Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

états généraux de 1789,

assemblée représentative réunie le 5 mai 1789, dont la conversion en Assemblée nationale constituante marque le début de la Révolution. Dans un contexte de grave crise financière, après l'échec de l'Assemblée des notables et la résistance des parlements à toute réforme fiscale, la convocation des états généraux est imposée, en août 1788, à Louis XVI par un véritable front anti-absolutiste, formé de bourgeois et de privilégiés. Toutefois, cette unité ne résiste pas longtemps : une polémique s'engage à propos de l'organisation de cette assemblée. En effet, la bourgeoisie demande le doublement de la représentation du tiers état et, surtout, le vote par tête - et non par ordre. Même si, en décembre 1788, sous la pression de Necker, qui espère faire accepter les réformes refusées par les privilégiés, le Conseil du roi concède le doublement du Tiers, la modalité du vote est laissée en suspens. Cette question domine la campagne électorale, marquée par la rédaction des cahiers de doléances, et menée, dans les premiers mois de 1789, par le parti patriote, ou national.

1 139 députés sont élus : 291 pour le clergé, 270 pour la noblesse, 578 pour le tiers état. Dès la séance d'ouverture du 5 mai 1789, les discours du roi, du garde des Sceaux et du ministre des Finances, qui n'abordent pas la question du vote, déçoivent les représentants du Tiers. Ceux-ci exigent alors que la vérification des pouvoirs des élus se déroule en commun, et non par chambres séparées ; ils adoptent, à l'exemple de l'Angleterre, le nom d'« Assemblée des communes », espérant ainsi attirer les libéraux des deux autres ordres. Après avoir longtemps bloqué les états généraux par cette querelle de procédure, le tiers état passe à l'offensive, le 10 juin, en invitant les autres groupes à se joindre à lui, et en commençant seul, le 12, la vérification des pouvoirs de tous les députés. Bientôt rejointe par quelques membres du bas clergé, la chambre du Tiers prend, le 17 juin, le nom d'« Assemblée nationale ». L'assemblée consultative d'Ancien Régime se transforme donc en une véritable Chambre législative. Le 19 juin, la majorité du clergé décide de siéger avec le tiers état, tandis que la noblesse en appelle au roi. Mais les différentes manœuvres de Louis XVI pour tenter de briser l'élan du Tiers et de casser ses décisions échouent. Le 20, à la fermeture de la salle de ses réunions, la nouvelle assemblée répond par le serment du Jeu de paume. Quant à la séance royale du 23 juin, au cours de laquelle Louis XVI fait quelques concessions, mais ordonne aux ordres de se séparer, elle se termine sur la fameuse formule - réelle ou forgée a posteriori - de Mirabeau : « Nous ne quitterons nos places que par la force des baïonnettes. » Le 27, ne disposant pas d'une force armée suffisante pour disperser l'Assemblée, que 47 députés de la noblesse ont ralliée le 25, Louis XVI capitule, et il invite tous les députés à se joindre à l'Assemblée nationale. Celle-ci se proclame « Constituante » le 9 juillet.

États latins d'Orient,

États fondés au Levant lors de la première croisade (1095-1099), puis à Chypre lors de la troisième croisade (1188-1192).

Les États latins d'Orient sont issus de la volonté des chefs de la première croisade, presque tous originaires de France, de fonder de véritables principautés, sans tenir compte des réclamations formulées par l'empereur d'Orient au sujet de terres autrefois byzantines. La progression des croisés aux dépens des Arabes s'accompagne ainsi, de manière assez désordonnée, de la fondation de plusieurs États où s'enracinent bientôt de véritables dynasties : le comté d'Édesse (1097), aux mains de la maison de Boulogne puis de Parthenay, la principauté d'Antioche (1098), contrôlée par les Normands d'Italie du Sud, le royaume de Jérusalem (1099), dévolu à la maison de Boulogne et de Lorraine, et le comté de Tripoli (1102), placé sous le pouvoir de la maison de Toulouse. Godefroi de Bouillon, qui prend le titre d'« avoué du Saint-Sépulcre », puis ses successeurs, les rois de Jérusalem, parviennent à imposer leur suzeraineté sur le comté de Tripoli au cours du XIIe siècle, et peut-être aussi sur les deux autres États syriens (Édesse et Antioche). Enfin, en 1191, Chypre est conquise sur l'Empire byzantin par Richard Cœur de Lion : en 1192, l'île est confiée à la maison de Lusignan et devient un royaume.

Aux XIIe et XIIIe siècles, les États latins d'Orient constituent des principautés ainsi que des sociétés originales. Les croisés construisent de nombreuses forteresses et instituent un système féodal rigoureux, imposé par les exigences de la guerre et par la puissance des barons. Des colons latins, c'est-à-dire des Occidentaux, viennent s'installer, surtout dans le royaume de Jérusalem, à l'exception des Normands et des Provençaux, qui préfèrent la principauté d'Antioche ou le comté de Tripoli. Les Latins demeurent toutefois partout minoritaires dans les populations. Une hiérarchie ecclésiastique latine est instituée et de nombreux monastères s'implantent à proximité des lieux saints. Des ordres militaires - les Templiers et les Hospitaliers, notamment - sont fondés, et voient leur rôle s'accroître dans la défense des États latins et dans les transferts monétaires et commerciaux avec l'Occident, où ils disposent rapidement de vastes réseaux de commanderies. Les échanges entre l'Orient et l'Occident sont d'ailleurs à l'origine d'une réelle prospérité économique des États latins d'Orient, prospérité amplement favorisée par les importantes communautés marchandes italiennes (pisane, gênoise et vénitienne) qui s'établissent dans les ports. Cependant, dès le milieu du XIIe siècle, la pression arabe contraint les États latins d'Orient à la défensive : Édesse tombe dès 1144, et les victoires du sultan d'Égypte et de Syrie Saladin en 1187-1190 repoussent les Latins sur la côte. Plusieurs croisades et surtout le rôle accru des ordres militaires permettent un certain redressement dans la première moitié du XIIIe siècle, mais les années 1263-1291 sont celles du reflux. La chute de Saint-Jean d'Acre en 1291 marque la fin des États latins d'Orient, à l'exception de Chypre, qui conserve son indépendance jusqu'en 1426 et demeure sous l'autorité de la dynastie des Lusignan jusqu'en 1489.