Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
N

Noras (Arto)

Violoncelliste finlandais (Turku 1942).

Il entre à l'âge de sept ans à l'Académie Sibelius d'Helsinki et poursuit ses études au Conservatoire de Paris dans la classe de Paul Tortelier, où il obtient un premier prix en 1964. Deux ans plus tard, il remporte le second prix au Concours Tchaïkovski de Moscou. En 1967, il reçoit le prix Sonning de Copenhague et fait sa première tournée aux États-Unis en 1968. En 1969, il donne une série de concerts en Amérique du Sud, où il se produira fréquemment par la suite. Membre du Quatuor de l'Académie Sibelius et du Trio d'Helsinki, il joue en sonate avec Bruno Rigutto, participe aux master classes et aux concerts du Festival de Prades et dirige le Festival de Maantali, qu'il a fondé en Finlande.

Nordgren (Pehr Henrik)

Compositeur finlandais (Helsinki 1944).

Élève de J. Kokkonen, il poursuit des études à l'université d'Helsinki (musicologie), puis à l'université de Tky (musique traditionnelle) et vit maintenant dans le village de Kaustinen, en Finlande, au milieu des pelimannit (« ménétriers ») comme läänintaiteilija, « artiste régional ».

   Dans son œuvre, il a réussi à opérer une synthèse de styles entre les musiques folkloriques finnoise et japonaise et un langage contemporain, lui-même extrêmement composite. Cette réussite apparaît notamment dans le Concerto pour clarinette, instruments populaires et petit orchestre op. 14, œuvre originale et ambitieuse (1970) ; le Concerto d'automne, pour instruments traditionnels japonais et orchestre op. 18 (1974) ; les Pelimannimuotokuvia op. 26, pour cordes (« Portraits de ménétriers », 1976). Ce dernier ouvrage précède et annonce le Quatuor no 1, pour instruments traditionnels japonais op. 19 (1974) et Seita op. 42 (1978), pour 2 kotos et jushichige.

   Parallèlement, Nordgren a commencé, en 1972, ses Ballades d'après les histoires japonaises de fantômes de Lafcadio Hearn (10 pièces pour piano). À côté de ces œuvres, il faut également retenir ses nombreuses œuvres pour orchestre : les 3 Euphonies (1967 et 1975) ; 2 Concertos pour alto, 1 Pour piano, 1 Agnus dei op. 15 (1970) ; The Turning Point op. 16 (1972) ; la Symphonie op. 20 (1974) ; Summer Music op. 34 (1977) ; la Symphonie pour cordes op. 43 (1978) ; 5 Quatuors à cordes (de 1967 à 1986), un Quintette avec piano (1978), une Symphonie no 2 (1989).

Nordheim (Arne)

Compositeur norvégien (Larvik 1931).

Il a étudié à Oslo, puis à Copenhague avant d'effectuer un stage de musique électronique à Paris.

   Ses premières œuvres importantes sont Aftonland (1957), puis Canzona, pour orchestre (1960), qui annonce une période créatrice extrêmement prolifique et riche. « Tout doit chanter » est la règle de conduite de ce compositeur, qui rejoint vite l'avant-garde musicale et se tourne de plus en plus vers les moyens électroniques : Katharsis, 1962 ; Epitaffio, 1963 ; Favola, 1965 ; Response I-III, 1966, musique électroacoustique ; Eco, 1967-68 ; Colorazione, Solitaire et Warszawa, 1968 ; musique pour le pavillon norvégien de l'exposition d'Osaka, 1970 ; Pace et Lux tenebrae, 1970. Depuis cette date, il combine une technique d'écriture orchestrale en larges clusters et des procédés contrapuntiques : Floating, 1970 ; Greening, 1973 ; puis les œuvres plus complexes : Forbindelser (Connexions, 1975), Doria et Spur (1975), Ariadne (1977), Tenebrae, concerto pour violoncelle et orchestre (1982), Rendez-vous pour orchestre à cordes (1987).

nordique (style musical)

Il existe un style musical commun à la Finlande (civilisation finno-ougrienne) et aux pays scandinaves (civilisation viking) : Danemark, Islande, Norvège et Suède, qui est le produit d'un fonds commun ou devenu tel (fonds historique, politique et sociologique, mais aussi ethnographique et ethnomusicologique). Pour le définir, on n'utilise pas le terme de style scandinave, incomplet et restrictif, mais celui de nordique, qui correspond à la réalité historique de l'unité politique des 5 pays (en scandinave : Norden, en finnois : Pohjoismaat). Il est important de noter qu'il ne s'agit pas seulement de ce qu'on appelle un style « nationaliste », mais d'un phénomène esthétique beaucoup plus riche et complexe.

