Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
P

positif

Petit orgue, de dimensions modestes, plus petit qu'un instrument de tribune, mais plus important qu'un portatif.

Il est posé à même le sol ou sur un meuble (d'où son nom), mais peut être déplacé. Instrument à plusieurs jeux et un clavier d'étendue moyenne, il fait appel à un souffleur indépendant pour laisser l'organiste libre de jouer de ses deux mains.

   Principalement destiné à l'accompagnement liturgique, on le trouvait dans les couvents ou à la tribune des églises, en avant du grand orgue. Dès le XVe siècle, on l'associa au grand orgue de tribune : c'est l'origine du petit buffet principal dans la disposition classique des grands instruments. La tuyauterie du positif est alors actionnée à partir d'un des claviers de l'orgue, qui prend le nom de positif. Par extension, l'appellation de positif a été systématiquement donnée, au XIXe siècle, à l'un des claviers des orgues de plus de deux claviers, même quand la tuyauterie en était logée dans le buffet du grand orgue.

   Aujourd'hui, on construit à nouveau des positifs indépendants, soit à l'usage des communautés religieuses ou des chœurs d'églises, soit surtout comme instrument de réalisation de la basse chiffrée dans les formations orchestrales et vocales : aisément transportable en camionnette, il permet de donner des concerts en des lieux dépourvus d'orgue utilisable à cet effet.

position

Place que doit occuper la main gauche sur le manche d'un instrument à cordes pour assurer le doigté correct d'une série de notes.

Dans le cas de la corde mi (chanterelle) du violon, la première position est définie par le placement du premier doigt (l'index) sur le premier degré après la note à vide, c'est-à-dire le fa ; les trois doigts suivants correspondent respectivement au sol, au la et au si. En « démanchant » d'un degré vers le chevalet, on passe à la deuxième position qui donne les notes sol, la, si, do, et ainsi de suite jusqu'à une treizième position assez acrobatique et fort peu usitée (c'est seulement à la fin du XVIIIe siècle que les virtuoses dépassèrent la cinquième position). Chaque position donne des résultats correspondants sur les trois cordes voisines, d'où la possibilité de jouer deux octaves sans démancher. Le même système s'applique à l'alto, le violoncelle et la contrebasse moyennant des modifications (demi-positions) nécessitées par les intervalles plus grands, ainsi qu'aux instruments à cordes pincées. La notion de position s'applique également aux degrés d'allongement de la coulisse du trombone. La première s'applique à la tessiture la plus aiguë, instrument fermé, et la septième à l'allongement maximal de la coulisse.

   Enfin, les musicologues emploient le même terme pour qualifier l'espacement des notes d'un accord (position plus ou moins large ou serrée), et sa situation par rapport à la basse fondamentale.

posthorn (all. pour « cor de postillon »)

Instrument sans piston utilisé par les postillons pour annoncer leur arrivée à l'étape.

Bach l'imita au clavecin dans son Capriccio sopra la lontananza del suo fratello dilettissimo (Capriccio sur l'éloignement de son frère bien-aimé) BWV 992 (1704). Mozart l'utilisa en solo dans le second trio du second menuet de sa sérénade en majeur K.320 (Posthorn) de 1779 ainsi qu'à la fin (Promenade en traîneau) de ses Trois Danses allemandes K.605 (1791) et Beethoven à la fin de ses Douze Danses allemandes WoO 8 (1795). À la mesure 9 de la symphonie en majeur no 31, dite Mit dem Hornsignal (Appel de cor), de Haydn (1765), le premier des quatre cors fait entendre un motif authentique de cor de postillon : endroit marqué « Cor de poste de Nuremberg » sur l'édition parisienne de Sieber (annoncée en 1788) et « alla Posta » sur une copie anglaise d'époque.

postlude

Antonyme de prélude, ce terme désigne une pièce de construction assez libre et servant de commentaire à une cérémonie qui vient de s'achever ou à une œuvre musicale dont on vient d'entendre l'essentiel (Postlude pour l'office de Complies pour orgue de Jehan Alain, postlude pianistique des Amours du poète de Schumann).

pot-pourri

Expression dérivée de l'espagnol olla potrida (plat de viandes et légumes mélangés), et utilisée en France au XVIIIe siècle pour désigner, en musique, des collections de thèmes connus, notamment d'airs d'opéras en vogue.

