Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

Vézelay,

l'un des grands centres de pèlerinage de la chrétienté au Moyen Âge, qui a pour origine une abbaye bénédictine fondée autour du tombeau présumé de Marie-Madeleine.

Alors que le monachisme du IXe siècle est marqué par un retour à l'application rigoureuse de la règle bénédictine, après la réforme introduite par Benoît d'Aniane (750-821), les fondations de monastères se multiplient : celui des moniales de Vézelay est érigé en 867 et accueille les reliques de Marie-Madeleine, offertes par le seigneur Girard de Roussillon et sa femme Berthe. En partie détruit vers 873 par les invasions normandes qui ravagent alors le royaume, le monastère est reconstruit sur la colline de Vézelay. Une nouvelle église carolingienne est consacrée en 878, et reçoit les reliques vers 880. L'abbaye passe à l'observance clunisienne au début du XIe siècle.

Après 1050, les reliques de Marie-Madeleine font l'objet d'un pèlerinage important, qui nécessite bientôt la construction d'un édifice plus vaste. Pour répondre à l'afflux des pèlerins, l'église de la Madeleine est élevée au début du XIIe siècle par l'abbé Artaud (1096/1106). Elle est consacrée en 1104 puis en partie détruite par l'incendie de 1120, et la nef est finalement achevée sous l'abbatiat de Renaud de Semur, vers 1140. En mars 1146, saint Bernard de Clairvaux (vers 1090-1153) y prêche la deuxième croisade. Le choix habile de l'abbaye comme lieu d'appel à la croisade est pour le roi Louis VII (vers 1120-1180) l'occasion de manifester sa puissance face aux bourguignons, qui règnent en maître à proximité. C'est également depuis Vézelay que les armées de Philippe Auguste (1165-1223) et de Richard Cœur de Lion partent pour la troisième croisade, le 4 juillet 1190. Saint Louis (1214-1270), à son tour, choisit l'église de la Madeleine comme point de départ vers la Terre sainte, en 1248 puis en 1270. Il y effectue aussi un pèlerinage, en avril 1267, pour relancer le culte des reliques. En effet, à la fin du XIIIe siècle, la ferveur des pèlerins se déplace vers Saint-Maximin, en Provence, après l'authentification de nouvelles reliques de Marie-Madeleine. Jusqu'à la fin du Moyen Âge, l'abbaye continue cependant d'être l'un des principaux points de ralliement pour le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Le déclin du pèlerinage à l'époque moderne explique le progressif déclin de l'abbaye de Vézelay qui, peu après la Révolution, menace ruine. Sa sauvegarde est assurée par l'importante restauration entreprise en 1839 par l'architecte Viollet-le-Duc. L'église de la Madeleine, joyau de l'art roman, qui a inspiré artistes (Le Corbusier) et écrivains (Romain Rolland, Maurice Clavel), continue aujourd'hui encore d'attirer les foules.

viande.

Les viandes ont tenu, dans l'alimentation des Occidentaux, une place relativement importante, quoique variable selon les régions, les classes sociales et les époques. Variable aussi était le choix des animaux consommés : les paysans ont longtemps surtout mangé de la chair de porc salée ou fumée ; les gens des villes, de la viande de bœuf ou de mouton ; et les élites sociales, de la volaille.

Viandes de boucherie.

• À la fin du Moyen Âge et au début de l'époque moderne, dans la plupart des régions, le bœuf était l'une des viandes les moins chères, et de loin la plus consommée. Pas toujours, certes : les Provençaux, par exemple, préféraient le mouton. À Carpentras - ville pour laquelle on dispose de sources précises -, la viande ovine était plus appréciée, donc plus chère, mais néanmoins achetée en plus grande quantité. Même là, la consommation de bœuf et de vache l'emportait d'octobre à février : nombreux, en effet, étaient les paysans qui, à l'entrée de l'hiver, vendaient au boucher ces animaux qu'ils n'avaient pas intérêt à nourrir de foin durant toute la mauvaise saison. C'était le plus souvent de vieilles bêtes devenues impropres au travail, que les bouchers, avant de les abattre, engraissaient quelques mois dans les prairies qu'ils possédaient auprès des villes.

Les découvertes archéologiques récentes d'ossements de jeunes bœufs sur certains sites, tel celui de La Charité-sur-Loire, ne suffisent pas à remettre en question ce schéma : l'élevage des bovins n'était qu'accessoirement tourné vers la production de viande. Car, d'une part, le besoin de traction animale était tel qu'on n'hésitait pas à atteler les vaches aussi bien que les bœufs. D'autre part, la chair du bœuf, jusqu'au XVIIe siècle, n'a pas eu meilleure réputation que celle de la vache, et elle ne valait généralement pas plus cher. Elle passait pour froide et sèche - comme l'élément terre -, donc grossière, indigeste et impropre à l'alimentation des élites sociales, quoique nourrissante et réputée convenir à l'estomac robuste des travailleurs de force. La sécheresse qu'on lui attribuait empêchait qu'on la fasse rôtir. De fait, les livres de cuisine aristocratiques, jusqu'au XVIIe siècle, mentionnent très peu de plats de bœuf, cette viande étant utilisée surtout pour faire des bouillons. Cela n'encourageait pas à élever des bœufs pour la boucherie, donc à les abattre avant de les avoir épuisés au travail.

C'est dans le courant du XVIIe siècle que la réhabilitation du bœuf a commencé : dans les « marchés de pourvoierie » parisiens - d'après les tarifs sur lesquels un fournisseur et l'intendant d'une grande maison s'accordaient pour une ou plusieurs années -, il ne coûtait, au début du siècle, que 2 sols 6 deniers la livre, tandis que la livre de porc était à 3 sols, et celle de mouton ou de veau à 3 sols 9 deniers. Mais, à partir de 1639, bœuf, mouton et veau sont au même prix presque tous les ans. Vers le même moment, les recettes de bœuf se multiplient dans les livres de cuisine, et les morceaux utilisés ainsi que les cuissons auxquelles on les soumet se diversifient. C'est à partir de cette époque, apparemment, que l'on a cherché à produire du bœuf de qualité. Parmi les manifestations de cette amélioration, on peut noter l'augmentation du poids des animaux au XVIIIe siècle : sur le marché de Genève, le poids moyen des bœufs, qui était de 187 kilos en 1730, passe à 343 en 1788, et même à 386 pour les bœufs de première qualité.