Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

École militaire de Paris, (suite)

Le succès de l'école est mitigé. En raison du niveau extrêmement inégal des élèves, une école de préparation est créée en 1764 et installée dans le collège de La Flèche, avant qu'en 1776 le comte de Saint-Germain ne se décide à fermer l'établissement parisien, qui formait des élèves condamnés à végéter dans les grades subalternes. Il répartit alors les cadets-gentilhommes, portés au nombre de 600, dans 12 « écoles royales militaires », qui ne sont, en réalité, que des collèges dirigés par des religieux, comme Sorèze, Tournon, Auxerre, Vendôme, La Flèche ou Brienne. Les « élèves du roi » côtoient ainsi nobles et roturiers, qui ne se destinent pas tous à la carrière des armes. Les programmes accordent cependant la primauté à l'enseignement militaire, incluant des notions d'artillerie, de guerre de siège, de maniement d'armes. Les meilleurs éléments, tel le jeune Napoléon Bonaparte, complètent leur formation à l'École militaire de Paris, rétablie dès le 17 juillet 1777, avant sa suppression définitive en 1788.

Depuis, l'École militaire a abrité successivement la Garde consulaire, la Garde impériale et la Garde royale sous la Restauration. Elle a accueilli, à la fin du XIXe siècle, les écoles supérieures de guerre, jusqu'à leur fusion en 1994 dans le Collège interarmées de défense (CID) ; elle est le siège du Centre des hautes études militaires (CHEM) et de l'Institut des hautes études de la Défense nationale (IHEDN).

École normale supérieure,

établissement d'enseignement supérieur destiné à former des professeurs et des chercheurs, littéraires et scientifiques.

Inspirée de l'expérience autrichienne des Normal-Haupt und Trivialschulen organisées en 1774 par Marie-Thérèse pour former les maîtres d'une instruction devenue publique après la suppression de l'ordre des Jésuites, une première École normale est créée par la Convention nationale, le 9 brumaire an III (30 octobre 1794). Regroupant certains des meilleurs savants de l'époque (Monge, Laplace, Lagrange, Berthollet), elle reçoit pour mission de former les instituteurs de la République selon la « méthode révolutionnaire », déjà éprouvée à l'École des armes, et qui consiste en un enseignement de qualité, à la fois centralisé et accéléré. Mais cette première expérience échoue, et l'école ferme en mai 1795. Son souvenir, attaché aux personnalités qui y ont enseigné, se perpétue pourtant, et, le 17 mars 1808, un décret impérial fonde un établissement similaire, sous le nom de « pensionnat normal ». Dès lors, malgré des changements d'appellation - elle reprend le nom d'École normale en 1830, auquel s'ajoute « supérieure » en 1845 - et une brève suspension entre 1822 et 1826, l'ENS devient un élément essentiel de l'enseignement supérieur. En 1847, après avoir été hébergée en divers lieux - amphithéâtre du Muséum, séminaire du Saint-Esprit, lycée Louis-le-Grand, etc. -, elle s'installe dans ses murs, rue d'Ulm.

À partir des années 1890, la stabilisation du régime républicain contribue à l'élever au rang de véritable institution nationale : connue du grand public, elle s'impose aussi dans l'imagerie littéraire, notamment à travers les œuvres de Romain Rolland, Jules Romains ou Roger Martin du Gard. L'influence des normaliens culmine dans l'entre-deux-guerres : puissants au sein de l'Université, ils investissent le milieu littéraire ; l'Académie française, par exemple, comprend alors régulièrement un quart d'anciens élèves. Cependant, c'est en politique que leur ascendant s'affirme le plus : le nombre de députés normaliens reste sans doute modeste (9 en 1924, 13 en 1928), mais certaines des personnalités politiques les plus en vue, particulièrement dans les rangs de la gauche, sont issues de l'institution. Après Jean Jaurès, Édouard Herriot, Paul Painlevé et Léon Blum incarnent ce que d'aucuns considèrent comme une emprise de l'École normale sur la vie politique. Cette influence décroît lentement après 1945, malgré l'élection de Georges Pompidou à la tête de l'État en 1969. Subsiste alors l'éclat intellectuel de quelques figures emblématiques : Sartre, Althusser, Foucault. Mais, dans les années soixante-dix, l'ENS perd son aura dans l'imaginaire collectif.

écoles normales d'instituteurs,

établissements chargés de la formation des maîtres d'école, dont les premières apparaissent en Alsace et en Lorraine à partir de 1810.

« Les départements placés à l'avant-garde de la défense nationale furent aussi à l'avant-garde de la diffusion de l'enseignement populaire », soulignait en 1900 l'inspection générale. Guizot, pour qui l'État ne devait pas se dérober à sa fonction d'instituteur national, fit adopter en 1833 une loi obligeant chaque département à ouvrir une école normale de garçons. Mais l'Église et les conservateurs, considérant que le demi-savoir acquis par les élèves-maîtres était une menace pour l'ordre, les critiquaient sans relâche. En 1850, Falloux n'empêcha leur suppression qu'en laissant aux conseils généraux le choix de les conserver. Aucune école ne fut fermée sous le Second Empire.

En 1879, la loi Paul Bert marqua un tournant décisif : désormais tout département devait se doter de deux écoles normales, l'une pour les garçons et l'autre pour les filles. Leur organisation n'allait plus connaître de bouleversements avant que le régime de Vichy ne décide de les remplacer, dès septembre 1940, par des instituts régionaux de formation professionnelle. Après 1945, l'abolition de la barrière entre les ordres d'enseignement, le souci de revaloriser, fût-ce sur un mode symbolique, le métier d'instituteur et de mieux l'adapter aux transformations de la société ont conduit, de réforme en réforme, à la suppression des écoles normales, remplacées à partir de 1991 par des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM).

Écouen (édit d'),

édit promulgué par Henri II le 2 juin 1559, par lequel le roi nomme des commissaires qu'il charge de poursuivre les protestants et auxquels il demande à tous ses officiers d'apporter leur concours.

Cette intransigeance monarchique face à l'Église réformée, inspirée par le connétable Anne de Montmorency, s'inscrit dans la politique catholique affirmée depuis l'édit de Fontainebleau (1540) et réactivée par le traité de Cateau-Cambrésis (2 avril 1559), scellant la paix franco-espagnole au nom de la guerre à outrance contre les hétérodoxes. L'édit de Compiègne (1557) condamnait déjà à mort tout individu coupable d'hérésie. Mais la nouvelle Église ne cesse de se développer, et n'hésite pas à se manifester ouvertement (réunion calviniste au Pré-aux-Clercs du 13 au 19 mai 1558). En vertu du nouvel édit, Henri II décide alors l'envoi dans toutes les provinces du royaume de « certains bons et notables personnages, pour procéder à l'expulsion, punition et correction desdits hérétiques ». Ces commissaires doivent accélérer la procédure, sorte d'Inquisition civile. Mais certains conseillers au parlement de Paris protestent contre cet absolutisme religieux qui heurte autant leurs privilèges que leur conviction religieuse. Le souverain réagit brutalement en embastillant les magistrats les plus contestataires (10 juin 1559).