Haute Cour de justice, (suite)
Les Constitutions de 1791, de l'an III, de l'an VIII, de 1848 et de 1852 prévoient des Hautes Cours, formées, chacune, de magistrats et de « hauts jurés », choisis sur les listes d'électeurs. Ainsi, la Cour organisée selon les dispositions de l'an III condamne à mort Babeuf pour la conjuration des Égaux. L'Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire (1815), les Chartes de 1814 et de 1830, les lois constitutionnelles régissant la IIIe République, confondent Haute Cour et Chambre haute du Parlement, à l'exemple des pays anglo-saxons. Ainsi, la Chambre des pairs condamne à mort le maréchal Ney en 1815, poursuit le prince de Polignac pour trahison en 1830. Sous la IIIe République, le Sénat instruit les procès du général Boulanger et d'Henri Rochefort en 1889, ceux de Déroulède en 1899 et de Joseph Caillaux en 1918. Enfin, les Constitutions de l'an XII, du régime de Vichy, des IVe et Ve Républiques ne prévoient ni de jurys comportant de simples citoyens ni de Chambre haute habilitée à juger. La Haute Cour impériale est essentiellement formée de dignitaires de l'Empire et de sénateurs. Le gouvernement de Vichy met en place une Cour suprême de justice, formée de magistrats et de juristes. Elle siège à Riom, où elle conduit, de février à avril 1942, le procès de plusieurs dirigeants de la IIIe République - notamment Édouard Daladier, Paul Reynaud, Léon Blum, tous anciens présidents du Conseil, et le généralissime Gamelin -, procès qui tourne d'ailleurs à la confusion du régime de Vichy. La Haute Cour de justice réapparaît à la Libération, sous le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF), puis sous la IVe République, composée essentiellement de parlementaires. Elle juge et condamne à mort le maréchal Pétain (dont la peine est toutefois commuée en détention à perpétuité par le général de Gaulle).
Sous la Ve République, la Haute Cour de justice est une émanation du Parlement, puisque ses membres sont élus en son sein. Sa compétence est d'ordre politique ; en effet, elle peut juger le président de la République pour « haute trahison », délit qui ne bénéficie d'aucune définition pénale. À l'égard des membres du gouvernement, la Haute Cour doit en revanche se conformer au Code pénal. En outre, la mise en accusation (avant la réforme de la juridiction en 1993) doit être votée à la majorité absolue par les deux Chambres du Parlement. Cela explique qu'aucune procédure engagée auprès de la Haute Cour n'ait abouti à un procès, tant elle donne lieu à des affrontements politiques. Après une révision de la Constitution votée par le Congrès en juillet 1993, une loi transforme la Haute Cour en Cour de justice de la République. La juridiction se compose de vingt-quatre juges titulaires et de douze suppléants, élus pour moitié par l'Assemblée nationale parmi les députés et pour moitié par le Sénat parmi les sénateurs et dirigée par un président et deux vice-présidents élus en son sein. Elle peut être saisie par n'importe quel citoyen, dont la plainte n'est donc pas soumise à un vote du Parlement.