extrêmes de catholicisme, à la « mariodulie » comme à la « papolâtrie ». Leur opposition s'appuie sur les traditions de l'Église française, au prix d'un immense effort d'érudition. Ils refusent les développements absolutistes donnés à la puissance pontificale dans la mise en application de la Contre-Réforme, en particulier aux positions ultramontaines - le mot naît au XVIIe siècle - de Robert Bellarmin. Ils témoignent, dans l'histoire des doctrines ecclésiologiques, du refus d'identifier l'Église à la papauté. Bossuet refuse de parler d'infaillibilité du pape, il parle d'« indéfectibilité », exprimant par là que les erreurs, si elles se produisent, ne peuvent prendre racine dans l'Église de Rome, et qu'elles sont passagères et personnelles.

En 1794, la condamnation du gallicanisme (bulle Auctorem fidei) tient à sa liaison avec le jansénisme. En 1870, le concile de Vatican I déclare le pape « père et docteur de tous les fidèles ». Les jugements du Saint-Siège sont souverains, et même infaillibles lorsqu'il parle ex cathedra pour définir un point de dogme ou de morale. Ces jugements sont désormais irréformables par eux-mêmes, et non selon le consensus de l'Église : les positions gallicanes ne sont plus tenables.

En fait, Rome et les gallicans ne partaient pas des mêmes conceptions de l'Église et du ministère hiérarchique. Les ultramontains posaient d'abord le pouvoir pontifical, et faisaient tout découler de lui. Les gallicans posaient d'abord l'unité de l'Ecclesia, du corps des fidèles, et ensuite seulement le service hiérarchique de ce corps. Pour eux, l'autorité spirituelle est partagée à la fois par le pouvoir pontifical et par le pouvoir épiscopal, de sorte que l'un ne peut s'exercer sans l'autre. C'est pourquoi, selon eux, les décisions dans l'Église n'ont force de loi qu'une fois reçues par les évêques.

Le gallicanisme joue ainsi sur l'une des lignes de faille permanentes du catholicisme : les tensions entre pouvoir central et communautés locales, entre Église universelle et Églises locales. Des tensions redoublées, depuis le concile de Vatican II, par l'abandon de la définition « bellarminienne » de l'Église comme société hiérarchique, au profit de celle de « peuple de Dieu ».

Bien qu'il reste quelques groupes schismatiques se réclamant du gallicanisme (les Vieux Catholiques, l'Église d'Utrecht...), celui-ci survit aujourd'hui dans le catholicisme français comme un état d'esprit, et non comme un principe d'action. Il existe une sensibilité catholique française particulière, fort susceptible, parfois rebelle à toute ingérence déraisonnable de Rome dans le fonctionnement des Églises locales, mais celle-ci reste très atténuée dans les faits. L'apport des traditions ecclésiologiques françaises demeure cependant important dans les débats concernant l'équilibre entre Églises locales et Église universelle.

Gallieni (Joseph),

maréchal de France (Saint-Béat, Haute-Garonne, 1849 - Versailles 1916).

Saint-cyrien de formation, Gallieni prend part à la guerre de 1870, et, comme nombre d'officiers marqués par la défaite, il trouve un dérivatif dans l'idée coloniale. Véritable technicien de la colonisation, il est de ceux qui permettent à la France de bâtir son empire. Après des séjours en Afrique, puis au Tonkin, où il rencontre Lyautey, il devient gouverneur de Madagascar en 1896 ; confronté à des troubles, il fait déposer la reine Ranavalona et parachève la pacification de l'île. S'il a recours à la force, il n'en est pas pour autant partisan de méthodes brutales et coercitives. Il préconise d'associer les chefs locaux à l'administration des territoires passés sous domination française. Son action ne se résume pas à la conquête et au maintien des indigènes dans une condition inférieure ; il promeut la mise en place des structures - telles que les écoles - nécessaires au développement des territoires sous son contrôle.

Nommé au Conseil supérieur de la guerre en 1908, il est pressenti comme chef d'état-major général de l'armée en 1911, mais s'efface, en fin de compte, devant le général Joffre. Deux ans plus tard, ayant atteint la limite d'âge, il part en retraite.

En août 1914, alors que les Allemands marchent sur la capitale, Gallieni accepte le poste de gouverneur militaire de Paris. À ce titre, il joue un rôle essentiel dans la manœuvre qui aboutit à la victoire de la Marne (septembre 1914), dont il partage incontestablement le mérite avec Joffre. Mais les relations qu'il entretient avec ce dernier, qui est investi du commandement des armées françaises, se dégradent. En octobre 1915, Aristide Briand, nouveau président du Conseil, confie à Gallieni le ministère de la Guerre, sachant qu'il servira de contrepoids au commandant en chef, alors tout-puissant. Au début de l'année 1916, alerté par le lieutenant-colonel Driant, également député à l'Assemblée, Gallieni s'enquiert auprès de Joffre de la mise en état de défense de la région fortifiée de Verdun, sur laquelle plane la menace d'une attaque allemande. Une controverse l'oppose alors au commandant en chef, qui n'entend pas tolérer l'immixtion du pouvoir politique dans les affaires militaires. Dans le même temps, le ministre de la Guerre parvient à faire admettre à un Parlement très réticent l'envoi au front de la classe 1917. Fatigué, malade, usé par l'ampleur de la tâche, il donne sa démission le 16 mars 1916, et meurt quelques semaines plus tard. Personnage clé des premières années de la Grande Guerre, Gallieni est élevé à la dignité de maréchal de France en 1921.