Heine (Heinrich)
ou Henri Heine
Écrivain et poète allemand (Düsseldorf 1797 – Paris 1856).
Dans l'histoire du mouvement romantique, Heinrich Heine peut apparaître comme le fossoyeur d'un certain idéal (qui le charme pourtant par sa naïveté) et le prophète des temps nouveaux (qui l'inquiètent pourtant) ; il est en fait celui que la structure de ses névroses rendait le plus sensible à la crise historique de son temps, qu'il analysa de la même façon que sa propre maladie. Cet intellectuel bourgeois (mais qui sera, sa vie durant, considéré par sa famille comme un parasite), déchiré entre un monde qu'il méprise, mais dont il vit, et des révolutions sociales dont il prophétise la violence, mais dont la médiocrité probable l'effraie, a entretenu avec le romantisme un rapport ambigu. Lui, qui célèbre la religion du malheur, les amants captifs de leur maîtresse jusqu'à la mort, moque dans l'École romantique (1833-1835) le culte de la souffrance, le mysticisme renaissant, le goût du passé. En fait, il s'en prend surtout au détournement que fait subir à ces sentiments l'Allemagne de son temps, qui a, selon lui, perdu tout contact avec ses origines. Son ironie cruelle, qu'il exerce aussi contre lui, éclate dans ses Reisebilder, « Impressions de voyage », qui serviront de modèle à de nombreux journalistes amateurs préoccupés d'adresser, de l'étranger, des mises en garde à leur patrie. Wagner fait partie de ceux-là, ce même Wagner qui reconnaîtra chez Heine un grand frère en errance et inquiétude, tout autant qu'en souffrance du corps, et lui empruntera le sujet du Hollandais volant. Mais là où Heine dépasse le romantisme, c'est en ce qu'il ne met jamais fin en lui-même au débat des êtres qui l'habitent. Là où ses contemporains succombent ou subliment leurs contradictions, mais n'en supportent jamais l'expression forcenée, il trouve son naturel, son unité. Dans la négation absolue de la médiocrité qu'il côtoie, il cherche les fondements d'un nouvel humanisme. En cela, il annonce le Nietzsche du Crépuscule des idoles, avec lequel, d'ailleurs, il partage l'aiguillon de la maladie : corps débile, sens avides, intelligence trop vaste ; ce comédien de lui-même, narcissique comme tous ceux qui souffrent, nourrit en lui le démon de l'analyse. Tout est passé au crible : tout est matière à doute, à l'enchevêtrement des enthousiasmes et de la dérision. Comment affirmer, quand on vit quotidiennement sa propre déchéance ? C'est Schumann, lui-même angoissé par le thème du double, qui a le mieux servi Heine (les Amours du poète, Cycle de lieder op. 24, les Deux Grenadiers, etc.). Mais Schubert, encore que plus à l'aise dans d'autres ambiances, a donné les chefs-d'œuvre que sont le Sosie (Der Doppelgänger) et les six poèmes figurant au Chant du cygne. Bien d'autres, comme Brahms (Soir d'été), y ont moins brillé : Wolf ne s'y retrouvait point, Mendelssohn en a, non sans talent, adouci le mordant, Liszt, musicien, s'y est montré bavard. Quant à Wagner, il fallait qu'il eût faim pour composer lui aussi les Deux Grenadiers.
Heinichen (Johann David)
Compositeur et théoricien allemand (Krössuln, près de Weissenfels 1683 – Dresde 1729).
Élève de Schelle et de Kuhnau à Leipzig, il séjourna en Italie de 1710 à 1716, et en 1717 devint maître de chapelle de l'Électeur de Saxe à Dresde. Il composa des opéras et de la musique religieuse et instrumentale, et est l'auteur d'un des plus importants traités de l'époque baroque (Der General-Bass in der Composition, 1728).
Heininen (Paavo)
Compositeur finlandais (Järvenpää 1938).
Après de brillantes études à l'Académie Sibelius, à la Staatliche Hochschule de Cologne (avec Bernd Aloïs Zimmermann) et à la Juilliard Academy de New York, Heininen s'impose en Finlande comme une des plus intéressantes personnalités, à la fois reconnue et discutée, de sa génération. Compositeur précoce, il évolue à partir d'un langage relativement traditionnel, puis, attiré par le sérialisme, il développe un système d'écriture de plus en plus complexe, inséparable d'une pensée esthétique et philosophique qui guide l'acte compositionnel. À côté d'œuvres ambitieuses pour l'orchestre, d'une écriture riche et parfois difficile (Preambolo op. 4, 1959 ; Tripartita op. 5, 1959 ; Soggetto op. 10, 1963 ; Adagio op. 12, 1963-1966 ; Concerto pour piano no 2 op. 15, 1966 ; Symphonies no 3 op. 20, 1969 et no 4 op. 27, 1971), il développe parallèlement un style non moins complexe, mais où il libère une grande force expressive et parfois même incantatoire (Cantico delle creature op. 17, 1968 ; The Autumns pour chœurs op. 22, 1970 ; Poesia squillante ed incandescente op. 32a, 1974 ; Préludes, études, poème op. 32b, 1974 ; Quatuor op. 32c, 1974). Les plus incontestables réussites dans la petite forme sont ses quatre séries de Discantus (1965-1976) et ses Cantilènes (1970) pour instruments seuls, d'une grande pureté de langage et d'expression. En 1977, une évolution de son style lui fait abandonner les constructions sérielles et numérales pour essayer de représenter mieux encore un monde où les timbres, l'harmonie, le rythme et la forme pourraient être englobés dans un système polydimensionnel (Reality, 1978 ; Dia, 1979 ; Cor meum, 1979). Parmi ses œuvres récentes, un concerto pour saxophone (1983) et un pour violoncelle (1985), le concerto pour chanteurs, instrumentistes, mots, images et mouvements le Tambour de soie (1981-1983) et l'opéra le Couteau (Helsinki, 1989).
Heise (Peter Arnold)
Compositeur danois (Copenhague 1830 – Tårbaek 1879).
Comme la grande majorité des compositeurs danois, il va se perfectionner à Leipzig (1852-53). Considéré comme le successeur de C. E. F. Weyse, il est le maître incontesté de la mélodie romantique danoise et il utilise avec sensibilité les poèmes strophiques d'Oehlenschläger, de C. Winther, de C. Hauch, de B. S. Ingemann et de F. Paludan-Müller. Bien qu'il ait également écrit de la musique instrumentale (pièces pour piano, musique de chambre, une symphonie), son ouvrage le plus important reste l'opéra Drot og Marsk (« le Roi et le Maréchal », 1878), à la charnière entre le singspiel, alors traditionnel au Danemark, et le style moderne de l'opéra européen cosmopolite. Quelques influences de la tradition de Leipzig (Schumann et Mendelssohn) et accessoirement de Wagner (Lohengrin) ne diminuent pas les qualités d'une œuvre qui, en tant que synthèse du classicisme et du romantisme, apparaît typique du style danois de l'époque.