Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

Stavisky (affaire),

scandale politico-financier à l'origine de l'émeute du 6 février 1934.

Le 24 décembre 1933, alors qu'instabilité ministérielle et crise économique attisent l'antiparlementarisme, le directeur du Crédit municipal de Bayonne est arrêté pour avoir émis 200 millions de francs en bons de caisse gagés sur des bijoux faux ou volés. L'enquête permet de remonter jusqu'au fondateur de l'établissement, Alexandre Stavisky, déjà condamné pour escroquerie, abus de confiance, recel, etc., mais qui s'est constitué un réseau d'amitiés politiques, de la droite aux radicaux. Ces derniers semblent en première ligne, avec Garat, député-maire de Bayonne, l'avocat Bonnaure, député de Paris, ou Chautemps, chef du gouvernement, dont le beau-frère, procureur général, a accordé à l'escroc dix-neuf reports de procès.

Cette escroquerie n'est pas la pire qui ait été commise durant ces années : elle lèse, non pas directement les épargnants, mais des institutions. Mais c'est une affaire de plus, donc de trop. En outre, la droite parlementaire, salie par des affaires précédentes et dont certains membres étaient liés à Stavisky, saisit l'occasion de discréditer les radicaux. Elle fait donc chorus avec l'extrême droite, d'autant que Stavisky, en fuite, est retrouvé mort à Chamonix le 8 janvier, et que son suicide supposé laisse dubitatif. On accuse la police ; Chautemps démissionne le 28 ; et les ligues, mais aussi des organisations d'anciens combattants et le PCF, appellent à manifester à Paris, le 6 février, jour de l'investiture du nouveau président du Conseil, Édouard Daladier.

STO (service du travail obligatoire),

service institué en février 1943 par le gouvernement de Vichy, sous la pression des Allemands, pour contraindre les jeunes Français à travailler pour le compte du Reich.

À partir de l'été 1942, Fritz Sauckel, responsable allemand du recrutement de la main-d'œuvre dans les pays occupés, accentue ses pressions pour obtenir le départ de travailleurs français en Allemagne : il s'agit de satisfaire les besoins de la machine de guerre hitlérienne. Laval imagine d'abord le dispositif de la « relève » (juin 1942), qui prévoit le départ de trois travailleurs contre le retour d'un soldat prisonnier. Fondé initialement sur le volontariat, ce dispositif devient vite coercitif. La loi du 16 février 1943, « portant institution du service du travail obligatoire », traduit cette évolution : tous les jeunes des classes 20, 21 et 22 (et bientôt une partie de la classe 19) sont astreints à un service civil de deux ans en Allemagne. Devant les résistances que suscitent ces départs forcés, la priorité est donnée à la mobilisation de la main-d'œuvre en France même, dans des usines travaillant pour l'Allemagne (accords Speer-Bichelonne du 17 septembre 1943) ; jusqu'au mois de juin 1944, l'administration et la police de Vichy s'emploient, de concert avec l'occupant, à traquer réfractaires et « planqués ».

À la Libération, environ 650 000 requis français travaillent en Allemagne, notamment au titre du STO. La justice française refusera de leur reconnaître le titre de « déportés du travail ». Renforçant l'hostilité de la population à l'égard du régime de Vichy et des Allemands, le STO a décidé nombre de jeunes à rejoindre les maquis : son impopularité aura finalement servi la cause de la Résistance.

Stofflet (Jean Nicolas),

chef vendéen (près de Lunéville, Meurthe-et-Moselle, 1753 - Angers 1796).

En 1770, il s'engage dans l'armée, où il devient caporal après plus de quinze ans de service, et y est remarqué par le comte Colbert de Maulévrier, propriétaire dans les Mauges (Anjou), qui le prend à son service comme garde des bois (1787).

Résistant aux mesures de la Révolution, il se retrouve à la tête d'une bande de jeunes insurgés, dès mars 1793. Intégré dans la grande armée catholique et royale, il devient l'un de ses chefs et participe à toutes ses batailles de l'été 1793 comme major général. Il continue de combattre au cours de la « virée de Galerne » (marche vers les ports du nord de la Loire, dans l'espoir d'un débarquement anglo-émigré). Ayant réussi à traverser la Loire - en direction du sud - sous le commandement d'Henri de La Rochejaquelein, il devient général en chef de l'armée des Mauges après la mort de ce dernier, en janvier 1794. Résistant aux « colonnes infernales » de Turreau à partir de son camp établi dans la forêt d'Yzernai, il s'allie avec les autres chefs vendéens, Charette, Sapinaud et Marigny (il fait exécuter ce dernier en juillet 1794 après une décision collective). Son caractère, ses convictions, peut-être l'influence de son conseiller, l'abbé Bernier, lui font mener une politique autonome, jusqu'à battre monnaie au nom du roi. En 1795, il refuse de participer aux pourparlers de pacification de La Jaunaye, mais doit finalement se soumettre le 2 mai 1795. Il entretient ensuite des relations compliquées, tout à la fois, avec les émigrés, les républicains et Charette, retardant tout nouvel engagement. Il reprend la guerre en janvier 1796, pour se retirer aussitôt, faute d'être suivi par la population. Il trouve alors refuge dans la forêt ; mais, capturé par les républicains alors qu'il se rendait à une réunion clandestine, il est jugé et fusillé à Angers, en février 1796.

Strasbourg (serments de),

serments d'alliance entre Louis le Germanique et Charles le Chauve prononcés en février 842, et considérés comme les premiers textes de la langue française.

L'unité de la Chrétienté, réalisée par Charlemagne sous la pression de l'Église - mais aussi avec son aide -, reste fragile, parce que le principe de la monarchie héréditaire se heurte aux traditions barbares, selon lesquelles le territoire en héritage est partagé entre tous les « ayants droit ». À la mort de Charlemagne, Louis le Pieux n'a pas de rival, ses frères étant morts du vivant de l'empereur. En 817, poussé par les intellectuels ecclésiastiques de son entourage, il fait de son fils aîné, Lothaire, son seul successeur. Mais cette décision étant contraire à la coutume, la seconde femme de Louis revendique une part d'héritage pour son propre fils, le futur Charles le Chauve ; Louis lui donne satisfaction, créant les conditions d'un conflit. De fait, après la mort de Louis (840), Lothaire, soutenu par l'Église, et ses deux puînés, Louis le Germanique et Charles le Chauve, réclament chacun son dû. Ces deux derniers ont évidemment intérêt à s'unir contre leur aîné : ils scellent leur alliance par les serments de Strasbourg.