écrivain et théoricien politique (Martigues, Bouches-du-Rhône, 1868 - Saint-Symphorien, près de Tours, 1952).
Issu d'une famille de la petite bourgeoisie, il accomplit ses études secondaires au collège diocésain d'Aix-en-Provence, où il se lie d'amitié avec Henri Bremond. Ayant perdu l'ouïe à l'âge de 13 ans, il affronte avec douleur le problème du mal et se détache peu à peu de la foi catholique. Bachelier à 17 ans, il monte à Paris pour suivre des études supérieures, mais s'oriente rapidement vers une carrière de journaliste et de critique littéraire. Les Annales de philosophie chrétienne, l'Observateur français, la Revue encyclopédique Larousse, accueillent ses articles. La précocité de son talent, le ton vif de ses écrits, éveillent l'attention de ses aînés, tel Taine.
Un nationalisme exclusif et un catholicisme politique.
• Maurras forge ses idées et ses conceptions politiques dans le contexte de la vague nationaliste issue du boulangisme, reprenant et développant des thèmes alors récurrents - antisémitisme, antiprotestantisme, antimaçonnisme, vive conscience de la décadence. Fervent disciple de Mistral, il adhère au groupe parisien du félibrige, s'opposant ainsi à un jacobinisme qui prétend cantonner la Provence à un pur « rôle de mécanique administrative ». Cette prise de position annonce sa ligne politique ultérieure : la primauté de la lutte pour la restauration d'un État fort, qui préserve l'autonomie des provinces, réintègre le monde ouvrier délaissé par le vieux parti républicain, et renforce l'identité française. En effet, Maurras estime celle-ci menacée par les juifs, les métèques, les protestants et les francs-maçons, auxquels la République, selon lui, ouvre très largement ses portes. Son nationalisme n'est pas seulement exclusif : il substitue au christianisme une autre religion, celle de la déesse « France », dont le catholicisme constitue l'armature historique. Son Enquête sur la monarchie (1900-1909) conclut, après le choc de l'affaire Dreyfus, à l'urgence de rétablir « la monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée ». La formule définit la cohérence du système. En rejetant le parlementarisme, le « pays réel », enraciné dans un riche réseau d'organisations locales et professionnelles, retrouvera sa voie. Telle est la « politique naturelle » qui redonnera à la patrie « une tête libre et un corps vigoureux ». La monarchie rêvée n'est plus celle de l'Ancien Régime. Autant de convictions que Maurras exprime régulièrement dans les colonnes de l'Action française, devenue un quotidien en 1908.