appellation, datant du XIXe siècle, qui désigne, sous la Révolution, un groupe, mal défini, de révolutionnaires jacobins.
Ce groupe accède un moment au pouvoir, avant d'être opposé aux montagnards, qui en emprisonnent ou en font exécuter les membres. C'est Lamartine qui, dans sa célèbre Histoire des Girondins, popularise, à la veille de la révolution de 1848, l'idée que des hommes ont incarné une révolution modérée, idéaliste, au point d'en être les victimes consentantes. Il n'imagine pas alors qu'en rassemblant différents courants sous une dénomination vague, empruntée aux années de la Révolution, il crée un de ces objets allégoriques dont l'historiographie consacrée à la Révolution française sera friande.
Une dénomination tardive.
• On cherche pourtant en vain des « girondins » dans les débats du XVIIIe siècle. Les patriotes, puis les jacobins, hostiles aux contre-révolutionnaires et aux feuillants, se classent en montagnards, en représentants de la Plaine ou du Marais, et en buzotins, brissotins ou rolandistes. Ces trois derniers groupes (ceux que l'on qualifiera de « girondins »), coteries formées autour d'un homme - ou d'une femme tenant salon -, sont une nébuleuse plutôt qu'un parti. Ils contrôlent la Convention entre 1792 et le début de 1794 grâce à l'habileté et au prestige de leurs meneurs et grâce à des alliances avec les députés qui craignent les sans-culottes, suspectés de vouloir « l'anarchie ». Cette nébuleuse n'a pas d'unité, même au plus fort des luttes politiques : lorsque les montagnards (aidés des sans-culottes) s'emparent du pouvoir les 31 mai et 2 juin 1793 et emprisonnent 22 députés ; lorsqu'ils traquent, ensuite, leurs opposants, baptisés « fédéralistes » ; lorsqu'ils font exécuter 46 députés, dénommés « factieux », en octobre 1793. Il a fallu la relecture des événements par les historiens du XIXe siècle pour donner une cohérence à ce courant proscrit, en dressant face à la Montagne un autre bloc, la Gironde.
Une réalité, pourtant.
• Sans entrer dans les fausses querelles, il est néanmoins possible de repérer une sensibilité révolutionnaire, opposée à la Contre-Révolution et à la monarchie autant qu'aux exigences politiques et sociales des sans-culottes, et qui veut établir un régime favorisant les « classes mitoyennes » patriotes et soucieuses de la liberté économique. Ce courant, qui se distingue par une sociabilité de salons intellectuels et mondains, est animé par des personnalités plus ou moins rivales (Brissot, Vergniaud, Guadet, Roland...). Il promeut l'essor révolutionnaire en essayant de limiter les excès et les violences populaires jusqu'en 1792. Mais il cumule les contradictions : en lançant la France dans la guerre en avril 1792, il donne le beau rôle aux plus ambitieux de ses membres - qui accentuent les divergences internes - et aux volontaires, dont il ne sait pas canaliser l'élan patriotique populaire, qui charrie les massacres de septembre 1792.
Les girondins (adoptons le terme, même s'il est alors anachronique) font preuve d'indécision quant au sort à réserver au roi Louis XVI déchu. Cette attitude, mais aussi leurs attaques inabouties contre les révolutionnaires extrémistes - tels Marat ou Hébert - et, enfin, les discours enflammés de Vergniaud contre Paris, dénoncé comme un repaire d'« anarchistes », et l'appel aux « départements » supposés « sains » permettent aux montagnards de les présenter, au cours du printemps 1793, comme des modérés suspects, puis comme des contre-révolutionnaires masqués, qu'il convient d'éradiquer (lors de l'insurrection des 31 mai et 2 juin notamment).