Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
F

fascisme français. (suite)

De Vichy à nos jours.

• L'effondrement de 1940 lui-même ne l'a guère favorisé. La dictature du régime de Vichy relève plutôt de la contre-révolution, d'un traditionalisme proche de l'« ordre moral ». Les groupes fascistes collaborationnistes parisiens, qui gravitent autour de Déat, de Doriot, etc., sont entièrement soutenus par l'occupant, et se disputent une clientèle restreinte. Ils ne participent au gouvernement et n'investissent l'appareil répressif qu'à partir de 1943 - avec la Milice -, mais l'État français est alors coupé de la société civile et ne reste en place que par la volonté de Hitler. Si cela n'enlève rien à la gravité des crimes commis, cela ne permet pas de décrire le fascisme comme enraciné dans le pays.

On peut d'ailleurs, comme Pierre Milza, « considérer [le fascisme] comme une forme de pouvoir politique appartenant au passé et qui ne correspond plus aux besoins des sociétés hyperindustrialisées ». En dehors de théoriciens comme Maurice Bardèche et de groupuscules intransigeants sans importance réelle, ses partisans sont devenus les éléments minoritaires d'un courant où leur sont associés des nostalgiques de Vichy, des traditionalistes, des intégristes, des nationalistes, etc. Cette coalition de fait a connu des fortunes variées, jouant sur l'anticommunisme de la guerre froide, les frustrations de la décolonisation, les difficultés des victimes de la modernisation des années cinquante, ou la crise économique. Cela a donné l'OAS, le mouvement Poujade, ou le Front national, dont on peut penser qu'ils ont été ou sont un danger pour la démocratie, mais qui, dans leur globalité, ne relèvent pas du fascisme au sens strict du terme.

Faure (Edgar),

homme politique (Béziers 1908 - Paris 1988).

Avocat dès 1927, il est membre du Comité français de libération nationale (CFLN), puis du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF), et délégué au Tribunal international de Nuremberg. Député radical en 1946, secrétaire d'État (1949-1950) et plusieurs fois ministre à partir de 1950, il est président du Conseil une première fois en janvier-février 1952, puis succède à Pierre Mendès France de février 1955 à janvier 1956. Son gouvernement est alors confronté aux problèmes d'Afrique du Nord : il favorise le retour du sultan Mohammed ben Youssef au Maroc, préparant ainsi l'indépendance du pays, et fait aboutir les accords relatifs à l'autonomie interne de la Tunisie (avril 1955). Il avance les élections par dissolution de l'Assemblée nationale (2 décembre 1955), et cette transgression de ce qui est alors un tabou républicain lui vaut d'être écarté du Parti radical. Il s'oppose au Front républicain, formé de mendésistes, de socialistes et de républicains sociaux, qui remporte pourtant les élections de 1956. En 1958, il vote l'investiture du général de Gaulle, et, un temps éloigné du pouvoir, devient professeur de droit public, avant d'être réintégré au Parti radical (1961). En 1963, il négocie la reconnaissance de la Chine populaire par la France. Il devient ministre de l'Agriculture en 1966, mais c'est surtout à l'Éducation nationale qu'il imprime sa marque au lendemain de mai 68 grâce à des réformes profondes (loi Faure). En 1973, il est élu pour cinq ans au « perchoir » de l'Assemblée nationale, où il manifeste son talent oratoire. Auteur d'essais et d'ouvrages historiques, il a aussi publié des romans policiers sous le pseudonyme d'Edgar Sanday (« Edgar sans d »).

Faure (Félix),

homme politique, président de la République de 1895 à 1899 (Paris 1841 - id. 1899).

La petite histoire a surtout retenu de ce personnage sa mort à l'Élysée, après une visite galante de Meg Steinheil, épouse d'un peintre pompier ; mais, fils d'un artisan parisien, fier de sa réussite dans la tannerie, Félix Faure incarne les « couches nouvelles » chères à Gambetta. Adjoint au maire du Havre à partir de 1870, soucieux des intérêts économiques de sa cité, député en 1881, sous-secrétaire d'État aux Colonies trois mois plus tard, il se veut « républicain conservateur », hostile aux radicaux. Il est vice-président de la Ligue des patriotes, fondée en 1882, qu'il quitte dès 1883 quand Déroulède prend violemment à partie la politique coloniale de Jules Ferry. Il occupe plusieurs postes ministériels (Commerce, Colonies, Marine) avant d'être élu président de la République, le 17 janvier 1895, contre le radical Henri Brisson. C'est précisément parce qu'il n'est pas un homme de premier plan qu'il a pu rassembler tous les adversaires des radicaux. Surnommé le « Président-Soleil » pour son amour du faste, il multiplie les voyages en province, et souhaite une République forte face aux monarchies. Il sait à cet effet user de son influence, facilite l'entente avec la Russie, aide à apaiser la crise de Fachoda. Mais il ne comprend pas la portée de l'affaire Dreyfus, et sa neutralité favorise les mouvements nationalistes. Son conservatisme, un certain manque de brio intellectuel, mais aussi son antidreyfusisme de fait, ont contribué à le faire oublier, ou à ne laisser de lui que le souvenir des circonstances de son décès.

Faure (Paul),

homme politique (Périgueux 1878 - Paris 1960).

Fils d'un avocat républicain, Paul Faure milite, à partir de 1901, dans les rangs du socialisme guesdiste. Tout au long de sa carrière politique, il se fera propagandiste : par le journalisme, mais aussi par les discours, brochures et ouvrages divers. Maire du Creusot (1925-1929), il est plusieurs fois député, et, après la scission de Tours en décembre 1920, devient, pour vingt ans, secrétaire général du Parti socialiste (SFIO). Il incarne, dès lors, l'appareil du parti, tandis que Léon Blum en est le leader intellectuel. Face aux courants d'opposition, il se pose en gardien de la doctrine, participant à l'exclusion des contestataires. Ministre d'État dans les gouvernements de Front populaire (1936-1938), il y assure la liaison avec le parti. Avec la montée des tensions internationales, il devient l'animateur d'une tendance de la SFIO anticommuniste favorable au maintien de la paix à tout prix. En 1938, la rupture est consommée avec la mouvance Blum, plus soucieuse de fermeté antifasciste.