Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
M

Madetoja (Leevi)

Compositeur et chef d'orchestre finlandais (Oulu 1887 – Helsinki 1947).

Élève de J. Sibelius à Helsinki, de V. d'Indy à Paris et de R. Fuchs à Berlin, puis directeur de l'académie Sibelius, il est l'un des plus importants symphonistes finlandais de la première partie du XXe siècle, et parmi ceux-ci il représente la tendance lyrique. Son œuvre se situe à la charnière de deux influences : l'appartenance au peuple ostrobothnien et son amour de la musique française. En 1913, il se fait connaître par son poème symphonique Kullervo op. 15 et, en 1915-16 et 1917-18, il acquiert le succès avec ses première et deuxième symphonies. Ses œuvres de maturité sont ses opéras Pohjalaisia (« les Ostrobothniens », 1923) et Juha (1934), ce dernier peut-être moins réussi que l'ouvrage composé sur le même sujet en 1922 par A. Merikanto, la troisième symphonie (1926) et le ballet pantomime Okon Fuoko (1930). À côté de son œuvre symphonique, Madetoja a écrit de nombreuses pages de musique religieuse et parmi celles-ci Marian murhe (stabat mater, 1915) et un De Profundis (1925) ; 50 mélodies, dont le cycle Syksy, 1930-1940 (« Automne »), et autant de pièces chorales contribuent toujours aujourd'hui au rayonnement de son œuvre. Considéré par beaucoup comme le compositeur finlandais le plus important de la génération immédiatement postérieure à celle de J. Sibelius, L. Madetoja, artiste introverti mais lyrique et imaginatif, voire puissant, souffre aujourd'hui de son appartenance au mouvement postromantique et d'avoir préféré son intégrité de pensée à une recherche du radicalisme à tout prix.

Madrid

Les documents nous manquent pour parler d'une activité musicale, quelle qu'elle soit, au moment où Madrid cesse d'être une bourgade sans importance pour bénéficier des privilèges d'Alphonse VI. Tout au plus savons-nous qu'Alphonse VII (1126-1157) accueillit à sa cour le célèbre troubadour gascon Marcabru et que Ferdinand III († en 1252) était également passionné par les minnesängers germaniques et les baladins mauresques. Mais rien ne nous permet d'en situer les manifestations dans les résidences madrilènes du Pardo plutôt qu'à l'Alcazar de Tolède, et il faut pratiquement attendre l'époque des Rois Catholiques pour voir se constituer une chapelle musicale dont l'apogée allait marquer le règne de Philippe II, quand Madrid devint capitale. En dehors du fait que les meilleurs musiciens d'Espagne s'y trouvaient réunis, le répertoire de musique religieuse et profane y atteignit rapidement un très haut niveau en opposant aux polyphonies des Franco-Flamands un art entièrement inspiré du chant populaire castillan. Antonio de Cabezón (1510-1566) en fut lui-même organiste avant de devenir musicien de la chambre de Charles Quint, puis maître de la chapelle royale de Philippe II. Ce dernier conserva, du reste, la chapelle flamande que Charles Quint avait entretenue, et, après son mariage avec Élisabeth de Valois, engagea pour ses deux chapelles un certain nombre de musiciens étrangers, principalement italiens et français. Le génie universel d'Antonio de Cabezón ne devait cependant apparaître qu'au moment où, douze ans après sa mort, son fils Hernando publia à Madrid ses Obras de música et, malgré de savants musiciens comme Soto ou Santa María, il fallut attendre le retour de Victoria (v. 1550-1611) comme musicien de la cour et organiste des Descalzas Reales (1596) pour que la musique y trouvât un semblable rayonnement. La fondation du monastère de l'Encarnación (1615) fut également l'occasion de constituer une nouvelle chapelle (avec Diaz de Besson et Diego Pontac), tandis que le répertoire profane, apprécié dès le règne des Rois Catholiques, allait des romances et des villancicos aux premières fiestas de música, ancêtres de l'opéra, qui faisaient les beaux soirs du Palacio Real (Selva sin amor de Lope de Vega, 1629 ; La Purpura de la rosa de Calderón et Hidalgo, 1660). Bientôt le Palacio de la Zarzuela, également édifié dans la forêt du Pardo (1630), présenta des spectacles non plus entièrement chantés mais parlés et entrecoupés de musique et de danse (Fiestas de Zarzuela, 1636, El Golfo de las sirenas de Calderón, 1657). C'est enfin l'époque où des échanges permanents entre l'Espagne et l'Italie permirent à de nombreux chanteurs italiens de s'établir à Madrid en important, du même coup, le style de l'opéra transalpin. Début d'une influence qui pesa pendant plus de cent ans sur l'art espagnol, laissant à la tonadilla et surtout à la zarzuela réaliste le privilège de sauvegarder l'esprit national. La « Compañía de farsa italiana », installée au Teatro de los Canos del Peral, introduisit au Palacio Real Buen Retiro les meilleurs interprètes et, lorsque l'illustre castrat Farinelli se fixa en Espagne (1737) pour tenter de dissiper la mélancolie de Philippe V, il profita de son rôle de conseiller artistique pour fonder l'opéra de Madrid qui allait devenir l'un des plus modernes d'Europe. Il rencontra, dans la capitale, Domenico Scarlatti (1685-1757), claveciniste de la future reine, qui n'en partit qu'en 1754, quinze ans avant l'arrivée de Luigi Boccherini (1743-1805) comme compositeur de l'Infant.

