Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Monge (Gaspard), (suite)

Favorable aux idéaux de la Révolution, il milite dès 1789 dans des clubs proches du nouveau régime, mais poursuit avant tout son travail de chercheur. Les événements du 10 août 1792 modifient son parcours : ses activités patriotiques et politiques se déploient alors tous azimuts. Il participe à l'effort de guerre comme ministre de la Marine (12 août 1792-10 avril 1793), puis au sein de différentes instances chargées de répondre aux besoins en matière d'armement. Par ailleurs, il collabore activement à la mise en place du nouveau système d'enseignement : professeur à l'École normale, membre de l'Institut, il est surtout l'un des fondateurs de l'École polytechnique, dont il devient directeur en 1797. Personnalité influente, scientifique hors pair, il parachève sa carrière dans le sillon de Bonaparte, avec lequel il s'est lié lors d'une mission en Italie (1796-1797) et au cours de l'expédition d'Égypte (1798-1799) : sénateur à vie, président du Sénat en 1806, il est créé comte de l'Empire en 1808. Parallèlement, il publie des ouvrages importants, notamment l'Application de l'analyse à la géométrie (1807). Parti en exil après Waterloo, il rentre à Paris en 1816, où, jusqu'à sa mort, il est harcelé par les tenants de la réaction.

Monge étant le symbole d'une communauté scientifique qui a su défendre et illustrer la nation républicaine, sa dépouille a été transférée au Panthéon en 1989.

Moniteur universel (le),

quotidien fondé au début de la Révolution (1789) et qui tient lieu de journal officiel des gouvernements successifs de 1800 à 1868, avant de cesser de paraître en 1901.

Journal d'informations générales, prudent et mesuré, le Moniteur constitue pour l'historien une source documentaire de première main sur la période allant de la Révolution jusqu'au Second Empire. En témoignent les multiples réimpressions - moins fiables que l'édition originale - dont il fait l'objet dès l'an IV (1795) et durant le XIXe siècle. Fondé sous le titre de Gazette nationale ou le Moniteur universel par l'éditeur de presse Panckoucke, qui veut en faire un « papier-nouvelles à la manière anglaise », le Moniteur paraît pour la première fois le 24 novembre 1789 dans un exceptionnel grand format in-folio, format qui ne se généralisera qu'au XIXe siècle. Il est immédiatement apprécié pour sa retenue, pour le sérieux de ses informations (concernant les administrations, les tribunaux, le commerce et les finances...), et pour la publication du « bulletin de l'Assemblée nationale », qui rend compte avec réalisme des débats de la Constituante grâce à une sténographie inventée par l'un de ses rédacteurs, Maret. Ces qualités assurent, pendant la période de la Terreur, la survie de ce journal modéré, qui sait rester neutre et servir tous les gouvernements.

Subventionné par le Comité de salut public en l'an II, utilisé par le Directoire qui y fait insérer des articles émanant des autorités, il devient, dès le Consulat, un véritable journal officiel en obtenant le monopole de publication des actes et des communiqués du gouvernement, et, sous l'Empire, le principal organe de propagande, dont les articles sont rédigés dans les ministères et le cabinet de l'Empereur. C'est alors l'un des quatre journaux parisiens à être autorisés par le décret du 4 février 1811 - qui supprime toutes les feuilles politiques -, auquel l'ensemble de la presse est tenu de se référer. Après une brève mise à l'écart au début de la Restauration, il retrouve son caractère officiel dès 1816, prenant le sous-titre de Journal officiel à partir de 1848. Cependant, sous le Second Empire, au lendemain de la loi du 11 mai 1868, qui libéralise le régime de la presse, il perd son monopole au profit du Journal officiel, créé le 1er janvier 1869 par Rouher, autoritaire ministre de Napoléon III. Journal conservateur, le Moniteur est par la suite contrôlé par le publiciste et affairiste Émile de Girardin, membre du conseil d'administration de la Compagnie du canal de Panamá, qui le met au service de ses affaires. Discrédité, comme tant d'autres journaux, par le scandale de Panamá, le Moniteur perd de son influence et disparaît en juin 1901.

monnaie

Des espèces sonnantes et trébuchantes, pesées par les changeurs de l'époque médiévale, aux cartes à puce d'aujourd'hui, l'évolution des moyens de paiement est spectaculaire.

Les noms mêmes de la monnaie se sont modifiés : on comptait en « livres tournois » dans la France d'Ancien Régime, en « francs » dans celle des XIXe et XXe siècles. Désormais, l'heure est à l'« euro ». Pourtant, les principaux problèmes et enjeux de l'histoire monétaire restent souvent semblables au cours des temps : identité ou statut de ceux qui possèdent le droit d'émission ; rapport entre la quantité de monnaie en circulation et les besoins de l'économie ; multiples répercussions - internes ou externes, économiques, sociales ou politiques - des phénomènes monétaires.

La monnaie, fait du prince

Le droit de battre monnaie est inséparable de la notion de souveraineté. Les cités gauloises indépendantes l'exercent, frappant des pièces d'or, d'argent ou de bronze sur lesquelles s'expriment la fantaisie et la virtuosité de l'art celte. Après l'effondrement de l'Empire romain, les royaumes barbares continuent à émettre des pièces sur le modèle impérial. Vers 540, un petit-fils de Clovis, Théodebert Ier, est, semble-t-il, le premier à frapper une monnaie à son propre nom. Mais bientôt la contraction des échanges, la rupture des communications avec les mondes byzantin et arabe, par lesquels transite l'or, entraînent la quasi-disparition de ce métal. On y substitue, pour cinq siècles, l'argent. C'est en argent qu'est définie la nouvelle monnaie de compte instituée par Charlemagne vers 780, la livre, elle-même subdivisée en 20 sous et 240 deniers, qui, eux, sont effectivement en circulation. La restauration monétaire carolingienne demeure toutefois précaire, car le morcellement de l'autorité étatique entraîne une multiplication des ateliers monétaires. Les seigneurs, grands et petits, les évêques, les abbayes, les villes, battent monnaie. En outre, étant donné que plusieurs systèmes d'unités de compte coexistent - la livre parisis (de Paris), par exemple, différant de la livre tournois (de Tours) -, le désordre monétaire est extrême. Ce n'est que sous le règne des derniers Capétiens directs que le pouvoir royal parvient, très progressivement, à y mettre fin. La prospérité de l'économie permet alors une réapparition des pièces d'or : celles-ci proviennent d'abord d'Italie, mais elles sont bientôt produites par le pouvoir royal lui-même, puisqu'en 1266 Saint Louis frappe les premiers écus d'or. Les espèces émises par ses successeurs portent des noms variés, souvent liés aux symboles y figurant : pièces d'or, tels les écus, couronnes, moutons, agnels ou francs (lesquels sont frappés de 1360 à 1380, sous les règnes de Jean le Bon et de Charles V) ; d'argent, comme les gros, les écus blancs ; de cuivre, enfin, pour la monnaie d'appoint, comme les liards.