Reubell ou Rewbell (Jean François),
homme politique (Colmar 1747 - id. 1807).
Cet avocat au conseil souverain d'Alsace est élu député du Tiers aux états généraux de 1789 par le bailliage de Colmar et Sélestat, et acquiert suffisamment d'influence pour devenir président de l'Assemblée constituante (avril-mai 1791). Sous la Législative, il assure la fonction de procureur général syndic du Haut-Rhin. Il est élu à la Convention en septembre 1792, et se voit confier, avec deux autres représentants en mission, la défense de Mayence, ville prise par Custine en octobre mais encerclée d'avril à juillet 1793 par les forces du roi de Prusse. L'acte de capitulation de cette place (22 juillet) stipulant que les troupes françaises peuvent retourner librement en France à condition de ne plus servir sur la frontière, Reubell rejoint la Vendée avec les soldats de l'armée de Mayence. Mais il rentre finalement à Paris, où il observe une prudente discrétion jusqu'à la chute de Robespierre. Thermidor relance sa carrière : il entre au Comité de sûreté générale (octobre-décembre 1794), puis au Comité de salut public (mars-juillet 1795). En novembre 1795, il devient l'un des cinq directeurs prévus par la nouvelle Constitution, chargé notamment des Affaires extérieures. Contre Carnot, partisan de la paix et de la stabilisation de la Révolution, il prône alors une politique de conquête : en particulier, il considère le Rhin comme l'une des « frontières naturelles » de la France. Par ce choix stratégique, il se range parmi les adversaires de Bonaparte, qui, lui, est plutôt favorable à une politique offensive vers l'Italie. Contraint par tirage sort de quitter le pouvoir exécutif en mai 1799 (le Directoire est en effet partiellement renouvelé chaque année), il devient membre du Conseil des Anciens, et perd toute influence après le coup d'État du 18 brumaire.
Jusqu'à sa mort (23 novembre 1807), Reubell se trouve aux prises avec de graves difficultés financières, sa fortune, glanée de manière plus ou moins légale au cours de ses années de pouvoir, ayant été dilapidée par l'un de ses fils.
Réunion (la),
île de l'océan Indien, colonie française de 1642 à 1946, département d'outre-mer depuis 1946.
C'est en 1642 que la Compagnie d'Orient prend possession de cette île déserte découverte au siècle précédent par les Portugais, et lui donne le nom d'île Bourbon. Quelques colons y séjournent de 1654 à 1657, mais c'est seulement à partir de 1662, avec l'arrivée de Payen de Vitry, que s'installe une population permanente. En 1664, l'île est concédée à la Compagnie des Indes orientales ; les débuts du peuplement y sont lents et il n'y a encore que 1 500 habitants au début du XVIIIe siècle. La mise en valeur progresse alors sous l'administration du gouverneur de Parat (introduction de la culture du café vers 1715), puis sous celles de Benoît Dumas (1727/1735) et, surtout, du gouverneur général Mahé de La Bourdonnais (1735/1746). Par la suite, l'intendant Pierre Poivre (1767/1771) encourage la production d'épices. Le privilège de la Compagnie des Indes orientales est aboli en 1769. En 1778, l'île compte 47 000 habitants, dont 37 000 esclaves. Les décrets de la Convention abolissant l'esclavage n'y sont pas appliqués.
L'île, rebaptisée « île de la Réunion » en 1793, est occupée par les Anglais en 1810, puis rétrocédée à la France en 1815, en vertu du traité de Paris : dépourvue de port - à la différence de l'île Maurice -, elle n'intéresse pas les Anglais. À partir de 1830, le groupe des Francs-Créoles s'oppose à l'émancipation des esclaves et encourage le peuplement des cirques des hauteurs, où vont s'établir les « petits Blancs des Hauts ».
Lors de la révolution de 1848, le Gouvernement provisoire décrète l'abolition de l'esclavage (63 000 affranchis), entraînant le déclin de l'économie de plantation (canne à sucre) et l'immigration de main-d'œuvre indienne : jusqu'en 1885, plus de 100 000 Malabars viennent s'y établir. Sous la IIIe République, l'île est dotée d'une représentation parlementaire et les députés de la Réunion jouent un rôle important dans les origines de l'intervention française à Madagascar.
Ralliée à la France libre en novembre 1942, la Réunion est érigée en département d'outre-mer en mars 1946. Des progrès notables sont alors réalisés dans les domaines de l'équipement hospitalier, scolaire et routier. Depuis 1982, l'île forme une région monodépartementale. Elle est peuplée d'environ 630 000 habitants (estimation de 1994), et 150 000 Réunionnais se seraient établis en métropole. Cinq députés et trois sénateurs la représentent au Parlement. Fondé en 1959, le Parti communiste réunionnais revendique un statut d'autonomie. Le chômage et un malaise social certain, surtout perceptible parmi la jeunesse, ont à plusieurs reprises engendré des émeutes dans la ville de Saint-Denis.
Réunions (politique des),
série d'annexions pratiquées par Louis XIV de 1679 à 1684, en pleine période de paix.
Après la paix de Nimègue (1678-1679), qui met fin à la guerre de Hollande, le roi et Louvois, s'inspirant de la politique du « pré carré » prônée par Vauban, cherchent à renforcer les frontières du royaume en résorbant les enclaves étrangères et en s'assurant de points d'appui. Sur le modèle utilisé par Richelieu et Mazarin, ils exploitent les possibilités du droit féodal en exigeant que les vassaux étrangers de terres françaises prêtent hommage au roi de France, sous peine de confiscation de leurs domaines. Les magistrats des chambres de réunion des parlements de Metz et de Besançon et du conseil souverain d'Alsace parviennent à des résultats spectaculaires. Le procureur général de Metz, Ravaulx, se distingue particulièrement. Le bourg de Fraulauter est enlevé au duc de Nassau-Sarrebrück et on y édifie la citadelle de Sarrelouis ; le duché de Deux-Ponts est annexé, au grand dam du roi de Suède, parent du duc ; la principauté de Montbéliard est retirée au duc de Wurtemberg ; en Alsace, plusieurs villes, parmi lesquelles Lauterbourg, sont prises à l'Électeur palatin. Le comté de Chiny est lui aussi déclaré « réuni », ouvrant la voie à des revendications sur les autres territoires du Luxembourg qui appartiennent à l'Espagne. En revanche, c'est sans recourir à des arguties juridiques qu'en septembre 1681 Louis XIV occupe Strasbourg, ville libre d'Empire, dont il refuse de reconnaître la neutralité. En même temps, il s'empare de Casale, capitale du Montferrat et clé de la vallée du Pô.