   Il faut attendre le XIXe siècle et la naissance des mouvements romantiques et nationaux-romantiques pour que l'interpénétration structurelle et politique entre la Suède, le Danemark, la Norvège et la Finlande aboutisse, dans ces pays, à l'élaboration d'œuvres musicales dans lesquelles certaines caractéristiques stylistiques communes laissent apparaître, en dehors de toute idée d'école, une convergence esthétique et expressive (cf. articles MUSIQUE dans le domaine danois, finlandais, islandais, norvégien, suédois). Issu du mouvement littéraire en Suède, Danemark et Norvège, cet embryon de style commun est renforcé en Finlande par un fort mouvement nationaliste et indépendantiste. Il apparaît tout d'abord dans les ouvrages lyriques (Elverhøj de Kuhlau en 1828), puis, par le biais de l'ouverture d'opéra, dans le domaine symphonique (ouverture d'Yrsa de J. P. E. Hartmann en 1883, symphonies de N. Gade). Ce style commun se définit surtout par un coloris orchestral assez sombre et proche de celui de Brahms, tandis que la forme et le style s'accommodent encore de ceux prônés par Mendelssohn, musicien de tempérament nordique et classique. On introduit des mélodies populaires ou folkloriques dont les références littéraires sont trouvées chez les Danois Oelenschläger et B. S. Ingeman et dans l'œuvre des Norvégiens Bjørnsson et Ibsen. Parallèlement, la mélodie se caractérise au Danemark tout d'abord avec C. F. E. Weyse (1774-1842), puis avec P. Heise (1830-1879) et P. E. Lange-Müller (1850-1925) ; mais c'est E. Grieg, suivi par A. Backer-Grøndahl (1847-1907), qui va réellement libérer le genre des influences germaniques. Les caractéristiques de la mélodie nordique sont, outre le thème littéraire qui traite généralement de l'être humain devant la nature et face à sa destinée, un style musical qui comporte de brutales oppositions majeur-mineur (par l'action de la tierce flottante, empruntée au folklore norvégien, mais qui existe également en Finlande), une prédominance de septièmes majeures et mineures et de quartes justes et augmentées, l'utilisation d'échelles modales et un accompagnement de style impressionniste ; on retrouve également ce dernier dans les pièces pour piano (Lyriske Stykker de Grieg) et il deviendra l'une des caractéristiques du style nordique.

   Les derniers apports stylistiques importants seront le fait de J. Sibelius, notamment dans ses mélodies, dont beaucoup ont été écrites sur des textes suédois, et dans ses poèmes symphoniques, où il introduit l'impressionnisme (En saga, 1892-1901 ; les Océanides, 1914 ; Tapiola, 1926). Deux innovations vont également s'insérer dans les caractérisations du style nordique. Tout d'abord, Sibelius crée une nouvelle forme issue de la cantate et de la ballade, deux genres appréciés, alors, dans les pays nordiques (Tulen synty, 1902 ; Luonnotar, 1910). Si le style de l'œuvre doit beaucoup à la langue finnoise et à la mélodie kalevaléenne, formellement, elle crée un genre qui sera repris par maints compositeurs (par ex. T. Kuula en Finlande, I. Lidholm en Suède et surtout E. Bergman). D'un autre côté, nous sommes redevables aussi bien à Sibelius qu'à Nielsen de l'élaboration du renouvellement des méthodes d'écriture par un principe organique de composition aujourd'hui dénommé la métamorphose, et qui joue actuellement un rôle aussi important que celui des techniques sérielles dans les années 50.

   Depuis Grieg, Nielsen et Sibelius, les caractéristiques du style nordique, qui ont influencé sous des formes diverses presque tous les compositeurs du XXe siècle, n'ont que peu évolué et seuls, en Finlande, E. Bergman et, au Danemark, P. Nørgård ont réussi à aller au-delà, l'un de la forme cantate-ballade sibelienne, l'autre des principes de la métamorphose ; néanmoins l'adoption quasi unanime d'aspects du style nordique n'a toutefois pas tué les caractéristiques musicales nationales, notamment en Islande. Plus européanisés, les Danois et les Suédois se sont généralement rattachés à un certain classicisme germanique longtemps représenté par l'école de Leipzig ; les Norvégiens, impressionnistes et romantiques, et les Finlandais, plus introvertis, sont moins attachés à la technique qu'aux problèmes existentiels de la composition ; les Islandais, tard venus dans le concert nordique, apparaissent, tel leur volcan Hekla, comme des romantiques explosifs.

   Enfin, il faut signaler, et ce n'est pas le moins important, que, depuis 1888, date du premier festival de musique nordique, organisé à Copenhague, la coopération internordique a porté systématiquement sur tous les domaines musicaux (diffusion, création, éducation, édition, interprètes) et facilite plus encore les échanges et la connaissance de ce qui se fait dans chacun des cinq pays du Norden.