Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
S

Souzay (Gérard)

Baryton français (Angers 1918).

Élève de Lotte Lehmann et de Vanni-Marcoux, il a fait essentiellement une carrière de récitaliste. Il a triomphé dans le monde entier comme interprète de la mélodie française et du lied allemand, sans négliger pour autant la musique baroque qu'il a contribué à ressusciter. Au théâtre, il a surtout chanté le rôle de Don Juan et celui de Golaud (Pelléas et Mélisande), où son art raffiné apparaissait fort bien employé. Sa musicalité exceptionnelle, son sens du phrasé, son articulation exemplaire en firent un des meilleurs chanteurs français de l'après-guerre.

spectrale (musique)

Mouvement musical apparu, notamment en France, vers la fin des années 1970.

Les compositeurs qui revendiquent, avec plus ou moins de fermeté, l'appartenance à ce courant (Dufourt, Radulescu, Levinas, Murail, Grisey, mais aussi les Roumains Nemescu et Dumitrescu, ainsi que leurs héritiers, Benjamin en Angleterre, Saariaho en Finlande) prennent la structure acoustique du son comme modèle pour l'élaboration d'une syntaxe sonore renouvelée. Considérant le son comme un univers, ils préfèrent travailler « dans le son » plutôt qu'« avec des sons » et ne se limitent pas à considérer le timbre comme l'une des dimensions majeures, voire déterminantes, du sonore, mais essaient au contraire de s'inspirer de la structure du spectre pour le choix des hauteurs, la définition de la facture et de la forme musicale (conçue d'ailleurs, le plus souvent, comme un processus). Les tenants du spectralisme admettent en général, comme précurseurs, des compositeurs tels que Ligeti, Scelsi ou Stockhausen (Stimmung). Le mouvement spectral représente un retour à la pensée verticale et totalisante en musique, après l'hégémonie de la pensée polyphonique et analytique instaurée par le dodécaphonisme et le sérialisme.

Speer (Daniel)

Compositeur et théoricien allemand (Breslau 1636 – Göppingen 1707),

auteur du traité Grundrichtiger… Unterricht der Musikalischen Kunst (1687, rév. 1697).

Sperger (Johann Matthias)

Contrebassiste et compositeur allemand (Valtice, Bohême, 1750 – Ludwigslust 1812).

Il fut au service du cardinal von Batthyani à Presbourg (1777-1783) puis de la famille Erdödy (1783-1786), et enfin, de 1789 à sa mort, du duc de Mecklemburg à Ludwigslust. Considéré en son temps comme le plus grand virtuose de la contrebasse, il composa également beaucoup pour son instrument, qu'il traita en soliste dans plusieurs de ses symphonies.

spiccato

Variante du coup d'archet sautillé, dans laquelle l'archet est soulevé après chaque note.

Spitta (Philipp)

Musicologue allemand (Wechold, près de Hoya, 1841 – Berlin 1894).

Il étudia la théologie et la philologie classique à Göttingen. Devenu professeur de lycée, il s'intéressa de plus en plus à l'histoire de la musique, en particulier à Bach, et, en 1873, publia le premier volume de sa grande étude sur ce compositeur. Cette parution fit date, et, en 1875, Spitta fut nommé professeur d'histoire de la musique à l'université de Berlin et directeur de l'École supérieure de musique de cette ville, postes qu'il devait conserver jusqu'à sa mort. Comme biographe, il avait le sens de l'histoire et du contexte historique, et comme pédagogue, il forma Oskar Fleischer, Max Friedländler et Max Seiffert. En 1885, il fonda avec Friedrich Chrysander et Guido Adler le Vierteljahrsschrift für Musikwissenschaft, un des premiers périodiques scientifiques consacrés à la musique. Outre son ouvrage sur Bach (Johann Sebastian Bach, Leipzig, 1873-1880), il a publié notammment des Musikgeschichtliche Aufsätze (Berlin, 1894), et édité des œuvres de Buxtehude, Schütz et Frédéric II de Prusse.

