ornement (en all. verzierungen, en angl. ornaments, en it. abbellimenti) (suite)
Le culte de la virtuosité
Au XVIIIe siècle, et surtout en Italie, on assiste à la véritable soumission des compositeurs aux caprices des chanteurs tout-puissants. C'est l'époque de l'aria à da capo, avec ses maîtres A. Scarlatti, Bach, Haendel et Hasse. Cette forme ternaire offre aux chanteurs, au moment de la reprise, l'occasion de se distinguer, d'éblouir et, parfois, d'épuiser le public par les exploits du gosier. Les mouvements lents des sonates et concertos sont souvent des improvisations libres très ornées à partir d'une simple esquisse de quelques notes (Haendel, concertos pour orgue ; Corelli, Sonates, op. 5). Depuis le siècle précédent, les compositeurs français indiquent la place d'un ornement à l'aide d'une petite croix (+ : « faites un ornement ici, selon vos moyens techniques et [dans le cas de la musique vocale] selon le sens du texte »). Mais ils les écrivent aussi, par exemple autour d'un mot imagé tel que « voler ».
Les réformes
Les nombreuses critiques qui affirmaient qu'une ornementation excessive rendait totalement méconnaissable la composition originale ont amené plusieurs réformes. Dans l'opéra, d'abord celles de Gluck, qui s'applique à épurer la mélodie de ses fioritures abusives ; ensuite celles de Rossini, qui n'interdit pas les ornements ce serait contre la nature de sa musique mais prend la précaution de les écrire lui-même à l'exclusion de tout autre. L'époque romantique, héritière en cela du style instrumental classique, demeure en faveur d'une ornementation écrite et strictement au service de l'expression. Cependant, le XIXe siècle abandonne la plupart des ornements du bel canto pour ne garder que le trille, les appoggiatures, les traits et arpèges décoratifs (par exemple, dans la musique de piano de J. Field et Chopin), le mordant, et le « gruppetto » cher à Schumann et à Wagner pour ne citer que l'usage émouvant qui en est fait dans le prélude de Parsifal. Chez Verdi puis chez R. Strauss, les ornements écrits sont riches et travaillés à travers l'œuvre. Il n'en faut pas moins constater que l'ornementation, afin d'embellir véritablement, doit éclore librement.