Clementi (Muzio)
Compositeur, pianiste et facteur de pianos italien (Rome 1752 – Evesham, Angleterre, 1832).
Fils d'un orfèvre aimant beaucoup la musique, il fut, après des études dans sa ville natale, adopté par un gentilhomme anglais, Peter Beckford, qui l'emmena fin 1766 ou début 1767 dans sa propriété du Dorset, où il continua à se former durant sept ans. À Londres, où il s'installa en 1773 ou 1774, donna des récitals et dirigea l'orchestre de l'opéra italien au King's Theatre, la renommée lui vint surtout après la publication de ses six sonates op. 2 (1779). En 1780, il entreprit la première de ses nombreuses tournées à travers l'Europe : Paris, Strasbourg, Munich, Vienne (où, en décembre 1781, l'empereur Joseph II le mit en compétition pianistique avec Mozart, qui le jugea « une mécanique, sans un sou de sensibilité ni de goût »), Zurich, Lyon (où une affaire sentimentale sans lendemain le fixa plus d'un an), Rome peut-être. Rentré à Londres fin 1783, il en repartit pour Lyon et Berne en 1784, puis s'établit dans la capitale britannique de 1785 à 1802, s'y consacrant à la composition, à la direction d'orchestre, ainsi qu'à sa carrière de pianiste (qu'il arrêta soudain et apparemment sans raison en 1790) et de professeur. En 1798, de son association avec Longman et Broderip, qui venaient de faire faillite, naquit la firme " Longman, Clementi and Co. ». Sous cette raison sociale et (après 1801) d'autres, il se livra jusqu'à sa retraite en 1830, et en témoignant d'un sens commercial avisé, à l'édition, à la vente et surtout à la manufacture de pianos. En 1802, il partit avec son élève préféré John Field pour une nouvelle grande tournée en Europe qui jusqu'en 1810 le mena successivement à Paris, Vienne, Saint-Pétersbourg (où se fixa Field), Berlin, Dresde, Prague, Vienne, Zurich, Leipzig, Berlin (où à 52 ans il épousa une jeune fille de 19 ans), en Italie (où sa femme mourut en donnant naissance à un fils), puis à Berlin, Riga, Saint-Pétersbourg, Vienne (où il conclut avec Beethoven d'avantageux contrats d'édition), Rome, Milan et enfin Vienne, d'où il repartit pour Londres. Le 6 juillet 1811, il y épousa Emma Gisburne, qui lui donna 2 fils et 2 filles. Partageant son temps entre la composition, sa fabrique de pianos et la direction d'orchestre, il participa en 1813 à la fondation de la Philharmonic Society, et se rendit encore sur le continent Paris, Vienne, Allemagne, Italie en 1817-18, 1820, 1821-22 et 1826-27. À sa mort, il eut des obsèques nationales et fut enterré à Westminster Abbey.
Il fit ses débuts au clavecin et écrivit ses premières sonates pour cet instrument, mais de son vivant déjà (dans les années 1820), on l'appela le « père du piano-forte ». Sa carrière d'interprète servit en effet de modèle aux innombrables pianistes virtuoses du début du XIXe siècle, et comme compositeur, non seulement il se consacra presque exclusivement au clavier, mais créa le style pianistique moderne à la fois sur le plan technique (octaves et tierces parallèles) et sonore, ce dont devaient largement s'inspirer ses élèves et successeurs, avec à leur tête Beethoven (qui mettait les sonates de Clementi au-dessus de celles de Mozart). Il est possible que les remarques désobligeantes de Mozart à son égard, et qui lui causèrent un véritable choc lorsqu'il en entendit parler au soir de sa vie, aient été en partie dictées par l'envie. De ses sonates, plusieurs (comme l'opus 34 no 2 en sol mineur) naquirent à l'origine comme des concertos, mais une seule (l'opus 33 no 1 en ut majeur) a survécu également sous cette forme. Les dernières, les trois de l'opus 50, avec notamment la célèbre Didone abbandonata, parurent en 1821, mais furent sans doute composées pour l'essentiel dès 1804-1805. Plusieurs, en particulier l'opus 13 no 6 en fa mineur (1785), l'opus 25 no 5 en fa dièse mineur ou les opus 40 no 2 en si mineur et no 3 en ré majeur (1802), sont des chefs-d'œuvre qui devraient apparaître fréquemment aux programmes des récitals. Clementi compositeur ne se résume en rien aux six sonatines op. 36 (1797) connues de tous les apprentis pianistes. On lui doit également un célèbre recueil didactique, le Gradus ad Parnassum op. 44 (3 vol. 1817, 1819 et 1826) et deux symphonies (op. 18, 1787). Plusieurs autres symphonies furent composées et exécutées dans les années 1790 et aux alentours de 1820, mais jamais éditées et laissées dans un état de désordre quasi inextricable. Quatre, dont une faisant usage du God Save the King, ont été reconstituées dans les années 1970 par Pietro Spada.
Clérambault
Famille de musiciens français, active durant la seconde moitié du XVIIe siècle et tout le XVIIIe siècle.
Dominique (Paris en 1647 – id. 1704). Il fut violoniste, membre des Vingt-Quatre Violons du Roy.
Louis-Nicolas, fils du précédent, organiste et compositeur (Paris 1676 – id. 1749). Formé par son père, il apprit sans doute le violon, puisqu'on le trouve plus tard recensé parmi les « musiciens symphonistes ». Il travailla également la technique des instruments à clavier, principalement l'orgue, avec André Raison. Pour la composition, enfin, il fut l'élève de Jean-François d'Andrieu. Suppléant de Nivers, puis titulaire, en 1715, des orgues de la maison royale de Saint-Cyr, où il était aussi surintendant de la musique, il assura encore la charge d'organiste à Saint-Sulpice, où ses fils devaient lui succéder jusqu'en 1773. En outre, il prit la suite de Raison à la tribune des Jacobins (1719).
Sa carrière de compositeur fut jalonnée par la publication de nombreux recueils qui rencontrèrent un succès considérable : un Livre de clavecin (1704), un Livre d'orgue (1710), une abondante œuvre profane Airs sérieux et à boire, cinq volumes de Cantates à une ou deux voix (Orphée, Médée), des cantates isolées, des divertissements et des intermèdes pour le théâtre. Sa musique religieuse n'est pas moins importante : Airs spirituels et moraux, six livres de Motets, deux tomes de Chants et Motets à l'usage des dames de Saint-Cyr, un oratorio (Histoire de la femme adultère), un Te Deum. Clérambault est le premier maître de la sonate et de la cantate françaises, inspirées des modèles italiens, mais adaptées à l'esprit national, selon les principes de la « réunion des goûts » prônée par Couperin. S'il ne possède pas le génie ardent de Couperin, il est sans doute l'un de ceux qui réussissent la plus séduisante synthèse de la noblesse polyphonique française avec la souplesse lyrique et l'art du développement des Italiens, dans la tonalité d'une sensibilité gracieuse. À l'orgue, il est l'un des derniers représentants de la grande école française et du style sérieux, avant que ne se développent les pièces de concert du siècle de Louis XV.
César François Nicolas, dit « le fils », fils du précédent (Paris v. 1705 – id. 1760). Organiste, il succéda à son père et composa quelques cantates.
Évrard Dominique, frère du précédent (Paris 1710 – id. 1790). Également organiste, il succéda à son tour à son père, à Saint-Cyr, aux Jacobins et à Saint-Sulpice.