Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

épuration, (suite)

Enjeux et controverses.

• Guerre franco-française, l'épuration a suscité de nombreuses polémiques. Ses mécanismes et son ampleur étant à présent mieux connus, certaines conclusions s'imposent. La frontière entre l'épuration sauvage et l'épuration légale n'est pas toujours franche : les juges sont souvent les mêmes, le degré de légalité de certaines juridictions militaires reste mal établi, et les officiants de l'épuration légale ont souvent ajusté leur attitude en fonction de la faiblesse ou, au contraire, de la sévérité de l'épuration sauvage dans une région ou un secteur. En comparaison avec les autres pays d'Europe occupés, la France a davantage recouru à l'exécution, mais moins à la prison ; elle est la seule nation occidentale, avec l'Italie, a avoir connu une épuration extrajudiciaire, dont le nombre des victimes reste néanmoins nettement inférieur à celui des pays déchirés par une véritable guerre civile. Si l'épuration a bien été un « phénomène social majeur » (Henry Rousso), elle n'en a pas moins été inégale dans le temps - la durée profitant aux accusés -, selon les régions ou les conditions sociales et les professions - les ouvriers et les paysans ayant été plus sévèrement condamnés que les classes moyennes et les élites. Surtout, la participation française à la « solution finale » n'a pas été sanctionnée en tant que telle à la Libération : cet « oubli » n'a été réparé qu'en 1979, lors de la première inculpation pour crimes contre l'humanité d'un haut fonctionnaire de Vichy, Jean Leguay, suivie ensuite par celles de René Bousquet et de Maurice Papon.

Erfurt (entrevue d'),

rencontre entre Napoléon Ier et le tsar Alexandre Ier (27 septembre - 14 octobre 1808), destinée à renforcer l'alliance conclue à Tilsit l'année précédente.

Quelque temps avant la rencontre, Napoléon écrit à Talleyrand : « Nous allons à Erfurt, et je veux en revenir libre de faire en Espagne ce que je voudrai ; je veux être sûr que l'Autriche sera inquiète et contenue [...]. » Manifestement, l'Empereur tient à voir les négociations s'inscrire dans un contexte de faste - il convoque donc à cette entrevue les princes allemands, qui sont ses alliés ou ses vassaux - et de prestige culturel : aux représentations données par la Comédie-Française s'ajoutent les remises de décorations aux écrivains allemands Goethe et Wieland. Mais la pompe déployée ne peut masquer l'ébranlement de l'alliance franco-russe et l'échec de la diplomatie impériale. Pressé par Napoléon de tenir l'Autriche en respect, Alexandre Ier se dérobe, et n'accepte de soutenir la France que dans l'éventualité où l'Autriche lui déclarerait la guerre. Le rôle ambigu joué par Talleyrand au cours de la rencontre - certains historiens parlent de « trahison » - explique partiellement cette dérobade : informé des difficultés de Napoléon en Espagne et du mécontentement croissant de l'opinion française, Alexandre Ier préfère refuser tout engagement trop net. Une convention secrète ne lui assure pas moins la Finlande, ainsi que les provinces roumaines de Moldavie et de Valachie. Avec l'entrevue d'Erfurt s'estompe la perspective, esquissée à Tilsit, d'un partage de l'Europe entre les deux grands de l'époque.

Espagne (guerre d'),

campagne militaire engagée par Napoléon pour imposer son frère Joseph sur le trône d'Espagne (1807-1814).

 Pour la France napoléonienne, l'Espagne est une alliée de longue date. Mais, depuis 1801, elle n'est pas d'une grande utilité dans la lutte contre l'Angleterre. L'Empereur souhaite donc placer sur le trône madrilène un monarque tout dévoué à sa politique. En octobre 1807, le très impopulaire ministre de Charles IV, Godoy, désireux de retrouver à la fois la faveur de l'opinion publique et la confiance de Napoléon, conclut avec l'Empereur le traité de Fontainebleau, qui prévoit la conquête et le partage du Portugal. Le 30 novembre, Junot entre dans Lisbonne, tandis que d'autres troupes françaises stationnent en Espagne. En mars 1808, l'infant Ferdinand VII contraint son père à abdiquer : c'est la conjuration d'Aranjuez. À la surprise des Espagnols, Napoléon ne reconnaît pas Ferdinand et confisque la couronne d'Espagne au profit de son frère Joseph. Mais, dès le 2 mai, les Madrilènes, contrôlés par une partie de la noblesse et du clergé, se sont révoltés contre les soldats français. Murat conduit une cruelle répression, dont témoigne l'œuvre de Goya (Désastres de la guerre). Les rebelles espagnols forment à Séville un gouvernement provisoire, la Junte centrale. C'est le début de la guerre d'indépendance. Les Français envahissent la péninsule, mais subissent de nombreux revers, dus à la résistance espagnole et à l'intervention d'un corps expéditionnaire anglais débarqué au Portugal. Comprenant qu'il a sous-estimé la difficulté, l'Empereur intervient personnellement à l'automne 1808. Après quelques victoires, il doit regagner Paris dès janvier 1809 pour contrer les intrigues de Talleyrand et de Fouché, et faire face à la menace autrichienne.

Jusqu'en 1810, les Français conservent l'initiative des combats. Mais les meilleures troupes s'épuisent et subissent de lourdes pertes face à la « petite guerre », ou guerilla ; l'autorité de Joseph reste limitée à la région de Madrid, et la coordination entre généraux est inexistante en l'absence de l'Empereur. En 1811, Wellington prend l'initiative : l'année suivante, les troupes anglo-portugaises s'emparent de Madrid ; la déroute de Joseph à Vitoria, le 21 juin 1813, marque l'achèvement de la libération de l'Espagne. Par le traité de Valençay (11 décembre 1813), Napoléon rétablit sur le trône Ferdinand VII, qui impose un régime réactionnaire.

La guerre d'Espagne a été une catastrophe pour la France. Outre d'importantes pertes humaines, elle constitue une erreur politique dont Napoléon lui-même reconnaîtra que « cette malheureuse guerre d'Espagne a été la cause première de tous les malheurs de la France ».

Estienne (famille),

famille d'imprimeurs actifs à Paris, puis à Genève, à partir du début du XVIe siècle et durant une grande partie du XVIIe siècle. Leur marque typographique la plus fréquente représente un olivier.