Glacière (massacre de la),
épisode survenu dans la nuit du 16 au 17 octobre 1791 en Avignon, provoqué par les rivalités locales liées à la Révolution.
Après plusieurs mois de guerre civile, Avignon et le Comtat Venaissin sont annexés à la France en septembre 1791, mais la Cité des papes demeure divisée entre « patriotes modérés », soutenus par le club jacobin, et « patriotes prononcés », appuyés par les chefs de l'armée avignonnaise, dont Jourdan « Coupe-Têtes », personnage rustre et violent. Les premiers, délogés de la municipalité par les seconds le 21 août 1791, n'ont de cesse de reprendre le pouvoir. Parmi les rumeurs lancées par les modérés contre les nouveaux administrateurs, l'une fait état des pleurs d'une statue de la Vierge de l'église des Cordeliers ; elle provoque une émeute et l'assassinat de Lescuyer, patriote prononcé, le 16 octobre. En représailles, une foule conduite par Jourdan, qui lui ouvre les portes du Palais des papes, massacre sauvagement une soixantaine de prisonniers (anciens officiers municipaux et suspects arrêtés à la suite du meurtre de Lescuyer), qu'elle précipite dans la tour de la Glacière. Cet événement, reflet des divisions nationales, qui alimente les récriminations des opposants à la Révolution, connaît un grand retentissement et provoque l'arrestation des responsables ainsi que la réintégration de l'ancienne municipalité, néanmoins remplacée, dès juillet 1792, par les « glaciéristes » amnistiés. Il s'inscrit dans le contexte du sanglant contentieux en Avignon, où la Terreur blanche sera d'une rare brutalité après thermidor an II.
Globe (le),
journal fondé en 1824 par l'autodidacte Pierre Leroux et le professeur Théodore Dubois.
Né dans un cercle d'universitaires, de mondains et d'écrivains, le Globe est libéral et romantique : comme en témoigne un article de Ludovic Vitet réclamant dès 1825 « un 14 Juillet du goût », ses rédacteurs ne séparent pas la libération des formes et de l'espace esthétiques de la liberté politique. Aussi, la publication - à laquelle collaborent Sainte-Beuve, Hauranne, Blanqui, Guizot, Cousin, Saint-Hilaire - glisse-t-elle peu à peu, sous l'influence croissante de Leroux, du domaine purement philosophico-littéraire à l'engagement idéologique. Le Globe, devenu quotidien, est ainsi l'une des feuilles les plus acerbes de la presse d'opposition à Polignac. Dénonçant les ordonnances « liberticides » de juillet 1830 (rétablissement de la censure et du régime d'autorisation), s'associant à la pétition de Thiers (27 juillet), il participe aux Trois Glorieuses.
Sur une position indécise - ni monarchie ni République -, le Globe subit une mue importante en 1831. En janvier, il devient l'« organe des saint-simoniens ». S'orientant vers l'économie et un socialisme mystique, le journal perd de son aura. En avril 1832, il disparaît, peu après les publications saint-simoniennes liées à son cercle rédactionnel (Encyclopédie nouvelle, Revue indépendante, Revue sociale). Il reparaîtra de manière éphémère, et toujours au nom du saint-simonisme, en 1837, puis en 1845, avant d'être absorbé par le Crédit en 1848.
Gobelins (Manufacture royale des),
entreprise de tapisserie privilégiée fondée par Colbert à Paris. Elle tient son nom d'un teinturier établi dans le faubourg Saint-Marcel au XVe siècle, et qui devient l'éponyme du quartier.
C'est là qu'Henri IV installe en 1601 une équipe de tapissiers flamands, dont les ateliers sont transformés en manufacture-pilote par Colbert en 1662. Il y fait venir les tapissiers, ébénistes, sculpteurs et orfèvres qui avaient travaillé pour Nicolas Fouquet à Vaux-le-Vicomte, et nomme Charles Le Brun directeur.
En 1667 est définitivement érigée la « Manufacture royale des meubles de la couronne ». Elle abrite notamment 250 tapissiers, sous l'égide de 4 chefs d'atelier, qui sont en fait des entrepreneurs bénéficiant du privilège royal et travaillant à façon pour le roi. Ayant en charge l'ameublement des demeures royales, elle donne le ton, devant à la fois incarner la perfection technique et travailler à la gloire de Louis XIV. Les peintures de Le Brun sont reproduites sous forme de cartons, qui servent de modèles aux lissiers pour fabriquer des tentures richement ornées. Après la mort de Colbert en 1683, Louvois impose des économies à la manufacture. Il écarte peu à peu Le Brun, au profit de Pierre Mignard, qui le remplace finalement en 1690. Un temps fermée en 1694, la manufacture est rouverte en 1699, mais se consacre désormais exclusivement à la tapisserie. Au XVIIIe siècle, les expériences malheureuses de son directeur, le peintre Jean-Baptiste Oudry, en ternissent la réputation, mais elle demeurera le symbole d'un luxueux artisanat d'État.
Godefroi de Bouillon (Godefroi IV de Boulogne, dit),
duc de Basse-Lorraine, un des chefs de la première croisade (Baisy, près de Genappe, vers 1060 - Jérusalem 1100).
Second fils d'Eustache II de Boulogne et de sainte Ida, Godefroi hérite de son oncle, Godefroi le Bossu, duc de Basse-Lorraine, la marche d'Anvers et le comté de Verdun en 1076, puis la Basse-Lorraine en 1087. Son ardeur à défendre le château de Bouillon lui vaut le nom de Godefroi de Bouillon. Lorsque le pape Urbain II prêche la croisade en 1095, il prend la tête de l'une des armées croisées, composée de chevaliers du nord-est de la France et de Germanie. Partis à la mi-août 1096, les croisés ne prennent Jérusalem que le 15 juillet 1099.
Un mois plus tard, Godefroi de Bouillon, après avoir refusé le titre de roi, prend celui d'« avoué [protecteur] du Saint-Sépulcre ». Il organise alors les terres conquises, crée des fiefs, conquiert des forteresses. Il meurt accidentellement le 18 juillet 1100 ; les structures féodales du royaume latin de Jérusalem qu'il a commencé à mettre en place perdurent toutefois. Son frère Baudouin est sacré et couronné roi à Bethléem le 25 décembre 1100.
Sitôt mort, Godefroi de Bouillon entre dans la légende : il est le héros de la Chanson d'Antioche et du Chevalier au cygne, dont la bravoure et la piété répondent aux figures imposées des chansons de geste. Bien que certains historiens se soient montrés méfiants devant les excès laudatifs de la tradition, il n'y a pas lieu de le considérer comme un médiocre, mais plutôt comme l'archétype du croisé, à la foi totale, intolérant et brave, politique par nécessité, désireux de protéger avant tout les Lieux saints.