France (territoire de la).
Royaume franc dès 511, Francia occidentalis en 843 (à partir de la signature du traité de Verdun), la France s'est édifiée progressivement ; son territoire s'est consolidé sous la dynastie capétienne, bien que ses frontières orientales aient fluctué encore aux XIXe et XXe siècles.
Le cadre schématique d'un hexagone dans lequel elle s'inscrit ne saurait traduire la complexité des particularismes géographiques, économiques ou culturels des anciennes provinces ou des régions actuelles, des pays ou des terroirs. L'unité politique a menacé souvent cette France plurielle, sans pour autant la faire disparaître. Les nouveaux pouvoirs accordés aux communautés locales et régionales tendent a garantir, aujourd'hui, l'expression d'appartenances multiples au territoire français.
Une lente reconnaissance du territoire français
Des territoires gallo-francs.
• Épargné par les grandes avancées glaciaires du quaternaire, à l'exception de ses massifs montagneux, l'espace qui constitue aujourd'hui la France s'est trouvé constamment peuplé durant le paléolithique, depuis un million d'années au moins. Au néolithique, la maîtrise de l'élevage et des cultures accroît les densités de peuplement.
La France s'agence au fil du temps à partir de la Gaule et du monde celtique conquis par César, entre Rhin et Pyrénées. S'agrégeant à cette première identité romaine s'épanouissent, dès le Ve siècle, les Gallo-Francs, mélange de Barbares germains et de Gallo-Romains.
Aucune homogénéité ethnique n'existe avant la conquête romaine. La Gaule se caractérise alors par la forte proportion de populations celtes, probablement parvenues sur son territoire au début de l'âge du bronze. Vers 400 avant J.-C., les Celtes atteignent la colonie grecque de Massilia (Marseille). Ils se mêlent aux Ibères en franchissant les Pyrénées. À leur apogée (Ier siècle avant J.-C.), ils sont organisés en un grand nombre de tribus associées de manière variable sur l'ensemble du territoire de la Gaule. Celle-ci est alors divisée en groupes qui se défont et se reforment sans cesse : les Éduens occupent les actuels Morvan et Bourgogne, puis, plus tard, Lutèce ; les Arvernes dominent l'actuelle Auvergne, tandis que les Atrébates donnent naissance à l'Artois, et les Pictons, au Poitou... Déjà, cependant, les places fortes (oppidums), les ports et les marchés signalent l'emplacement des futures grandes villes. Certaines cités, telles Lyon, fondée par les Romains, ou Sens, deviennent des évêchés au Bas-Empire. La Gaule est organisée et relativement prospère grâce à une population estimée à quelque 15 millions d'habitants. Peut-on néanmoins parler d'une unité gauloise ? Les peuples gaulois sont reliés entre eux par un bon réseau routier, bien entretenu, et se réunissent une fois par an à l'occasion de la grande assemblée des druides sur le territoire des Carnutes (coude de la Loire), considéré comme le centre de toute la Gaule. En outre, on pense que la langue gauloise était comprise sur tout le territoire. Cependant, César distinguait Gaulois, Belges et Aquitains « par la langue, les institutions et les lois ».
La mainmise de Rome se manifeste dès 121 avant J.-C., avec la délimitation de la première province romaine dans le sud de la Gaule. La cité de Narbonne contrôle le territoire conquis de l'actuelle Provence et la plaine du Languedoc, la vallée du Rhône jusqu'à la confluence de la Saône et le rivage méridional du lac Léman, à l'ouest les hauts plateaux du Vivarais, la crête des Cévennes ainsi que la région toulousaine au-delà du seuil du Lauragais. L'ancienne Gaule est partagée en trois territoires, dont les limites ne correspondent que d'assez loin aux divisions ethniques plusieurs fois citées par César : au nord de la Seine, la Belgique, au sud-ouest l'Aquitaine étendue aux régions du sud de la Loire, entre les deux la Celtique (ou Lyonnaise), située entre Seine et Loire.
Après la conquête romaine, les cités gauloises sont maintenues et enrichies de nouveaux quartiers ; quelques villes d'eaux et de cure sont créées (Aix-en-Provence, Aix-les-Bains...). Les villes les plus favorables au commerce (Chalon-sur-Saône, Orléans, Tours, Bordeaux...) prennent rapidement de l'importance. De nouvelles cultures sont introduites par les Romains : vigne, arbres fruitiers méditerranéens, mais aussi cerisiers et pêchers venus d'Orient. Le latin progresse tandis que le gaulois disparaît progressivement entre le Ier et le Ve siècle.
Grandes Invasions et remaniements territoriaux.
• La première pénétration en masse, au milieu du IIIe siècle, est celle des peuples germaniques, auxquels succéderont, aux IXe et Xe siècles, des populations d'origine scandinave et, dans une moindre mesure, hongroise. Du VIIIe au XIe siècle, les provinces méridionales subissent la poussée musulmane. Ces époques troublées sont décisives pour la formation de la France, dont le nom apparaît alors. Le territoire de la Gaule est réorganisé, fortement marqué par l'opposition Nord-Sud, encore caractéristique de l'espace français actuel. À partir du Ve siècle, les Francs, qui occupaient les rives du Rhin, déplacent le centre de gravité politique vers le nord de la Gaule, dans les plaines du Bassin parisien. Le royaume mérovingien et les royaumes issus des partages entre différents héritiers ont tous établi leurs capitales dans des villes du nord. De la période précédente, seule l'Aquitaine conserve la circonscription héritée des Romains. Au début du VIe siècle, le royaume burgonde est envahi et partagé par les Francs, mais son nom persiste, Burgundia. Quant aux Bretons et aux Normands, ils forgent des individualités régionales durables. Les premiers, venus de Grande-Bretagne, atteignent le Cotentin, le Maine et l'Anjou (fin IXe -début Xe siècle), s'avançant bien au-delà des frontières politiques de la Bretagne actuelle. L'emprise territoriale normande s'établit de manière analogue, plus au nord : au Xe siècle, les Vikings s'installent du Cotentin au pays de Caux. Alors que les Francs s'implantent durablement, Saxons et musulmans ne prennent pas définitivement possession des terres qu'ils conquièrent. Dès la fin du IIIe siècle, les Saxons étaient signalés en différents points de la Gaule occidentale, dans le Boulonnais, le Cotentin, la région de la Charente et de l'embouchure de la Loire. Les musulmans, eux, se succèdent dans le Midi, occupant la Septimanie wisigothique, et particulièrement Narbonne, jusqu'en 759. Leurs raids militaires se déploient dans le sud-ouest, jusqu'à Poitiers (732), et vers l'est, jusqu'à la vallée du Rhône (Lyon, 735-737). Leurs établissements les plus durables sont ceux de la Camargue (seconde moitié du IXe siècle) et du massif des Maures (de 880 à 972).