Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
C

Corée (suite)

Aérophones

Parmi les flûtes les plus fréquemment utilisées, on trouve le taegum (flûte traversière à six trous) et dans la même famille le chi ; parmi les flûtes droites, on emploie surtout le tanso, puis le yak et le chok. On trouve aussi une flûte de pan, le so, et un ocarina de terre, le hun. Pour les anches, l'instrument typique est le p'iri, sorte de hautbois de bambou, et ses dérivés, le tangp'iri et le hyangp'iri ; le t'aep'yongso, en bois, n'est utilisé que dans la musique rituelle bouddhique, de même que les rares types de trompette, le nap'al (longue trompette de métal) et le nagak (conque).

Cordophones

Les plus courants sont des cithares, le komun'go (six cordes) et le kayago ou kayakeum (douze cordes) surtout, l'ajaeng (sept cordes), le kum et le sul ; on trouve aussi un violon à deux cordes, le haegum.

Les formes musicales

On peut les classer en quatre sections : musique de cour, musique rituelle bouddhique, musique vocale élaborée et musique folklorique. Pour les deux derniers types, plus véritablement coréens et de vogue plus tardive, nous disposons d'informations assez récentes. Quant aux deux premiers, fortement influencés par les traditions chinoises, ils se sont appauvris et ce qui en subsiste est souvent assez éloigné des formes originales.

Musique de cour

Elle se divise en trois catégories. La première, ah-ahk, qui désignait auparavant toute musique rituelle d'origine chinoise, ne comprend maintenant que la musique des rites confucianistes selon la tradition chinoise (instruments, danses…), ce qui explique l'écriture heptatonique de la mélodie. La deuxième, tangak, désignait d'abord, comme son nom l'indique, la musique chinoise de la dynastie Tang, importée en Corée dès le VIIe siècle ; le terme s'est peu à peu étendu à toute forme de musique chinoise introduite à la cour coréenne depuis la dynastie Tang. Uniquement instrumentale maintenant, elle comporte des éléments typiquement chinois (échelles et rythmes), mais qui ont toutefois subi des transformations locales. La troisième catégorie, enfin, appelée hyangak, inclut toute la musique de cour d'origine coréenne ainsi que la musique chinoise antérieure à celle des Tang. Elle emploie des instruments indigènes, tels que les cithares komun'go et kayago et le tambour changgo. Une grande partie de cette musique de cour est perdue.

Musique rituelle bouddhique

Elle est surtout constituée de chants, qui sont de trois sortes. Le plus simple est le sutra, invocation syllabique accompagnée seulement du gong de bois (mokt'ak). Le pomp'ae, chant rituel d'origine chinoise, est de loin le genre le plus important. Il est écrit sur des textes chinois en vers et est exécuté avec un rythme libre extrêmement lent, à tel point que la longueur de la partie musicale sur chaque syllabe de texte en empêche bien souvent la compréhension. Indépendamment de ses voisins chinois et japonais, la Corée a développé deux styles de pomp'ae, le hossori pomp'ae et le chissori pomp'ae. Ils diffèrent l'un de l'autre, d'abord par des variations dans la technique vocale et la structure mélodique, mais surtout par leur durée, le second étant beaucoup plus long, plus élaboré et plus orné que le premier. C'est le type de chant le plus important du rite bouddhique coréen. Le type hossori est exécuté sous forme de solo, de chant responsorial ou choral, parfois accompagné d'une danse et d'un petit ensemble instrumental. Le type chissori, homophonique, n'est exécuté que par un chœur à l'unisson. Le dernier type de chant, le hwach'ong, dans la langue vernaculaire, s'inspire beaucoup d'éléments folkloriques coréens (forme poétique, style de chant, structure rythmique et technique vocale). Il a probablement été créé dans le but de répandre les rites bouddhiques dans le peuple. Il est chanté par un soliste qui ponctue ses phrases sur un petit gong et est accompagné d'un tambour (puk).

   Il existe quatre danses rituelles bouddhiques (chakpop), qu'on ne trouve qu'en Corée. Elles sont accompagnées d'un petit orchestre à l'extérieur du temple, constitué essentiellement d'aérophones (instruments à anche et trompettes) et de percussions (gongs, tambours, cymbales).

Musique vocale

On distingue trois types principaux. Le kasa est une sorte de longue chanson narrative, accompagnée d'ordinaire du tambour changgo ou d'un petit ensemble instrumental. On y décèle une forte influence de la musique folklorique (mode, style de voix, etc.). Les deux autres, kagok et sijo, sont des poèmes lyriques. Le kagok, plus élaboré et plus long, utilise un orchestre similaire à celui de la musique de cour hyangak, et le poème est agrémenté d'un prélude, interlude et postlude instrumentaux. Le sijo, dont la mélodie est tritonique, n'est accompagné que du tambour changgo. Là, comme dans le pomp'ae bouddhique, l'étirement de chaque syllabe rend la compréhension du texte impossible.

Musique folklorique

Le type le plus populaire est une sorte d'opéra, le p'ansori, mettant en scène un acteur, qui exécute le drame par la récitation, le chant et le mime. Il est accompagné uniquement d'un tambour (puk), indiquant les schémas rythmiques. La partie de chant, de loin la plus importante, nécessite un timbre vocal lourd et rauque très particulier, et d'autant plus difficile à maintenir pour l'exécutant que le spectacle dure entre quatre et huit heures. Le p'ansori date probablement du début du XVIIIe siècle, et, au XIXe siècle, une tentative de codification et de réforme a été faite par Sin Chae-hyo, mais avec peu de succès.

   Il existe également en Corée une tradition de musique instrumentale solo, le sanjo. Formellement établies depuis le XIXe siècle, les pièces, transmises oralement, sont exécutées en général sur le kayago, mais aussi sur le komun'go et le taegum, accompagnés sur le tambour changgo. Leur structure est indiquée par six schémas rythmiques, définissant six mouvements, dont les plus rapides nécessitent une technique instrumentale de virtuose. La mélodie suit ces variations de mouvement et s'y conforme esthétiquement.

   Bien que fortement influencée par la Chine, la musique coréenne a su, de tout temps, garder une certaine autonomie. C'est particulièrement frappant en ce qui concerne la matière musicale pure : la mélodie est basée sur des échelles tritoniques, tétratoniques ou pentatoniques, les rythmes sont irréguliers et le style d'ornementation et les techniques vocales lui sont très particulières. Il semblerait en fait que la pénétration chinoise n'ait été efficace qu'au niveau des formes musicales (musique de cour et musique rituelle bouddhique) et des instruments, qui, néanmoins, ont pu préserver une certaine indépendance locale.