Aujourd'hui, on appelle pot-pourri (en anglais medley, en allemand Potpourri) une pièce de musique de style léger qui enchaîne rapidement, sans les développer, différents thèmes connus (airs d'une opérette, succès d'une vedette, airs classiques d'un certain genre ­ musette, viennois, etc.). Mais le pot-pourri est un genre ancien, né pour le seul plaisir de faire entendre et reconnaître en peu de temps une série de thèmes appréciés et évocateurs. Il joue sur la connivence, la nostalgie, le plaisir du « déjà connu », et il existe depuis longtemps sous les noms de « fricassée » (en France, XVIe s.), « quodlibet », c'est-à-dire « tout ce qu'on veut », « ce qui plaît » (en Allemagne, XVIe et XVIIe s., cf. le Quodlibet de 2 thèmes populaires dans la fin des Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach), ensalada en Espagne, et misticanza en Italie. Au XVIIIe siècle, Bonin publie des sélections de danses sous le titre de Pot pourry Français. Joseph Gelinek écrit des pots-pourris pour piano d'airs d'opéras de Mozart, et, au XIXe siècle, Diabelli s'attaque de la même manière aux œuvres de Beethoven. Chopin appelle « pot-pourri » sa Fantaisie op. 13 sur des airs polonais, et l'on publie beaucoup de « sélections » pour piano, orchestres de kiosque, bals, des airs des opéras en vogue. Aujourd'hui, le genre est bien vivant, que ce soit dans la musique de variété, ou dans la musique « sérieuse » où il revit à travers les musiques de « collage » (pot-pourri beethovénien du Ludwig van de Mauricio Kagel, et troisième mouvement de la Sinfonia de Luciano Berio [1968], qui est un grand pot-pourri de la musique occidentale construit autour du scherzo de la Deuxième Symphonie de Mahler).

Pothier (dom Joseph)

Moine bénédictin français, restaurateur du chant grégorien (Bouzemont, Vosges, 1835 – Conques, Belgique, 1923).

Ordonné prêtre en 1858, il prononce ses vœux à Solesmes en 1860. D. Guéranger le charge, la même année, d'aider D. Jausions à préparer une nouvelle édition des chants liturgiques à l'usage choral. Il termine seul ce travail après la mort de D. Jausions et, en 1880, paraît la première partie de ses recherches, les Mélodies grégoriennes d'après la tradition, suivie du Liber gradualis (1883), des Processionale monasticum et Variae preces (1888), Liber antiphonarius (1891), Liber responsorialis (1895) et Cantus mariales (1903).

   Nommé prieur de l'abbaye de Ligugé en 1893, puis de Saint-Wandrille en 1895, il devient abbé de ce monastère en 1898. La suppression de cette abbaye l'oblige à partir en Belgique en 1912. Sa première publication souleva un vif enthousiasme lors du Congrès grégorien d'Arezzo de 1882, mais le Liber gradualis de 1883 provoqua des dissensions entre la nouvelle école de Solesmes et les partisans de l'édition néomédicéenne, publiée chez Pustet à Ratisbonne en 1868. Il lui fallut attendre 1904 pour s'imposer, lorsqu'il fut nommé à la tête d'une commission chargée par Pie X de réaliser une édition vaticane du chant grégorien et qu'il présidera jusqu'en 1913. Son travail fut capital pour la restauration du chant grégorien. Il donna, le premier, une transcription mélodique exacte des neumes et précisa l'accentuation de la phrase en fonction du mot latin. Il négligea, cependant, la valeur rythmique des neumes qui, pour lui, étaient égaux. Cette lacune fut rapidement comblée par son élève et successeur D. Mocquereau.