Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Dohnanyi (Ernö)

Pianiste, compositeur et chef d'orchestre hongrois (Poszony, aujourd'hui Bratislava, en all. Pressburg, 1877 – New York 1960).

Enfant doué pour la musique, il prit des leçons avec l'organiste de la cathédrale de Poszony, puis travailla à Budapest avec Thoman (piano) et Koessler (composition). Il donna son premier concert à neuf ans, reçut à dix-huit les compliments de Brahms ­ qui s'entremit pour faire jouer à Vienne son opus no 1, un Quintette avec piano ­, se rendit à Berlin auprès d'Eugen d'Albert et se lança, avec l'aide de ce dernier, puis de Hans Richter, dans une carrière internationale de pianiste. Introduit en 1905 par d'Albert au conservatoire de Berlin pour y enseigner le piano, Dohnanyi y reçut le titre de professeur en 1908. Il fut nommé en 1914 au conservatoire de Budapest et élu dans cette ville ­ au lendemain de la guerre ­ président de la Société philharmonique, où il soutint Kodály et Bartók, et, en tant que chef d'orchestre, dirigea leurs œuvres, les faisant parfois entendre pour la première fois dans la capitale hongroise. En 1934, il prit la direction du conservatoire Ferenc-Liszt.

   En 1948, il quitta Budapest pour des motifs politiques et s'installa tout d'abord en Argentine, puis, en 1949, en Floride, à l'université de Tallahassee où il forma de nombreux compositeurs et pianistes.

   La carrière de Dohnanyi, pianiste virtuose et compositeur, l'a fait fréquemment comparer à Rachmaninov. Pur produit de la tradition germanique, son œuvre reste fidèle à l'esthétique de Brahms, tout en étant sensible, comme son modèle, à la musique de Johann Strauss ou des Tziganes. Bien que n'ayant pas suivi Bartók et Kodály dans leurs conquêtes d'une musique spécifiquement nationale, il les soutint, malgré l'opposition des officiels. L'ensemble de son œuvre semble aujourd'hui anachronique. Sa musique de chambre, encore méconnue (3 quatuors à cordes, 2 quintettes, une sonate pour violon, etc.), renferme le testament musical le plus solide de son auteur. Les références hongroises sont rares et artificielles : la suite pour piano Ruralia hungarica (1923-24), un Credo hongrois pour ténor, chœur et orchestre, les variations pour piano Sur un thème hongrois, des Chansons populaires. Son œuvre symphonique comporte notamment une Symphonie de jeunesse en fa op. 3 (1895-96), influencée par Liszt et le jeune Richard Strauss, un magnifique Konzertstück pour violoncelle op. 12 (1903-1904), où l'on retrouve la tendresse schumannienne et les élans du Don Quichotte straussien, une Suite d'orchestre en fa dièse mineur op. 19 (1908-1909), où Debussy vient colorer des variations brahmsiennes, enfin les fameuses et spirituelles Variations sur une chanson enfantine op. 25 (1914), où le piano soliste égrène le Ah, vous dirai-je Maman mozartien. Ici, Dohnanyi s'amuse au collage, opposant Wagner à Mozart, et cite tour à tour des références amicales de Brahms (1er Concerto pour piano, finale de la 4e Symphonie), des valses viennoises et la Boîte à joujoux de Debussy. La pantomime le Voile de Pierrette (1908-1909), les trois opéras Tante Simone, la Tour du voïvode, le Ténor ne sont toutefois pas exempts de longueurs.

   Son œuvre de piano, qu'il enregistra en 1956, permet de saisir l'art d'un musicien au métier brillant, solide, mais que les problèmes de construction embarrassent. Ayant trop cherché le secret de la forme classique chez Brahms, sa propre écriture est hésitante et ne devient naturelle que dans les pièces d'allure rhapsodique où le compositeur retrouve les réflexes du Hongrois improvisateur, la couleur, la rythmique et la respiration propres à une tradition austro-hongroise alliant Schubert, Brahms et les Tziganes.

doigté

Choix des doigts à employer pour l'exécution d'un trait sur un instrument à clavier, à cordes frottées ou pincées, à trous, à clés ou à pistons.

Ce choix, dont l'importance est considérable pour la facilité, voire la possibilité du jeu, est souvent suggéré à l'instrumentiste par des annotations chiffrées. On comprend que les partitions destinées à des amateurs ou des débutants soient beaucoup plus chargées de semblables indications que celles qui s'adressent à des professionnels, en pleine possession de leur technique instrumentale. La densité des indications de doigté dépend aussi de la nature de l'instrument : faible dans le cas des instruments à vent qui ne laissent à l'exécutant qu'un choix très limité, elle est nécessairement plus forte et plus utile pour les instruments à cordes, qui offrent maintes façons d'émettre la même note, et, bien entendu, pour le piano.

doïne
ou doïna

D'origine vraisemblablement orientale, la doïna proprement dite appartient au folklore roumain et consiste en de courtes formules plus ou moins fixées dans une échelle diatonique limitée, sur lesquelles l'interprète improvise et bâtit une mélodie.

Très proche, par certains côtés, de la psalmodie liturgique, elle s'en éloigne cependant en faisant intervenir au milieu du style syllabique de brusques ornements, vocalises et gloussements, et en alternant sections chantées et sections parlées. À cause de son caractère lent et mélancolique, on baptise maintenant doïna toute pièce musicale ayant ces caractéristiques (« chant long », plaintif), quelle qu'en soit sa structure. Depuis longtemps l'un des principaux attributs du folklore roumain, elle a, dès le XIXe siècle, intéressé les compositeurs (on en relève des exemples, en 1850, dans les Airs nationaux roumains de Henri Ehrlich, élève de Chopin). Mais c'est Bartók qui, le premier, en a fait une étude détaillée (Volksmusik der Rumänen von Marameresch). La doïna a, depuis lors, fait son entrée dans la musique classique roumaine avec les cahiers de Doïne de Stan Golestan et par l'influence qu'elle a exercée sur les œuvres de compositeurs comme G. Enesco, par exemple.

dolce (ital. ; « doux »)

Terme de nuance qui non seulement désigne un jeu piano, mais implique aussi un caractère mélodieux, gracieux et reposant.

Gabriel Fauré a fait grand usage de cette indication, notamment dans ses mélodies.