Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
A

alphorn
ou alpenhorn

Nom allemand du « cor des Alpes », instrument folklorique en usage dans les montagnes de Suisse et des pays voisins. De perce conique, taillé dans du bois naturel, l'alphorn a l'aspect d'une énorme pipe, pouvant atteindre plusieurs mètres, et produit des sons amples d'une portée considérable. C'est lui qui sonne le fameux Ranz des vaches, évoqué par Beethoven dans la Symphonie pastorale et par Rossini dans Guillaume Tell.

Alsina (Carlos Roqué)

Compositeur argentin (Buenos Aires 1941).

Il a débuté comme pianiste avant de se tourner vers la composition. Artist-in-Residence de la Fondation Ford à Berlin (1964-1966), il a travaillé avec Luciano Berio en 1965, passé deux ans à l'université de Buffalo, et s'est fixé ensuite à Berlin (1968), puis à Paris (1973).Cofondateur, en 1969, du New Phonic Art, groupe spécialisé dans l'improvisation et le « libre jeu d'ensemble », il s'est souvent orienté vers le théâtre musical, par exemple dans Oratorio 1964 pour 3 solistes, 4 acteurs et 3 groupes instrumentaux (1963-64, inachevé), la scène musicale Text (1965-66, inachevé), Text II pour soprano et 5 instruments (1966), Consecuenza pour trombone solo (1966). Sa première œuvre, Trois Pièces pour chant et piano sur des textes de Shakespeare, date de 1956. Dans les années 70, il s'est imposé avec Überwindung pour 4 solistes et orchestre (Donaueschingen, 1970), Schichten pour orchestre de chambre (Royan, 1971), Omnipotenz pour orchestre de chambre (Royan, 1972), Approach pour 2 solistes et grand orchestre (Berlin, 1973). Ont suivi notamment Étude pour zarb (1973), le ballet Fusion pour 2 pianos, 2 percussionnistes et instruments annexes joués par les danseurs (Royan, 1974), le spectacle musical Encore (1976), Stücke pour grand orchestre (Royan, 1977), Harmonies pour solistes, récitant, chœur de femmes et orchestre (Paris, 1979), la Muraille (Avignon, 1981), Hinterland (créé au G. R. M. en 1982), Prima Sinfonia pour flûte, soprano, violoncelle et orchestre (1983), Concerto pour piano et orchestre (1985), Suite indirecte pour orchestre (Metz, 1989), Symphonie no 2 (1991).

altération

1. Modification de la hauteur d'un son par l'adjonction d'un signe qui le hausse ou le baisse toujours à partir de son état « naturel ».

   Dans la musique occidentale classique, où l'unité d'intervalle est le demi-ton, les altérations usuelles sont le dièse

qui hausse la note d'un demi-ton, et le bémol
qui la baisse d'un demi-ton ; il existe des altérations doubles (double dièse
, double bémol
), dont l'effet est de hausser ou baisser la note de deux demi-tons, c'est-à-dire, dans la pratique, d'un ton, mais sans que cet intervalle d'un ton puisse harmoniquement être analysé comme tel, les deux demi-tons étant rarement de même nature. Le bécarre
n'est pas un signe d'altération au sens propre, mais un signe d'annulation qui interrompt l'effet d'une altération antérieure pour remettre la note dans son état naturel. Dans certaines musiques orientales, et parfois dans la musique occidentale, lorsque le quart de ton intervient, le demi-dièse et le demi-bémol peuvent être employés. Enfin, les humanistes du XVIe siècle avaient quelque temps prôné, en vue d'un « chromatisme » imité des Grecs, différentes hauteurs de dièse
, représentant respectivement un, deux ou trois quarts de ton.

   Les altérations peuvent être constitutives ou passagères, selon qu'elles appartiennent ou non à la gamme de la tonalité en cours. Les altérations constitutives de la tonalité initiale d'un morceau, écrites une fois pour toutes au début de ce morceau, forment l'armature (ou armure) et demeurent valables tant qu'elles figurent à la clef, même si la tonalité change.

   À ces altérations d'armature s'opposent les altérations accidentelles, qui sont, elles, écrites en cours de texte et ne restent valables que la durée d'une mesure, ou moins encore si plus

   loin, dans la même mesure, elles sont annulées par un bécarre ou une autre altération.

   Le sens actuel des altérations, tel qu'il vient d'être exposé, ne s'est fixé, progressivement, qu'au cours du XVIIIe siècle. Lire une partition antérieure selon les conventions du solfège actuel exposerait donc à de graves erreurs.

2. On appelle altération d'un accord la modification de hauteur d'un ou plusieurs de ses sons, considérés sur le plan harmonique par rapport à la composition normale de l'accord (ACCORD).

3. On appelle altération d'un intervalle son extension ou son resserrement au-delà de son état juste, majeur ou mineur.

alternance

L'alternance, soit entre un soliste et un groupe, soit entre deux groupes, égaux ou non, appartient à tous les modes d'expression de la musique, les plus frustes comme les plus élaborés. En particulier, son rôle est fondamental dans le développement de la musique liturgique chrétienne, source de toute notre musique classique. Le noyau primitif semble y avoir résidé dans une lecture psalmodiée des textes saints, coupée par de brèves réponses des fidèles. Ce mode d'alternance fut sans doute supplanté, à la fin du IVe siècle (saint Ambroise à Milan), par un autre type dit antiphonie (qui a donné le mot antienne) entre deux demi-chœurs égaux.

   La polyphonie introduisit l'alternance entre les parties polyphoniques et les passages laissés en plain-chant strict ; par exemple, dans la Messe de Machaut, la polyphonie ne concerne qu'un Kyrie sur deux.

   Au XVIIe siècle, apparut une alternance chœur-orgue, dans laquelle l'un des partenaires prenait les versets pairs, l'autre les versets impairs. Les messes des organistes de l'époque sont presque toutes conçues ainsi ; on ne devrait jamais les exécuter comme une « suite » (ce qu'elles ne sont pas), mais toujours avec l'alternance de plain-chant qui les justifie et pour laquelle elles ont été faites. Il en est de même des faux-bourdons, conçus exclusivement pour alterner avec le plain-chant du chœur. L'alternance est particulièrement frappante dans le chant des Passions, où se répondent récitant, Christ et chœur ou « turba ». On retrouve le principe d'alternance dans le double chœur, en honneur au XVIe siècle (Gabrieli à Venise), et, plus tard, dans l'opposition entre petit et grand chœur que préfère le XVIIe siècle, notamment en France.

   Le principe de l'alternance est à l'origine des nuances, qui furent d'abord par paliers ou en écho avant l'apparition tardive du crescendo et du diminuendo, et aussi, à partir du XVIIe siècle, à la source de l'esthétique du concerto grosso (alternance d'un petit groupe instrumental avec l'ensemble ou ripieno), qui devait en se transformant donner naissance au concerto de soliste.

   Sous des formes moins évidentes, l'alternance a conservé une importance fondamentale. Après Schönberg, qui inventa même des signes spéciaux, N (Nebenstimme) ou H (Hauptstimme) prolongés d'un trait, pour mieux préciser l'alternance dans un ensemble des parties dominantes et des parties laissées à l'arrière-plan, nombreuses sont encore les pièces qui tirent de ce principe un élément important de leur structure (ex. : Dutilleux, symphonie no 2, dite le Double).