Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

Collaboration, (suite)

Vers la soumission totale.

• En novembre 1942, avec le débarquement allié en Afrique du Nord, l'occupation consécutive de la totalité du territoire français et le sabordage de la flotte à Toulon, le régime de Vichy perd les seuls arpents de souveraineté qui pouvaient encore justifier le choix de la collaboration. Il fait néanmoins de l'utilisation de son administration et de sa police l'objet d'ultimes négociations, qui tournent au bénéfice de l'occupant. À partir de février 1943, les services français veillent à l'enrôlement de la main-d'œuvre vers l'Allemagne, dans le cadre du Service du travail obligatoire (STO) : en 1944, plus de quatre millions de Français travailleront directement pour l'économie allemande, en France même ou outre-Rhin. Quant à la police française, elle continue de traquer juifs, communistes et résistants. Elle est bientôt doublée par les hommes de la Milice, dont le secrétaire général Joseph Darnand, qui a prêté serment de fidélité à Hitler, rejoint le gouvernement au mois de janvier 1944. D'autres collaborationnistes, tels Marcel Déat et Philippe Henriot, font aussi leur entrée à Vichy. Après avoir envisagé de prendre leurs distances par rapport à l'occupant en décembre 1943, Pétain et Laval acceptent l'entière soumission du régime de Vichy aux intérêts du Reich.

Les collaborationnistes.

• La plupart des collaborationnistes sont restés opposés à Vichy jusqu'en 1944. Admirateurs du national-socialisme, ils rêvent d'une véritable alliance avec l'Allemagne, et reprochent à Pétain et à ses proches un certain attentisme. Regroupés, pour l'essentiel, à Paris, ils dirigent des partis - le Parti populaire français, de Jacques Doriot ; le Rassemblement national populaire, de Marcel Déat - et animent des journaux tels que Je suis partout (auquel collabore l'écrivain Robert Brasillach), qui bénéficient de l'appui financier de l'occupant. Mais leur outrance leur aliène le soutien de l'opinion. Le collaborationnisme évolue au cours de l'Occupation : limité d'abord à une activité de propagande, il fournit, par la suite, des hommes à la Milice ainsi qu'aux armées qui combattent sur le front de l'Est, sous uniforme allemand. Ces combats de la dernière heure attirent souvent des hommes jeunes et socialement déclassés.

Face à l'avancée des Alliés sur le territoire français, collaborationnistes et vichyssois gagnent l'Allemagne, au mois d'août 1944. C'est à Sigmaringen que l'État français connaît ses derniers jours.

Les interprétations.

• Dès les lendemains de la guerre, les défenseurs de Vichy ont voulu accréditer la thèse du double jeu ou de la raison d'État, alors que ses détracteurs ont assimilé l'attitude de Pétain, de Darlan ou de Laval à celle des collaborationnistes. En 1968, le politologue Stanley Hoffmann formule le concept de « collaboration d'État ». Puis, en 1972, Robert Paxton propose, dans la France de Vichy, des analyses qui font désormais autorité : Hitler n'a jamais considéré la France comme une alliée potentielle. Voulue par Vichy, la collaboration d'État a servi les intérêts des Allemands en leur garantissant la neutralité du vaincu et une occupation à peu de frais. Contrairement aux thèses des thuriféraires de Vichy, elle n'a guère amélioré le sort des Français ; tout au plus a-t-elle légitimé dans la société des comportements d'« accommodation » à la présence allemande, selon le terme de l'historien Philippe Burrin.

collège,

établissement d'enseignement secondaire réservé, jusqu'à la période contemporaine, aux garçons.

À l'aube de l'histoire universitaire, au XIIIe siècle, les collèges sont des résidences ouvertes aux étudiants peu fortunés. En 1257, le théologien Robert de Sorbon fonde, à Paris, un collège qui porte son nom ; son exemple est rapidement suivi, et Paris compte 14 collèges en 1300, 60 en 1450. Simples pensions à l'origine, ces établissements deviennent, dès le XVe siècle, des lieux d'enseignement, et remplacent les facultés des arts dans le cursus préparatoire aux facultés supérieures (droit, médecine et théologie).

L'âge d'or du collège.

• À partir du XVIe siècle, le collège s'impose comme l'institution centrale du système éducatif : contrairement aux universités, il s'adapte aux exigences intellectuelles de l'humanisme en s'ouvrant à une pédagogie qui rompt avec la tradition médiévale. En 1509, appelé à réformer le collège de Montaigu, à Paris, Jean Standonck donne à cet établissement un règlement calqué sur celui des écoles tenues par les Frères de la Vie commune, aux Pays-Bas. Il met en place un nouveau mode d'enseignement, qui répartit les élèves en sept classes distinctes, correspondant au degré d'avancement dans la connaissance du latin. Cette « manière parisienne » est connue et imitée dans le reste de la France au cours du XVIe siècle : municipalités et prélats rivalisent pour fonder des collèges. Malgré leur succès, ceux-ci se heurtent à des difficultés financières et de recrutement des professeurs, ou régents.

Le collège humaniste accorde une part essentielle à l'étude des auteurs anciens, mais il constitue aussi un lieu d'éducation morale et religieuse. En des temps de lutte entre catholiques et protestants, et dans le dessein de rallier la jeunesse, il devient un terrain de rivalités confessionnelles. Les réformés français s'inspirent du modèle de l'Académie créée en 1559 à Genève, accordant une place importante aux études bibliques et au grec. Du côté catholique, les initiatives reviennent essentiellement aux jésuites : fondant leur premier collège à Billom (Auvergne) en 1556, ils s'imposent rapidement comme la principale congrégation enseignante. Leur succès repose sur la Ratio studiorum, publiée en 1599, programme d'études qui fixe pour plus d'un siècle les normes scolaires. Les collèges de la Compagnie de Jésus sont imités par ceux des oratoriens et des doctrinaires, ces derniers étant principalement implantés dans le sud du pays. Un réseau dense et complet se met en place dans le royaume, surtout au début du XVIIe siècle : 47 collèges sont fondés avant 1560, 153 entre 1560 et 1650, et seulement 55 après 1650. Les collèges d'humanités se distinguent des collèges de plein exercice par l'enseignement de la philosophie. Partout, le latin tient une place centrale, mais les jésuites sont aussi des professeurs de mathématiques renommés. Leur pédagogie a fréquemment recours au théâtre scolaire.