   Cette suprématie de la musique italienne et surtout de l'opéra qui envahit plus ou moins toute l'Europe se prolongea au cours du XIXe siècle. Alors même que le conservatoire de musique venait d'être fondé à Madrid (1830), Mercadante fut directeur de l'opéra et le répertoire qu'il présenta allait uniquement de Rossini à Bellini et Donizetti. C'est seulement après 1850 que la nouvelle zarzuela (Barbieri, Oudrid, puis Chueca, Breton, Chapi et Vivès), s'inspirant du fonds populaire et des éléments de la vie madrilène, fit de la capitale le fief d'un genre nouveau appelé à une audience considérable. L'appel à une musique nationale, bien qu'amorcé en Catalogne, donna à la vie musicale de Madrid une impulsion nouvelle puisque d'innombrables manuscrits s'y trouvaient conservés depuis des siècles (malgré l'incendie de l'Alcazar en 1734). Felipe Pedrell y fut professeur au conservatoire et put se consacrer à ses recherches sur les maîtres anciens et le caractère authentique du folklore. Par son activité personnelle autant que par le crédit dont il bénéficiait, son influence fut considérable. La prise de conscience d'un art national fondé sur une longue et glorieuse tradition entraîna un regain de ferveur où l'on vit alors Madrid distancer Barcelone. Au début du XXe siècle, la fondation de formations diverses, orchestres (en 1903, l'Orchestre symphonique dont Arbos fit l'un des meilleurs d'Europe), ensembles instrumentaux (en 1903 également, le quatuor Francès qui devait devenir le quintette Madrid, en 1919, avec Joaquín Turina comme pianiste) et même de la bibliothèque musicale itinérante de Madrid (créée en 1919 par Espinos Molto), corrobora l'action des institutions consacrées comme le conservatoire, la Capella Isidoriana, le Cercle des beaux-arts et les différentes sociétés musicales. Les premiers grands virtuoses espagnols, Tarrega, Llobet, Vinès, Segovia, Cubiles, Sainz de la Maza ou José Iturbi, allaient désormais rechercher la consécration du public madrilène avant de s'engager dans la carrière internationale, et, si l'activité lyrique s'y trouve, aujourd'hui encore, en retrait vis-à-vis des autres grandes capitales du monde, Madrid a connu et connaît toujours d'excellentes réalisations dans ses théâtres, Real, Eslava ou de la Zarzuela (où un festival lyrique propose, chaque année, des spectacles de classe et des créations : en 1980, El Poeta de Moreno Torroba). Longtemps négligée, la musique contemporaine est, depuis vingt-cinq ans, l'objet d'un effort de diffusion auquel collaborent des organismes comme Nueva Música, Tiempo y Música, Forum musical et surtout Alea créé par Luis de Pablo. Il faut signaler enfin la très efficace politique musicale de la Radio-Televisión de Madrid, des éditeurs (Espasa-Calpe) et des producteurs de disques (Hispavox) patronnés par la Fundación General Mediterránea.