François Ier. (suite)
De même, il entend à la fois rester l'allié d'Henri VIII, qui s'oriente vers le schisme, et renouer avec le pape Clément VII. Mais, s'il convainc le pape d'une rencontre à Marseille en octobre 1533, et s'il lui offre pour sa nièce Catherine de Médicis un mariage royal en la personne de son fils Henri, il consomme à cette occasion sa rupture avec le roi d'Angleterre ; en outre, la mort de Clément VII en septembre 1534 rend bien faibles les avantages du mariage conclu. Parallèlement, les retombées de la répression qui fait suite à l'affaire des Placards brouillent le roi avec les princes luthériens, tandis que le pape Paul III, désireux de réunir un concile général, se rapproche de Charles Quint, auréolé de sa croisade victorieuse contre Tunis en 1535. C'est à ce moment-là que l'Italie revient au centre des préoccupations royales avec la mort du duc de Milan, qui ne laisse aucun descendant : François réclame le duché pour son second fils et, pour mieux asseoir ses prétentions, envoie Chabot de Brion envahir les États du duc de Savoie en février 1536. Mais il ne s'agit pas d'une réédition des expéditions précédentes : Savoie et Piémont deviendront un glacis protecteur plus qu'un tremplin vers de nouvelles conquêtes. Une stratégie plus défensive s'affirme, sous l'impulsion d'Anne de Montmorency, devenu l'homme le plus puissant de la cour : lors de la nouvelle invasion de la Provence par Charles Quint en personne durant l'été 1536, la politique de la terre brûlée et le refus du combat contraignent l'empereur à battre en retraite en septembre. Mais, cette fois, il n'est pas poursuivi par l'armée du roi, lequel est resté prudemment à l'arrière de ses troupes. À court d'argent, François se contente d'envoyer Montmorency reprendre le Piémont, puis signe la trêve de Monzon le 16 novembre. Quelque temps après, il propose même à Charles une paix définitive : les discussions de Nice, sous l'égide du pape, en juin 1538, puis la rencontre directe d'Aigues-Mortes en juillet, semblent l'ébauche d'une vraie réconciliation. Charles Quint, en route pour aller mater la révolte de Gand, traverse même triomphalement la France en novembre 1539, guidé par le roi. Mais, une fois de plus, la question de Milan fait échouer les négociations.
Ces années-là sont marquées par la recrudescence des intrigues de palais autour d'un roi vieillissant entouré de deux fils qui se jalousent et de ses maîtresses, dont la première d'entre elles, Mme d'Étampes, a une influence politique réelle. C'est aussi le temps des révoltes populaires dans l'Ouest - dues au refus de réformer la gabelle. De nouvelles campagnes, en 1542, au Luxembourg et en Roussillon, s'achèvent sans résultat notable. L'année suivante, François Ier rend publique son alliance militaire avec les Turcs en mêlant sa flotte à la leur pour assiéger Nice, puis en autorisant, au grand scandale des contemporains, Barberousse et ses galères à passer l'hiver à Toulon, préalablement vidée de ses habitants. La dernière grande campagne du règne, malgré l'éphémère victoire du duc d'Enghien à Cérisoles en Piémont, le 14 avril 1544, vise d'abord à défendre la frontière du Nord face à la coalition anglo-impériale : l'armée royale résiste difficilement aux troupes dirigées par Charles Quint, qui dévaste la Champagne durant l'été 1544. Les deux adversaires, à bout de forces et d'argent, lassés par une guerre perpétuelle au cours de laquelle aucune victoire n'a pu être décisive, signent une nouvelle paix à Crépy, le 18 septembre. Deux ans plus tard, une paix séparée avec Henri VIII permet au roi de racheter Boulogne aux Anglais.
À l'issue de trente ans de guerres continuelles, quand François Ier meurt le 31 mars 1547, il laisse un royaume dont les frontières sont à peu près inchangées, si l'on excepte la conquête occasionnelle du duché de Savoie. Mais, hormis la paix avec les Suisses et les bonnes relations avec le Sultan, la situation diplomatique d'une France qui manque cruellement d'alliés sûrs et puissants face à la maison de Habsbourg est bien problématique. Au-delà des mésaventures guerrières et des multiples images de ce roi aimant les femmes, la chasse et la joyeuse vie, des lois nouvelles ont, par touches et par moments, renforcé la centralisation de l'administration royale et l'autorité du souverain, même si l'on n'est pas fondé à parler d'un véritable programme en ce sens. Le monarque ne maîtrise pas encore complètement les grands du royaume, les tendances centrifuges d'une réforme naissante et réprimée ou les velléités parlementaires d'indépendance, même si, en définitive, il a pu compter sur le soutien des parlements et, surtout, des villes dans les moments difficiles de son règne. L'absolutisme de François Ier reste, à cet égard, selon le mot de Knecht, un absolutisme « limité ».