fructidor an V (coup d'État du 18), (suite)
La Constitution de l'an III n'ayant pas prévu d'arbitrage entre les pouvoirs législatif et exécutif en cas de conflit, la République connaît des difficultés dès les premières élections partielles d'avril 1797, remportées par les royalistes. Le 20 mai, le général Pichegru est élu à la présidence du Conseil des Cinq-Cents, et Barbé-Marbois, à celle du Conseil des Anciens. Ce sont deux royalistes, tout comme Barthélémy, élu au Directoire, qui ne compte plus alors que trois directeurs républicains sur cinq - les triumvirs Reubell, La Revellière-Lépeaux et Barras -, Carnot s'étant rapproché de la droite. Cependant, si les Conseils prennent d'emblée des mesures en faveur des émigrés et des prêtres réfractaires, le bloc monarchiste est divisé entre « jacobins blancs » absolutistes, d'une part, et clichyens modérés, d'autre part, les uns étant partisans du coup de force contre le Directoire, les autres préférant attendre les élections suivantes pour obtenir une majorité absolue.
En juin, Bonaparte, qui a arrêté le comte d'Antraigues en Italie, fournit à Barras les preuves de la trahison de Pichegru, qui est en contact avec Louis XVIII, et de la volonté des députés royalistes de renverser le Directoire. Les triumvirs passent alors à l'offensive en s'assurant l'appui de l'armée, avec les généraux Hoche, dont les troupes s'approchent de Paris en juillet, et Bonaparte, qui leur dépêche le général Augereau, nommé commandant de la division militaire de Paris en août. Les clichyens décident trop tard de mettre en accusation les triumvirs : dans la nuit du 17 au 18 fructidor, sur ordre du Directoire, les soldats arrêtent députés et principaux chefs royalistes (Carnot parvient à s'échapper). Le lendemain, ce qu'il reste des Conseils vote une loi cassant les élections dans 49 départements, et condamnant à la déportation en Guyane - la « guillotine sèche » - une soixantaine de royalistes, dont seuls 18 sont arrêtés. En outre, les arrestations arbitraires et les destitutions dans l'administration et dans l'armée se multiplient, tandis que 42 journaux sont supprimés. Le régime est provisoirement sauvé par le viol des urnes et par l'appui de l'armée, mais les progrès de l'opposition jacobine, grande bénéficiaire de l'épuration, contraindront à nouveau le Directoire à recourir au coup d'État, le 22 floréal an VI (11 mai 1798).