Gouvernement révolutionnaire, (suite)
La Convention, centre du gouvernement.
• « La Convention nationale est le centre unique de l'impulsion du gouvernement », déclare l'article 1er du décret du 14 frimaire an II. On affirme ainsi qu'il n'y a pas de possibilité de penser ni de laisser agir un exécutif susceptible de devenir indépendant du pouvoir législatif. Si le Comité de salut public inspecte directement les corps constitués et les fonctionnaires, et si le Comité de sûreté générale est chargé de la police générale et intérieure, ces deux organes sont responsables devant la Convention qui, tous les mois, décide ou non de les reconduire. Les Comités incarneraient ainsi l'idée d'une magistrature collective octroyée aux conventionnels par le vote de confiance du pouvoir législatif, régulièrement renouvelé. Ils ne tirent donc leur autorité que de la Convention - à laquelle ils rapportent leurs décisions -, qui est responsable collectivement des décrets adoptés par le Gouvernement révolutionnaire. Ainsi, ce terme ne désigne pas un mode d'exercice du pouvoir exécutif, mais une forme particulière d'organisation des pouvoirs.
Un gouvernement de guerre guidé par des principes.
• Le Gouvernement révolutionnaire est d'abord un gouvernement de temps de guerre qui doit instituer « la liberté contre les ennemis de la liberté ». Régime fondateur singulier, il s'oppose, à ce titre, au gouvernement constitutionnel, qui doit être « le régime de la liberté victorieuse et paisible ». En effet, la décision d'adopter ce mode exceptionnel de gouvernement afin d'enraciner des principes du droit naturel est indissociable d'un des préceptes de ce dernier : « Le salut du peuple est la loi suprême. » C'est pour ne pas courir le risque de laisser la Contre-Révolution triompher que le gouvernement est déclaré « révolutionnaire », que des élections qui se seraient déroulées dans un contexte de guerre civile sont ajournées, et que les conventionnels préfèrent placer le texte constitutionnel dans une arche de cèdre, tout en maintenant la validité de la Déclaration des droits de 1793, qui n'a jamais cessé, en l'an II, de fournir les principes de ce gouvernement. Cependant, les fonctions de celui-ci sont bien de se débarrasser des contre-révolutionnaires et de défendre la puissance publique contre les attaques des factieux. Toute la difficulté consiste à ne pas abandonner la liberté civile au nom de la liberté publique. L'exercice du pouvoir ne peut être que délicat, car il s'agit à chaque instant de savoir juger de l'avantage public et de la souffrance privée. Il n'y a donc pas de règle a priori, mais seulement des principes qui doivent guider l'action en fonction du jugement politique porté sur les situations que les comités, les représentants en mission, les tribunaux et l'Assemblée doivent examiner.
Un appareil maintenu en l'an III.
• Les structures de ce type de gouvernement, tant décrié par les thermidoriens, ne sont pas fondamentalement transformées en l'an III, date à laquelle on cesse de les considérer comme provisoires. En revanche, le projet politique change : l'idée de fonder un régime démocratique est abandonnée, et une nouvelle Constitution ainsi qu'une nouvelle Déclaration sont adoptées, au mépris de celles de 1793. De ce fait, « ce sont les suspects qui changent » (Françoise Brunel).