Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
R

Rebotier (Jacques)

Écrivain, metteur en scène et compositeur français (Paris 1947).

Très libre, faite de ruptures et d'interrogations, sa musique se caractérise par un sens personnel de la gestion du temps et se nourrit volontiers de poésie orale. Il a écrit notamment Accidents de discours pour violoncelle, clarinette, percussion et voix (1987), P(l)ages pour récitant, flûte, clarinette, violoncelle, tambour de guerre, de sable et d'eau (1988), La musique adoucit les sons pour contrebassiste-récitant (1991), Je te dis  : rien pour orchestre symphonique et soprano (1994), Requiem pour 7 clarinettes, accordéon, cymbalum, 7 voix, 7 morts, chœur d'enfants et soprano solo (1994), De rien pour clarinette, tuba, contrebasse et voix de femme (1995).

récit

Nom d'un des claviers de l'orgue, auquel sont dévolus les jeux de détail propres aux solos, aux récits ou aux dialogues, par opposition aux larges plans sonores du clavier de grand-orgue. Le terme de récit désigne également les mélodies ornées et accompagnées qui abondent dans les livres d'orgue des maîtres français de l'âge classique : récits de cornet, de tierce, de cromorne, etc.

récitant

Ce terme désignait, à l'origine, le chantre chargé de psalmodier les passages narratifs au cours de la lecture de la Passion. Il fut, par la suite, appliqué à l'Évangéliste des Passions-oratorios et au narrateur (« historicus » ou « testo ») des premiers oratorios. Ce rôle tend à être supprimé dès la seconde moitié du XVIIe siècle, dans un effort d'assimilation de l'oratorio à l'opéra, et jusqu'au XIXe siècle, on appelle récitant tout soliste qui se détache du chœur.

   On assiste, au XIXe siècle, à un renouveau du rôle du récitant (qui est soit chanté, soit déclamé), en particulier chez Berlioz qui redonne au narrateur sa place au sein de l'oratorio (l'Enfance du Christ) et en fait même l'unique protagoniste d'un drame où la partie du héros est parlée (Lélio ou le Retour à la vie).

   L'usage du récitant se généralise au XXe siècle sous sa forme traditionnelle avec Honegger (le Roi David), mais surtout par la multiplication des rôles parlés (Un survivant de Varsovie de Schönberg). Cette tendance est particulièrement sensible chez Stravinski, que ce soit dans Histoire du soldat, écrite pour plusieurs récitants, Œdipus Rex (interventions d'un speaker entre les scènes) ou Perséphone. Dans cette œuvre, la partie récitée de l'héroïne contraste avec le rôle chanté du personnage secondaire (Eumolpe), créant ainsi de curieux dialogues.

recitar cantando (ital. ; « dire en chantant »)

Expression utilisée lors de la naissance de l'opéra (Peri, Caccini) pour désigner le chant monodique à la base du genre.

Pour ménager un contraste, et éviter il tedio del recitativo (« l'ennui du récitatif »), Monteverdi lui opposa l'aria, et ce dualisme, sous des formes diverses, est demeuré attaché à l'opéra jusqu'à nos jours.

récitatif

Partie d'une œuvre vocale, ou manière de chanter un texte en se rapprochant de la déclamation parlée ; le tempo et le rythme exact du récitatif ne peuvent généralement pas être notés strictement.

À l'origine de la monodie accompagnée, on différenciait peu le récitatif (ou récit), parfois orné, et l'aria presque déclamée (RECITAR CANTANDO), mais peu à peu, le récitatif devint un genre en soi sur lequel reposait l'essentiel de l'action et des dialogues dans l'opéra, la cantate ou l'oratorio, une action interrompue par l'aria où s'exprimait un état d'âme.

   On distinguait, en Italie, le récitatif secco, soutenu par le clavecin (ou le continuo), et le récitatif obbligato, soutenu par l'orchestre : J.-J. Rousseau, dans son dictionnaire, séparait plus précisément le récitatif accompagné, où l'orchestre se substituait seulement au continuo, du véritable récitatif obbligato où l'orchestre dialoguait avec le chanteur. Le récitatif secco, au débit souvent très rapide, se maintint dans l'opera buffa jusque vers 1830, mais dans l'opera seria, il s'effaça progressivement devant le récitatif obbligato, notamment avec Jommelli, Traetta, Anfossi puis avec Gluck et Mozart, ces deux derniers le distinguant encore assez nettement de l'aria. Après eux, Rossini amplifia le genre du récitatif par une ornementation qui le rapprochait de l'aria, avec laquelle il finit peu à peu par se confondre au cours du XIXe siècle.

   En Allemagne, le récitatif était parfois chanté et très lyrique (notamment chez J.-S. Bach), ou simplement parlé, comme parfois dans le singspiel, mais Beethoven et ses successeurs adoptèrent bientôt une attitude conforme à celle de Rossini. En France, Lully avait aussi créé un récitatif calqué sur la déclamation de l'alexandrin, soutenu par les instruments, et différant d'abord assez peu de l'air proprement dit. Avec Rameau s'opéra une fusion presque totale entre un récitatif très chanté, dialoguant avec l'orchestre, et les airs ou fragments d'airs souvent inclus au sein du récitatif, l'ensemble tendant vers l'arioso. Avec Gluck, le récitatif se sépara à nouveau de l'aria ; ce clivage s'estompa avec Cherubini, Spontini, Berlioz et Gounod, mais ne disparut qu'à la fin du XIXe siècle. Pour sa part, l'opéra-comique ne comportait généralement pas de récitatifs chantés, mais un dialogue parlé.

   Dans les derniers opéras de Wagner et de Verdi, et de façon générale à la fin du XIXe siècle, le récitatif fut pratiquement confondu avec l'aria (son emploi chez certains auteurs du XXe siècle ne fut que référence au passé), et c'est pour réagir contre la subordination presque totale du texte au chant pur que certains compositeurs (à l'image de Dargomyjski et de Moussorgski qui furent les précurseurs du genre nouveau) en vinrent au contraire à rechercher une expression chantée qui fût plus proche du récit que de l'arioso, notamment en France, où on assista à diverses tentatives de récitatifs mesurés se superposant au discours orchestral (cf. Honegger et Milhaud) ; le Sprechgesang proposait aussi en 1911, une solution de « chant parlé » propre à la langue allemande.

   Il faut encore noter que, dans les traductions d'œuvres lyriques, il est fréquent que le récitatif secco italien soit remplacé, en français, par des dialogues parlés (dits alors récitatifs parlés), comme dans les Noces de Figaro ou le Barbier de Séville, alors qu'au contraire les opéras-comiques français comportent des récitatifs chantés dans leurs versions traduites, ou pour leur adaptation au genre de l'opéra, entièrement chanté ; ces transformations furent parfois réalisées par les auteurs eux-mêmes (Gounod pour son Faust, notamment) ou par des adaptateurs, après la mort du compositeur (Carmen, les Contes d'Hoffmann, etc.).

   Il faut également mentionner que, dans la musique instrumentale, il est fait parfois mention d'un style récitatif, tel que Beethoven l'employa dans son quinzième quatuor, sa neuvième symphonie, etc.