Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
S

Scarlatti (Giuseppe)

Compositeur italien (Naples v. 1718 ou 1723 – Vienne 1777).

Probablement neveu d'Alessandro et cousin de Domenico, il partagea sa carrière entre l'Italie (Rome, Florence, Lucques) et Vienne, rendit sans doute visite à Domenico en Espagne vers 1752 et composa au moins 32 opéras.

Scelsi (Giacinto)

Compositeur italien (La Spezia 1905 – Rome 1988).

Il étudia avec Respighi et Casella, et obtint ses premiers succès à Paris, notamment avec la création par Pierre Monteux de Rotative pour orchestre (1931). Il voyagea ensuite au Proche-Orient et en Afrique, et étudia les techniques dodécaphoniques à Vienne avec Walter Klein (1935-36). En 1937, il organisa à Rome avec Petrassi une série de concerts de musique contemporaine, et, durant la guerre, résida en Suisse, où il collabora à la revue la Suisse contemporaine tout en écrivant de nombreux essais musicologiques. Il publia à Paris de la poésie en français (1949, 1954, 1962), et participa à Rome aux activités du groupe Nuova Consonanza. À partir de 1952, il s'est orienté comme compositeur vers des solutions radicales teintées parfois d'ésotérisme ou de mysticisme, et qui font que se reconnaissent en lui aussi bien un Ligeti ou un Feldman que des membres de la jeune génération actuelle. En témoignent notamment les Quattro Pezzi su une nota sola pour orchestre de vingt-six musiciens (1959), Hurqualia pour grand orchestre et instruments amplifiés (1960), O-ho-i pour seize cordes (1966), ses cinq Quatuors à cordes (de 1944 à 1985), ou Pranam pour voix, douze instruments et bande magnétique (1972).

scène

En matière de théâtre, subdivision facultative d'un acte selon le découpage déterminé par la logique de l'action. Le mot « scène », ou plutôt « scena » sous sa forme italienne, désigne également un grand monologue lyrique de caractère dramatique. Au pluriel, enfin, il a servi de titre à de nombreuses suites instrumentales ou orchestrales de caractère évocateur ou simplement descriptif, telles que les Scènes d'enfants de Schumann ou les Scènes alsaciennes de Massenet.

scène (musique de)

1. Dans un opéra, musique instrumentale exécutée non dans la fosse d'orchestre, mais sur scène (par des musiciens en costumes) ou en coulisses. Il s'agit parfois d'une petite formation de chambre, comme à l'acte II du Don Giovanni de Mozart, mais le plus souvent d'une fanfare comme dans les Huguenots, Lohengrin, le Faust de Gounod, Don Carlos, Aïda, etc.

2. Dans une œuvre théâtrale, toute musique destinée à accompagner l'action, à l'enrichir d'un divertissement (comédie-ballet ou tragédie-ballet à partir du XVIIe siècle) ou à contribuer à l'ambiance d'une scène.

   Ce genre a été couramment pratiqué jusqu'au début du XXe siècle, ainsi qu'en témoigne le fait que la Comédie-Française ou l'Odéon étaient pourvus d'une fosse d'orchestre. Et il a inspiré des chefs-d'œuvre dont quelques-uns des plus célèbres sont les musiques de scène de Beethoven pour Egmont de Goethe, de Mendelssohn pour le Songe d'une nuit d'été de Shakespeare, de Bizet pour l'Arlésienne d'Alphonse Daudet, de Richard Strauss pour le Bourgeois gentilhomme de Molière, de Grieg pour Peer Gynt d'Ibsen, de Sibelius pour Pelléas et Mélisande de Maeterlinck ou pour la Tempête de Shakespeare. De nos jours, les frais qu'entraîne la mobilisation d'un orchestre symphonique rendent cette forme de spectacle pratiquement irréalisable. La musique de scène subsiste toutefois, ramenée à des proportions plus modestes, avec la participation d'ensembles instrumentaux réduits qui sont généralement enregistrés sur bande.

scénographie lyrique

La fonction de metteur en scène n'existe officiellement, dans les théâtres lyriques, que depuis le début du XIXe siècle et le rôle de celui-ci a varié avec les époques. Aussi une partie de cet article (notamment celle qui concerne les XVIIe et XVIIIe siècles) traite-t-elle de ce que l'on appelle la scénographie (art du décor et des éclairages, machines, etc.). Dans une perspective historique, les termes de mise en scène et de scénographie se recoupent souvent, et il a paru plus logique de les réunir sous une seule rubrique.

