Soldat inconnu (le), (suite)
Cette invention commémorative de la Grande Guerre s'inscrit dans un cadre international puisque des funérailles nationales sont célébrées dans plusieurs pays pour les centaines de milliers de morts impossibles à identifier en raison des carnages auxquels donnèrent lieu les combats entre 1914 et 1918. En France, le choix du Soldat inconnu parmi les morts de Verdun - lieu désormais mythique -, et la date de son transfert à Paris vont de soi. Mais une forte hostilité conduit à dédoubler cette cérémonie, qui marque aussi le cinquantenaire de la République : au Panthéon, le cœur de Gambetta, grand homme « ordinaire » ; à l'Arc de triomphe, le « cœur de la France », le Soldat inconnu. Si la République victorieuse s'autocélèbre deux fois avec panache, la ferveur des centaines de milliers d'anonymes montre que la nation tout entière adopte le soldat inconnu : « C'est une poignée de terre sanglante qu'un nouveau miracle ressuscite en lui donnant la figure et l'âme de la France », écrit le journal le Temps. Durant des années, les provinciaux et les étrangers qui visitent Paris ne manquent pas de se rendre sur la tombe de l'Arc de triomphe. Au-delà des cérémonies officielles et des défilés militaires, le Soldat inconnu a bien synthétisé les valeurs de sacrifice liées à la guerre. Et par un retournement typique des années 1920 et 1930, la tombe est devenue aussi l'un des hauts lieux symboliques du pacifisme.