camps de détention et de concentration,
camps dans lesquels ont été internés, au cours de l'histoire récente, des opposants ou des réfugiés politiques, ainsi que des personnes appartenant à des groupes persécutés tels que les tziganes et, surtout, les juifs. Si les camps les plus connus sont ceux du régime de Vichy, cette pratique date de la IIIe République et s'est reproduite pendant les guerres coloniales.
Les camps apparaissent à la veille de la Seconde Guerre mondiale et sont destinés à regrouper les étrangers dont les activités politiques sont jugées dangereuses (Rieucros, Le Vernet) et les républicains espagnols fuyant le franquisme (Argelès-sur-Mer, Saint-Cyprien, Barcarès, Arles-sur-Tech, Prats-de-Mollo, puis, du fait des mauvaises conditions d'hébergement, Agde, Bram, Septfonds et Gurs). La décision de créer des camps pour étrangers dans le pays des droits de l'homme et du droit d'asile s'explique par l'afflux des réfugiés dans la France de l'entre-deux-guerres, par la crise qui provoque un repli xénophobe, puis par le début du conflit. Ainsi, après la déclaration de guerre, le gouvernement regroupe les ressortissants des pays ennemis (Allemands, Autrichiens et Italiens) qui étaient venus chercher refuge en France, alors que des camps sont créés pour les communistes et certains syndicalistes qui leur sont proches.
Le régime de Vichy élargit l'usage des camps, les utilisant pour enfermer les opposants et dans le cadre de sa politique xénophobe, antisémite et raciste. Ainsi, à la suite des lois sur le statut des juifs (3 octobre 1940, 2 juin 1941), une trentaine de camps fonctionnent, où les détenus vivent dans des conditions déplorables. À partir de l'été 1942, avec la complicité des autorités françaises, les nazis emploient ces camps dans le cadre de la « solution finale » : des rafles massives conduisent au moins 75 000 personnes dans des camps de regroupement (Drancy, Pithiviers, Beaune-la-Rolande), avant la déportation dans les camps d'extermination. Parallèlement, les Allemands installent au Struthof, dans l'Alsace occupée, un camp de concentration et d'extermination pour les déportés politiques de toute l'Europe.
Pendant la guerre d'Algérie, la France ouvre de nouveau des camps, en Algérie et en France, pour regrouper les villageois déplacés et pour interner militants du FLN et suspects. Après les accords d'Évian (1962), les camps métropolitains (Mourmelon, Saint-Maurice-l'Ardoise, Thol, le Larzac) sont utilisés pour emprisonner les Français soupçonnés d'appartenir à l'OAS et pour abriter les premiers harkis rapatriés.
Camus (Albert),
journaliste, écrivain et philosophe (Mondovi, aujourd'hui Deraan, Algérie, 1913 - Villeblevin, près de Montereau, 1960).
Albert Camus grandit dans le quartier populaire européen de Belcourt, à Alger. Il y connaît la pauvreté ; sa mère, veuve et illettrée, peine en effet à élever ses enfants. Il ne se débarrassera jamais de la tuberculose, dont le premier accès, à 17 ans, renforce son sentiment du tragique et de l'absurde.
Ses succès scolaires lui permettent d'entrer en première supérieure, puis à la faculté de philosophie d'Alger. Parallèlement, il crée et dirige une troupe de théâtre et s'essaie à l'écriture (l'Envers et l'endroit, 1937 ; Noces, 1939). Antifasciste, partisan du Front populaire et pacifiste, il adhère en 1935 au Parti communiste algérien, où il noue quelques contacts avec les milieux nationalistes du Parti populaire algérien de Messali Hadj. Mais il rend bientôt sa carte, déçu par le sectarisme du parti et sa défense systématique de l'URSS. Commence alors, en 1938, une carrière de journaliste à Alger républicain, puis au Soir républicain, journaux de gauche fondés par son ami Pascal Pia. Il écrit plus de cent articles, dont la fameuse série « Misère en Kabylie », dans laquelle il critique la politique coloniale et l'aveuglement des Européens d'Algérie. En 1940, réformé, il part pour la France. C'est la fin de sa période algérienne.
« Il faut une destinée » (« l'Homme révolté »).
• Installé à Paris en mars 1940, Camus présente ses manuscrits aux éditions Gallimard. Sont alors publiés les titres qui formeront ce qu'il nommera le « cycle de l'absurde » : un roman, l'Étranger (1942) ; un essai philosophique, le Mythe de Sisyphe (1942) et une pièce de théâtre, Caligula (1944). Le succès est immédiat ; le public découvre un écrivain et un penseur pour lequel l'homme doit dépasser ce sentiment de l'absurde dans la lucidité, afin de parvenir à la révolte. Il s'engage dans la Résistance en 1942, participant au journal clandestin Combat.
À la Libération, Camus est donc une personnalité, tout comme Sartre auquel le lie une véritable amitié. Rédacteur en chef de Combat de 1944 à 1947, il prend notamment position contre les excès de l'épuration. Cependant, il reste un peu en marge du monde intellectuel parisien. Son ton moraliste, sinon moralisant, agace. Ses livres ont certes du succès (Lettres à un ami allemand, 1945 ; la Peste, 1947 ; les Justes, 1949 ; l'Homme révolté, 1951 et la Chute, 1956, qu'il regroupe sous l'appellation « cycle de la révolte »), mais ses origines populaires et ses études inachevées lui interdisent une solidarité de caste avec bien des intellectuels de gauche, qui ne lui font pas crédit de son sérieux philosophique. Il reste honni par le PCF parce qu'il refuse d'ignorer le totalitarisme concentrationnaire stalinien, et est rejeté par Sartre et les Temps modernes, à la suite d'un vif échange d'articles à propos de son essai l'Homme révolté. Camus demeure pourtant profondément étranger à la droite, rejette le modèle américain et défend, sans illusions mais avec constance, les idées socialistes démocratiques. Ainsi, soutient-il Mendès France dans l'Express entre 1955 et 1956.
Les années cinquante provoquent une dernière déchirure : la question algérienne. Ce « pied-noir », qui comprend mal le nationalisme algérien, rejette le FLN, coupable de terrorisme, autant que les ultras français. Ses tentatives d'apaisement, tel son appel à la trêve en janvier 1956 à Alger, sont mal comprises. La consécration du prix Nobel de littérature, reçu en octobre 1957, n'efface pas cette amertume. Lorsqu'il meurt dans un accident de voiture, le 4 janvier 1960, c'est un homme jeune et plein de projets qui disparaît. On retrouve près de son corps le manuscrit d'un roman inachevé, le Premier Homme, publié en 1994 par les soins de sa fille et qui rencontre, comme toute son œuvre, un grand succès en France et dans le monde.