De la naissance de l'opéra à la fin du XVIIe siècle

Quand, dans les toutes dernières années du XVIe siècle, les membres de la Camerata fiorentina « inventèrent » l'opéra, la « mise en scène " s'inspira, par la force des choses, des pratiques et des genres théâtraux du temps (notamment du ballet de cour et du théâtre des jésuites). Représenté à l'origine dans les palais des princes et des grandes familles ecclésiastiques (les Gonzague à Mantoue, les Barberini à Rome), souvent commandé au compositeur pour célébrer un événement, l'opéra ne pouvait être qu'un spectacle de grand luxe. Lorsqu'il devint accessible au public bourgeois (la première salle, le théâtre San Cassiano, s'ouvrit à Venise en 1637), il conserva sa scénographie fastueuse, avec de multiples changements de décors et des machines compliquées. En fait, le public du XVIIe siècle venait à l'opéra autant pour l'émerveillement de l'œil que pour le plaisir de l'oreille.

Les décors

Qu'ils représentassent un palais, un jardin ou un lieu sauvage, leur dessin suivit les règles de la perspective à point de fuite central et de la symétrie. Pour accentuer l'effet d'éloignement, on disposait parfois au dernier plan de petites figurines découpées. Ce parti pris présentait au moins un inconvénient : il interdisait aux chanteurs de « remonter », de quitter le devant de la scène, sous peine de détruire l'illusion optique. Latéralement, la scène était bordée par des telaris, prismes triangulaires dont chaque face supportait un élément de décor différent, et que l'on faisait pivoter tous ensemble pour obtenir un changement rapide, ou, plus souvent, par des coulisses plates, châssis mobiles garnis de toile peinte que l'on glissait et que l'on enlevait facilement (placées de biais par rapport à la rampe, ces coulisses permettaient d'obtenir un effet de mur fermé). Grâce aux coulisses et aux toiles de fond interchangeables, on pouvait réaliser, au cours du même spectacle, de multiples changements de décors (parfois à vue, ce dont le public était très friand). La décoration des premiers opéras intéressa des peintres comme le Bernin (décors du Sant'Alessio de Landi) et, en France, un décorateur comme Bérain. Un des maîtres de la scénographie au XVIIe siècle fut l'architecte italien Giacomo Torelli (1604-1678), renommé dans toute l'Europe, et que Mazarin fit venir à Paris en 1645. Torelli perfectionna le système des coulisses et sut jouer en virtuose de la verticalité de l'espace en faisant grand usage des trappes et des « gloires ».

Les machines

À la magnificence des décors, vint s'ajouter l'emploi d'une machinerie ingénieuse, qui, par poids, contrepoids, poulies, trappes et balançoires interposés, fit mouvoir les nuages, courir le char de Phaéton et s'écrouler le palais d'Armide. Une machine à peu près obligée fut la « gloire », véhicule préféré des dieux de l'Olympe pour descendre parmi les mortels. Les machines n'étaient pas apparues avec l'opéra : déjà, dans les mystères du Moyen Âge, on voyait voler des anges et une gueule de monstre cracher les flammes de l'Enfer. Pendant la Renaissance, Léonard de Vinci et Bruneleschi s'étaient intéressés à ces appareils, qui étaient abondamment utilisés dans le théâtre des jésuites et les ballets de cour. Cependant, ils devinrent un élément tellement primordial du spectacle d'opéra qu'on les construisait parfois avant même que l'ouvrage auquel ils étaient destinés fût composé. En France, où pourtant, sous l'influence de Lully, on en faisait un usage relativement modéré, les machines suscitèrent un débat d'intellectuels. Certains écrivains, tel SaintÉvremond, critiquaient la gratuité de leur emploi, tandis que La Bruyère estimait qu'« elles augmentent et embellissent la fiction ». En 1637, l'architecte italien Niccolo Sabbatini fit paraître une théorie des machines, Pratica di fabbrica, scene e machine de teatri, où sont dévoilés des procédés dont beaucoup sont encore en usage.