Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

Courbet (Gustave),

peintre (Ornans, Doubs, 1819 - La Tour-de-Peilz, Suisse, 1877).

Après un premier apprentissage auprès d'un élève d'Antoine Gros, qui l'incite à travailler d'après nature, Courbet reçoit les enseignements d'un élève de David, puis, en 1839, rejoint la bohème parisienne. Son Autoportrait au chien noir est accepté au Salon de 1844. À partir de 1847, il ambitionne, s'élevant contre la tradition, d'appliquer les dimensions de la grande peinture à la représentation de la société de son temps. Il connaît son premier succès au Salon de 1849 : son Après-dînée à Ornans, médaille d'or, est acheté par l'État. Séduit par les idées socialistes tout en demeurant attaché à un « républicanisme de notable » (Jean-Luc Mayaud), il dédaigne, en 1848 comme en 1851, les manifestations politiques, préférant le combat d'un réalisme assimilé à la révolution. Les Casseurs de pierres, les Paysans de Flagey revenant de la foire et Un enterrement à Ornans, exposés au Salon de 1850, en sont un manifeste. Ces toiles effraient toutefois le public conservateur, qui juge d'un très mauvais goût le choix de peindre ce qu'il croit être les classes laborieuses. Un pavillon personnel permet néanmoins à celui qui est désormais considéré comme le chef de file du réalisme de présenter l'Atelier du peintre, en 1855. Son œuvre est ensuite davantage consacrée à la représentation de la nature (Marée basse à Trouville, 1865 ; la Vague, 1870) ou de la nudité féminine (l'Origine du monde, 1865 ; Femme au perroquet, 1866), quand elle n'entremêle pas les deux (la Femme à la vague, 1868). Chargé, durant la Commune, des fonctions de président de la Fédération des artistes, Courbet est emprisonné après la « semaine sanglante » et rendu responsable de la destruction de la colonne Vendôme. Condamné à financer sa reconstruction, il s'exile en Suisse, où il meurt en 1877. Ses combats contre l'académisme et son retour à la nature ont ouvert la voie aux impressionnistes.

couronne,

principal attribut du pouvoir royal, remis dès le IXe siècle au roi (ou à l'empereur) lors d'une cérémonie très ritualisée, qui allie le sacre au couronnement.

Chaque roi possède plusieurs couronnes, qu'il revêt à l'occasion de toutes les grandes cérémonies politiques (entrées royales, lits de justice), mais la plus importante est celle du sacre. Il semble qu'à l'origine chaque souverain fasse réaliser - pour l'occasion - une couronne qui lui est propre. Puis, progressivement, celle du sacre, dite « de Charlemagne », et celle de Saint Louis acquièrent une valeur particulière et sont réutilisées. Cette dernière, fondue en 1793, remontait à la première moitié du XIIIe siècle et était censée contenir des épines de la couronne du Christ. L'année de fabrication de la couronne de Charlemagne demeure incertaine (fin du XIIe, ou seconde moitié du XIIIe siècle), et l'on n'en possède qu'une représentation : en or, ouverte, elle est ornée de quatre fleurons en forme de fleurs de lis et rehaussée par de nombreuses pierres précieuses. La plupart des rois de France l'ont portée jusqu'à la Révolution.

Au Moyen Âge, la remise de la couronne a une grande valeur constitutionnelle et juridique, car elle consacre la dignité royale de son destinataire et l'investit de ses droits. Toutefois, quand le principe héréditaire de la monarchie capétienne s'affirme, la cérémonie du couronnement perd de son importance, le fils aîné devenant automatiquement le nouveau roi à la mort de son père.

La couronne, insigne matériel, désigne par extension le domaine royal ou symbolise le pouvoir souverain, sans pour autant faire référence au roi en tant qu'individu. Cette couronne est alors invisible, immatérielle et perpétuelle.

Courrier de Lyon (affaire du),

crime commis le 27 avril 1796 (8 floréal an IV), suivi d'une retentissante affaire judiciaire.

Quelques heures après avoir quitté Paris pour Lyon, une malle-poste transportant des dépêches, 7 millions en assignats (dépréciés) et 16 000 francs en numéraire est retrouvée vide sur la route de Lieusaint à Melun, le postillon et le courrier gisant morts à côté. Très vite, sur les témoignages d'aubergistes, six suspects sont arrêtés, dont Joseph Lesurques, qui clame son innocence. Il est néanmoins traduit devant le tribunal criminel de la Seine et condamné à mort le 5 août 1796 ; de même que deux autres accusés, Couriol et Bernard. Survenant dans une période où les attaques de diligences et les exactions de chauffeurs sont en recrudescence, cette affaire banale tire sa célébrité de la certitude qu'il s'agit d'une erreur judiciaire. Des débats passionnés animent tant la presse à sensation que la presse politique, émouvant durablement l'opinion publique. Malgré de solides alibis et les aveux de Couriol, qui, une fois la sentence prononcée, dénonce ses complices et crie l'innocence de Lesurques, malgré, aussi, la décision du Directoire, qui porte l'affaire devant le Conseil des Cinq-Cents, Lesurques est exécuté le 30 octobre. Par la suite, les coupables désignés par Couriol sont arrêtés et condamnés : parmi eux, Dubosq, qui ressemble à Lesurques et qui sera guillotiné en 1801. Si, en 1824, la famille Lesurques obtient la restitution d'une partie de ses biens confisqués, elle demandera vainement, tout au long du XIXe siècle, la réhabilitation du condamné.

Courrières (catastrophe de),

accident qui provoque la mort de 1 100 à 1 200 mineurs dans le bassin houiller de Courrières (Pas-de-Calais), le 10 mars 1906.

Un coup de grisou ravage 110 kilomètres de galeries, provoquant la plus terrible des tragédies de la mine survenues en France. S'ensuit une très vive tension sociale, car les ingénieurs de la compagnie concessionnaire nient l'origine de l'accident pour ne pas mettre en cause des mesures de sécurité honteusement insuffisantes. Pire, ils arrêtent très vite les opérations de secours afin que le travail reprenne au plus tôt. Or, la découverte de treize survivants laisse penser que d'autres mineurs auraient pu être sauvés. Une grève éclate. Clemenceau, qui vient d'être nommé ministre de l'Intérieur, se rend sur place, manifeste sa compréhension, tout en demandant le respect de la légalité. Mais des débordements se produisent et la mairie de Lens est assiégée. Clemenceau y voit un affront personnel. 20 000 soldats, plus d'un pour deux grévistes, occupent alors la région. Les pierres répondent aux charges, le sang coule, la répression s'ajoute à la catastrophe et la haine s'installe, réciproque, entre le leader radical et les anarcho-syndicalistes de la CGT. En outre, la tragédie devient symbole du malheur ouvrier : un dessin de Grandjouan représente un homme aux traits tirés qui a ces mots : « Courrières ou Fourmies, il n'y a qu'à choisir. » Et l'événement marque suffisamment les esprits pour que, encore en 1994, le Parti socialiste réuni en congrès à Liévin le commémore, donnant à l'opinion le signe d'un virage à gauche.