antisémitisme. (suite)
La défaite porte au pouvoir les chantres de l'antisémitisme, dont l'idéologie offre une grille d'interprétation commode pour expliquer l'ampleur du désastre. À Vichy, un antisémitisme d'État se met en place. Dès l'automne 1940 (le processus s'accentue après juin 1941), les juifs sont recensés, fichés, exclus d'un nombre grandissant de professions ; leurs biens sont « aryanisés ». En zone sud, les préfets internent jusqu'à 40 000 juifs étrangers. À partir de l'été 1942, l'infrastructure ainsi déployée et la politique de collaboration menée par le gouvernement français contribuent à l'application de la « solution finale » en France.
Vers le reflux ?
• La libération du territoire français et l'abolition de la législation antisémite ne signifient pas pour autant la disparition d'un antisémitisme à caractère populaire, économique et xénophobe, attisé par ceux qui avaient profité de la spoliation des juifs. Pourtant, l'expression publique de sentiments antisémites devient taboue ; l'antisémitisme - apanage d'une droite déconsidérée par les années Vichy, puis marginalisée à nouveau après la guerre d'Algérie - cesse ainsi de constituer une force politique en France, malgré la subsistance de quelques vagues d'agressions antisémites : une série d'attaques lors du bref passage de Pierre Mendès France à la présidence du Conseil (1954-1955), une vague de graffitis et d'incendies criminels (1959-1960) et l'affaire de la rumeur d'Orléans, en mai 1969.
Quand, le 29 novembre 1967, le général de Gaulle, alors président de la République, qualifie les juifs de « peuple d'élite, sûr de lui-même et dominateur » lors d'une conférence de presse, il brise le tabou. Dès lors, l'antisionisme idéologique, en essor depuis la guerre des Six Jours, devient le prétexte à des dérives antisémites qui, cette fois, n'épargnent pas une partie de la gauche politique et qui atteignent leur apogée durant la guerre du Liban, en juin 1982. Dans le même temps, un nouvel avatar de l'antisémitisme s'exprime à travers les thèses négationnistes développées par Robert Faurisson (Défense de l'Occident, 1978). Reprenant une thèse avancée par Paul Rassinier à la fin des années quarante, Faurisson nie l'existence des chambres à gaz. Une fraction de l'ultragauche, renouant avec l'antisémitisme de certains socialistes prémarxistes, se fait l'écho de ces thèses. Elles alimentent également le discours d'une extrême droite qui, depuis le début des années quatre-vingt, a connu un nouvel élan sous l'égide du Front national, et n'hésite pas à reprendre à mots couverts les thèmes consacrés du discours antijuif. Politiquement marginal, condamné par la loi (loi Pleven du 1er juillet 1972 et loi Gayssot du 13 juillet 1990), l'antisémitisme contemporain semble, cependant, avoir une emprise moindre sur l'opinion publique française.
Toutefois, les attitudes antisémites paraissent connaître une recrudescence certaine liée en grande partie à l'évolution de la situation au Proche-Orient : profanations de cimetières, déclarations offensantes, injures, voire actes de violence…