biens communaux, (suite)
Formés généralement de bois en taillis, de pâtures, de landes et de friches, les biens communaux participent au bon équilibre de l'économie paysanne et procurent des ressources complémentaires, en particulier aux plus pauvres. Ils fournissent du bois de chauffage ou d'œuvre, permettent le pâturage en dehors des temps de vaine pâture et offrent un appoint alimentaire (châtaignes, champignons).
À partir du XVIe siècle, ils sont l'objet d'une double convoitise : de la part des « coqs de village », qui se dressent contre les paysans pauvres (l'« individualisme agraire »), et des seigneurs, qui luttent contre les communautés paysannes (la « réaction féodale »). Les assemblées d'habitants gèrent les communaux et en réglementent l'usage. Elles peuvent aussi les affermer, les aliéner, voire les hypothéquer. Or, du milieu du XVIe siècle jusqu'en 1659, temps de conflits, les communautés s'endettent et doivent aliéner leurs biens, de gré ou de force. Vers 1650, un officier royal du bailliage d'Étampes dénonce le noble campagnard qui « usurpe les communes ». Malgré l'édit d'avril 1667, les biens « détournés » ne sont pas restitués, et l'édit de novembre 1677 consacre cette spoliation - « le plus grand événement agraire sous l'Ancien Régime », selon l'historien ruraliste Pierre de Saint-Jacob.
Au XVIIIe siècle, le problème des usurpations est réglé grâce à la protection des intendants. Mais les seigneurs, comme « premiers habitants » de la communauté et au nom de leur droit éminent sur leur territoire, avancent devant les cours souveraines l'« imprescriptibilité » de leur droit de triage. Ils réussissent parfois à récupérer le tiers des communaux, présumé seigneurial. En outre, au tournant du siècle, apparaît chez les physiocrates l'idée que les communaux constituent un frein au progrès de l'agriculture. L'édit de 1774 autorise leur partage. Mais les parlements, défenseurs de la tradition, retardent l'enregistrement de la loi (en Bourgogne, jusqu'en 1782), qui est donc peu appliquée. Enfin, la Révolution est d'abord favorable aux thèses des physiocrates : si le décret du 14 août 1792 prévoit le partage obligatoire, la loi du 10 juin 1793 le rend facultatif. Et dès prairial an IV, le Directoire l'ajourne. L'idée du partage définitif n'est toutefois abandonnée qu'en 1816.