Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Républiques sœurs,

appellation désignant les États créés par le Directoire dans les pays conquis par la France entre 1795 et 1799.

Une définition évolutive.

• L'idée de « République sœur » apparaît dans les discours « patriotes », dès les premières années de la Révolution. Desmoulins considère par exemple les Républiques belge et liégeoise de 1789 comme des alliées naturelles de la France « régénérée ». Après l'instauration de la république (septembre 1792), l'expression s'applique surtout aux États-Unis et à la Suisse, dont on espère l'aide contre la « coalition des tyrans ». C'est l'identité des principes politiques dont se réclament les « peuples frères » (la souveraineté populaire, la reconnaissance des droits de l'homme...) qui constitue la base du concept : aussi, les États aristocratiques tels que Venise ne sont-ils pas considérés comme des « Républiques sœurs ».

Sous la Convention, les partisans de la guerre de conquête - notamment certains girondins - donnent un nouveau contenu à cette idée : les peuples voisins sont sommés de se « républicaniser », sous peine d'être rejetés parmi les ennemis de la France. Les « Républiques sœurs » doivent constituer un glacis protecteur et une zone d'influence pour la puissance française.

Après le 9 Thermidor, le Directoire met en place des régimes républicains dans une partie des pays conquis : le terme de « République sœur » prend alors son sens communément admis d'État satellite créé par l'intervention militaire française. Ainsi naissent, successivement, les Républiques batave (1795), cisalpine (1797), ligurienne (1797), romaine (1798), helvétique (1798) et l'éphémère République parthénopéenne (dans le royaume de Naples, en 1799).

Cette définition ne doit pas néanmoins induire en erreur, car ces États satellites ne sont pas tous des régimes fantoches totalement manipulés par la France. Certains sont dirigés par des révolutionnaires locaux, qui bénéficient du soutien d'une partie de la population. C'est le cas notamment de la République batave : la Hollande avait connu une révolution avortée entre 1783 et 1787, à l'issue de laquelle les « patriotes » locaux avaient dû se réfugier en France ; la République batave est donc avant tout une « restauration » patriote. Les Républiques sœurs italiennes ont sans doute une légitimité politique moins grande, car elles doivent beaucoup à la politique de Bonaparte qui entend utiliser, à ses propres fins, le mouvement patriote italien. Enfin, la République helvétique s'appuie sur un mouvement local représenté par le Bâlois Ochs et le Vaudois La Harpe.

La politique de la France dans les Républiques sœurs.

• Elle est hésitante et évolue au gré de la situation politique et militaire, mais on peut tout de même y relever certaines constantes. Les Français ont tendance à s'appuyer sur les notables patriotes plutôt que sur les éléments les plus radicaux : on le constate notamment dans la Péninsule, où Bonaparte écarte les partisans de l'unité italienne. Le Directoire pratique dans les Républiques sœurs comme en France une politique de bascule, soutenant tour à tour différentes factions révolutionnaires par le biais de nombreux coups d'État organisés avec les troupes françaises, comme par exemple en Hollande le 22 janvier 1798. L'influence de « la Grande Nation » peut également se lire dans les textes constitutionnels adoptés par les Républiques sœurs : ceux-ci se présentent souvent comme des variantes de la Constitution de l'an III. Quand les patriotes locaux proposent des solutions institutionnelles plus radicales, les Français n'hésitent pas à influer sur les votes des assemblées : ainsi, Bonaparte fait-il modifier dans un sens conservateur le projet des patriotes italiens réunis à Bologne en 1796. D'une manière générale, le Directoire entend avant tout doter les États conquis d'une administration soumise à ses volontés. Comme le dit La Revellière-Lépeaux à propos de la République cisalpine, les gouvernements locaux doivent « servir aux intérêts exclusifs de la République française » ; les Républiques sœurs doivent être « assez puissantes pour nous être utiles et [...] jamais assez pour nous nuire ».

La politique sociale reste, dans l'ensemble, très timide : on ne veut pas aller contre les notables sur lesquels on entend s'appuyer. Ainsi, par exemple, les redevances de type féodal, tels les cens et champarts, ne sont pas abolies dans la République batave, mais déclarées rachetables. Les différentes Républiques sœurs disparaissent lorsque Napoléon Ier réorganise la carte de l'Europe.

Résistance.

Attitude politique de refus de la défaite de 1940 et de l'Occupation, la Résistance se traduit par la constitution d'un authentique contre-pouvoir au régime du maréchal Pétain.

Alors que l'entre-deux-guerres a été une période de luttes politiques acharnées, elle demeure un phénomène unique dans l'histoire de la France contemporaine, réalisant une imprévisible union nationale. Pour autant, cette union n'est ni totale ni immédiate : la Résistance ne parvient pas à éliminer toutes les divisions politiques qui la parcourent, et son discours ne se forge que lentement, par la sédimentation de différentes influences.

Les premières Résistances

La Résistance des premières heures frappe par sa pluralité et sa faiblesse. En dépit des mythologies politiques triomphantes de l'après-guerre - le gaullisme et le communisme -, la Résistance, à l'origine, ne doit rien à ces deux puissants futurs tuteurs et a surgi spontanément. La plupart des premiers combattants de l'ombre n'ont pas entendu l'appel du 18 juin et ont mis très longtemps avant d'établir un contact permanent avec Londres et d'accepter - difficilement - de se considérer comme les soldats en service commandé de la France libre ; quant au communisme, les premiers résistants auraient plutôt eu tendance à l'abhorrer. Spontanée, la Résistance est également faible. À l'été 1940, dans une France abasourdie par la défaite et anesthésiée par le discours pétainiste, seules des initiatives dispersées et disparates sont concevables : à Brive, Edmond Michelet mobilise les réseaux d'influence de la démocratie chrétienne au bénéfice des réfugiés antifascistes ; à Marseille, un capitaine démobilisé, nettement à droite avant la guerre, Henri Frenay, n'accepte pas la défaite et cherche à recruter des volontaires pour former une future armée secrète ; en zone nord, un militant socialiste, Jean Texcier, diffuse des tracts qui invitent les Français à ignorer les Allemands ; à Paris, le 11 novembre 1940, des lycéens et des étudiants tentent de célébrer, à l'Arc de triomphe, le jour anniversaire de la victoire de 1918, et sont violemment dispersés par les Allemands. Ces petits groupes mettront de longs mois avant de commencer à coordonner leur action. D'ailleurs, tout manque à ces premiers résistants : l'argent, les armes, les contacts, les volontaires, l'expérience de la vie clandestine et, surtout, l'appui de la population. Henri Frenay, après des mois de quête, ne parvient à réunir que quelques milliers de francs et une centaine de compagnons. Indice de cette extrême faiblesse, la première organisation de quelque importance de la zone nord - le réseau du Musée de l'homme, animé par des chercheurs du musée (Boris Vildé, Anatole Lewitsky) et soutenu par son directeur, Paul Rivet - est décapitée par la Gestapo à l'hiver 1941.