Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
U

ultraroyalistes,

terme qui désigne, à partir de janvier 1815, les hommes qui veulent une restauration complète de l'Ancien Régime.

Les « ultras » sont donc plus royalistes que le roi (Louis XVIII) : ils rejettent l'héritage de la Révolution et sont hostiles à la Charte constitutionnelle (1814) qui confirme la disparition de la société d'ordres. Appartenant surtout à la noblesse provinciale et au monde des propriétaires fonciers, mais parfois aussi aux couches moyennes et populaires, ils sont résolument tournés vers le passé. Ils n'en conquièrent pas moins une forte majorité aux élections d'août 1815, et forment alors la « Chambre introuvable ». Ils sont aussi la première force politique à esquisser une structuration préfigurant celle des partis politiques modernes : en effet, s'ils s'appuient sur l'organisation des sociétés secrètes de la Congrégation et des Chevaliers de la foi, s'ils disposent d'une audience dans de célèbres salons parisiens, comme la « réunion Piet », ils n'en utilisent pas moins le soutien de journaux qui leur sont acquis, tels la Gazette de France, la Quotidienne ou le Drapeau Blanc, et adoptent une discipline de vote par des concertations précédant les scrutins. Après la dissolution de la « Chambre introuvable » (5 septembre 1816), ils sont rejetés dans l'opposition, mais gagnent de nouveau les élections en 1824. Cependant, la politique de Villèle n'est pas alors à la hauteur de leurs ambitions. Même la loi d'indemnisation des émigrés - la loi dite « du milliard » (avril 1825) - les déçoit car elle entérine la vente des biens nationaux. Confronté à la défection de Chateaubriand, à l'opposition des « pointus » (ultras extrémistes) et à la division entre gallicans et ultramontains, Villèle n'a guère appliqué, du programme de sa majorité initiale, que le principe de « l'union du trône et de l'autel ». De plus, 1830 marque l'échec de l'ultraroyalisme, qui devient une force d'opposition, sous le nom de « légitimisme ».

Unigenitus (bulle),

constitution promulguée par le pape Clément XI le 8 septembre 1713, à la demande de Louis XIV.

La bulle Unigenitus Dei Filius condamne les « Cent Une Propositions » extraites du livre du Père Pasquier Quesnel intitulé Nouveau Testament en français avec des réflexions morales sur chaque verset (1692), ouvrage qui était devenu pour les jansénistes une œuvre de référence, au même titre que l'Augustinus de Jansénius (1640). Ces fameuses « Cent Une Propositions » sont consacrées principalement aux problèmes théologiques de la grâce et du libre arbitre, qui tiennent une place essentielle dans les controverses entre jésuites et jansénistes. Tout - de la destruction de l'abbaye de Port-Royal sur ordre de Louis XIV (1711) à la présence de nombreux jésuites dans l'entourage du Roi-Soleil - laissait penser que cette décision papale ne susciterait aucune opposition. Pourtant, dès 1713, quelques prélats (parmi lesquels le cardinal de Noailles, archevêque de Paris) et des parlementaires gagnés par le jansénisme refusent - au nom du gallicanisme - de recevoir la bulle papale, qui n'est toujours pas enregistrée par le parlement lorsque Louis XIV meurt (1715). La période instable de la Régence n'est guère plus propice à l'obtention de l'enregistrement parlementaire : en 1717, quatre évêques, suivis par 3 000 ecclésiastiques, demandent la réunion d'un concile général. Finalement, en 1730, Louis XV décide l'enregistrement forcé de la bulle, qui devient une loi du royaume. Néanmoins, les conflits religieux et politiques suscités par la condamnation papale du jansénisme se prolongent durant la majeure partie du XVIIIe siècle.

Union française,

sous la IVe République (1946-1958), dénomination constitutionnelle de l'ensemble formé par la République française (métropole, départements et territoires d'outre-mer) et les États et territoires associés.

La nécessité de doter l'empire colonial d'un statut organique apparaît dès la conférence de Brazzaville (1944). Après la Libération, les deux Assemblées constituantes successives adoptent le terme d'« Union française » pour le substituer à celui d'« empire », employé jusqu'alors mais qui n'a jamais eu de réalité constitutionnelle. La première Assemblée, élue en octobre 1945, inscrit dans son projet de Constitution diverses dispositions concernant les anciennes colonies, des mesures inspirées par les principes de décentralisation et de libre appartenance. Ce projet ayant été repoussé par le référendum du 5 mai 1946, il revient à la seconde Assemblée, élue en juin 1946, d'élaborer la nouvelle Constitution, adoptée en octobre.

Les principes d'organisation de l'Union française y sont définis par le titre VIII (articles 60 à 82). Les institutions communes sont au nombre de trois : le président, charge dévolue au président de la République française, représente les « intérêts permanents » de l'Union et préside le Haut Conseil ; ce dernier, organe de coordination aux attributions imprécises, « est composé, par moitié, de membres représentant la France métropolitaine et, par moitié, de membres représentant les départements et territoires d'outre-mer et les États associés » ; enfin, l'Assemblée de l'Union française, institution consultative siégeant à Versailles, comprend quelque 230 délégués (125 pour la métropole, 75 pour les DOM-TOM et environ 30 pour les États associés).

On distingue cinq catégories différentes parmi les territoires membres de l'Union : les départements d'outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion) ; les territoires d'outre-mer (A-OF, A-ÉF, Madagascar, Comores, Côte des Somalis, Inde française, Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Saint-Pierre-et-Miquelon) ; l'Algérie, qui est alors un groupe de départements doté d'un statut particulier (en fait, très mal défini) ; les territoires associés (Cameroun et Togo, anciens « territoires sous mandat », devenus « territoires sous tutelle » des Nations unies) ; enfin, les États associés (Viêt-nam, Cambodge, Laos). Contrairement à ce qui a parfois été prétendu, les protectorats du Maroc et de Tunisie n'ont jamais fait partie de l'Union française, même s'il a été un moment question de leur donner le statut d'État associé.