Spivakov (Vladimir)

Violoniste russe (Oufa 1944).

Il étudie d'abord au Conservatoire de Leningrad, puis à celui de Moscou, où il entre à l'âge de treize ans et travaille avec Jankélévitch. Lauréat des Concours Long-Thibaud en 1965, de Montréal en 1968, Paganini en 1969 et Tchaïkovski en 1970, il commence à se produire en Occident en 1975. En 1979, il fonde un orchestre de chambre, les Virtuoses de Moscou, dont il est à la fois le chef et le violon solo. À la tête de cet ensemble, il fait de nombreuses tournées dans le monde, se produisant dans un répertoire très vaste, allant de Bach à Chostakovitch. En 1990, il s'installe avec cet orchestre à Oviedo (Espagne) et enseigne au Conservatoire de Madrid. Il est depuis 1989 directeur artistique du Festival de Colmar.

Spohr (Louis)

Compositeur, chef d'orchestre et violoniste allemand (Brunswick 1784 – Cassel 1859).

Il entra dès 1779 dans la chapelle de la cour de Brunswick. Après de premières tournées de concerts, il dirigea la chapelle de la cour de Gotha (1805-1812), puis fut nommé en 1813 chef d'orchestre au Théâtre an der Wien à Vienne, où il composa son premier succès dramatique, Faust (Prague, 1816). Il était alors considéré comme le premier violoniste allemand et avait déjà accompli avec sa femme, célèbre harpiste, de nombreuses tournées. De sa renommée témoigne, entre autres, le concerto pour violon op. 47, dit in modo di scena cantante (1816). Directeur de l'Opéra de Francfort de 1817 à 1819, il devint, en 1822, sur la recommandation de Weber, maître de chapelle à la cour de Cassel, où il devait finir ses jours. Sous sa direction, la vie musicale prit à Cassel un grand essor, en particulier dans le domaine de l'opéra. Il y créa son second succès dramatique, Jessonda (1823), et y donna le Vaisseau fantôme de Wagner en 1843, puis Tannhäuser en 1853. À l'occasion du vingt-cinquième anniversaire de son arrivée, il fut fait Generalmusikdirektor. Mais ses relations avec la cour se tendirent, et c'est contre son gré qu'il fut mis à la retraite en 1857. Ses dernières années furent, en outre, assombries par une fracture du bras gauche qui lui interdit de jouer du violon.

   Compositeur très fécond, il écrivit notamment 10 symphonies (de 1811 à 1857), 17 concertos pour violon et 4 pour clarinette, un célèbre quadruple concerto pour quatuor à cordes et orchestre, une très grande quantité de musique de chambre, dont plusieurs pièces faisant appel à la harpe, près de 100 lieder, des oratorios et 10 opéras. Ces ouvrages font de lui un des principaux représentants du romantisme allemand dans l'esprit de Mendelssohn. D'où, à la fois, le très grand succès qu'il rencontra de son vivant, en particulier en Angleterre (où il eut même une renommée posthume appréciable), et l'oubli presque total dans lequel il tomba par la suite. Vers 1830-1840, on vit parfois en lui l'héritier le plus authentique de Haydn, Mozart et Beethoven. Il effectua dans le domaine du chromatisme des recherches assez poussées, mais n'en déboucha pas moins, très souvent, sur le néoclassicisme. Cela dit, ses meilleures œuvres de musique de chambre, comme le célèbre Nonet op. 31 pour violon, alto, violoncelle, contrebasse, flûte, hautbois, clarinette, basson et cor, l'Octuor op. 32 ou le Septuor op. 147, témoignent non seulement de son grand talent, mais aussi de tout un courant musical ­ courant quelque peu provincial, mais synthétisant non sans bonheur les côtés les plus brillants de la tradition en matière d'opéra et de musique instrumentale, que plus que tout autre il sut personnifier. Parmi ses écrits, une méthode de violon (Violinschule, 1832) et une intéressante autobiographie posthume en 2 volumes (Selbstbiographie, 1860-61).