cancionero (esp. ; « chansonnier »)
Recueil de chansons polyphoniques, espagnoles ou portugaises, des XVe et XVIe siècles.
Le plus important des cancioneros est probablement le Cancionero musical de Palacio, transcrit et publié en 1890 par Barbieri, puis révisé par H. Anglès. Il réunit 463 compositions à 2, 3 ou 4 voix, parfois avec un apport instrumental, élaborées entre 1460 et 1510. Ce sont, pour la plupart, des villancicos, des canciones et quelques pièces italiennes (frottole, strambotti), répartis en chansons de caractère amoureux, religieux, historique et romanesque, pastoral, burlesque, etc. Des musiciens les plus anciens (J. Urreda, M. Enrique, J. Cornago, Fr. de la Torre, Badajoz ou Peñalosa) aux plus modernes (J. del Encina, Escobar, A. de Mondejar ou Baena), on peut y suivre l'évolution de la technique comme moyen d'expression lyrique ou dramatique, dans le sens d'une simplification progressive.
D'autres cancioneros méritent d'être signalés : celui de Juan Vasquez (Villancicos y canciones, 1551, transcrit par H. Anglès), celui de Claudio de Sablonara, embrassant l'époque de 1590 à 1640 (publié par Jesús Aroca), celui de la Casa de Medinacelli (transcrit et publié en 1950 par Miguel Querol), celui d'Upsala (découvert en Suède par Rafaele Mitjana et transcrit par Jesús Bal) et plusieurs de moindre importance publiés à Barcelone, Venise ou Prague au XVIe siècle.
Canino (Bruno)
Pianiste italien (Naples 1935).
Il étudie le piano et la composition au Conservatoire de Milan, où il obtient deux premiers prix. Lauréat des concours de Bolzano et de Darmstadt, il consacre d'emblée une grande part de son activité à la musique contemporaine. Il se produit comme pianiste et claveciniste, partenaire de musiciens tels que Salvatore Accardo, Itzhak Perlman et surtout la soprano Cathy Berberian, avec qui il donne plusieurs récitals au programme original, mêlant la chanson, la mélodie, les contemporains. Avec le violoncelliste Rocco Filippini et le violoniste Cesare Ferraresi, il forme le Trio de Milan. Parallèlement à ses activités de concertiste, il enseigne au Conservatoire de Milan et compose. De nombreux musiciens ont composé à son intention : Berio, Bussotti, Donatoni, Rihm, Xenakis, etc.
Canis de Hondt (Cornelius)
Compositeur flamand (Flandre v. 1510-1520 – Prague v. 1561).
Chantre à Notre-Dame d'Anvers, maître des enfants de la chapelle de Charles Quint à Madrid (1547), il devint maître de chapelle de Marie de Hongrie, régente des Pays-Bas, puis chapelain et chanoine de Courtrai, avant d'entrer à la chapelle de Ferdinand Ier à Prague. Auteur de 26 chansons françaises et d'une messe à 6 voix, Canis a surtout excellé dans le motet ; 26 motets sur des textes latins nous sont parvenus (3 à 6 voix).
Cannabich
Famille de musiciens allemands.
Martin Friedrich ou Matthias Friedrich ( ? v. 1700 – Mannheim 1773). Flûtiste et hautboïste, il fit partie de l'orchestre de la cour de Mannheim de 1723 à 1758 et enseigna la flûte au prince électeur Karl Theodor.
Johann Christian (Mannheim 1731 – Francfort-sur-le-Main 1798). Fils du précédent, élève de son père et de J. Stamitz, il entra dans l'orchestre de Mannheim en 1744 et en prit la direction après la mort de J. Stamitz (1757). Entre-temps, il avait étudié à Rome auprès de Jomelli (1753) et séjourné à Milan. Bientôt devenu un des chefs d'orchestre les plus célèbres d'Europe, il se produisit à Paris (1764, 1766, 1772), et se lia d'amitié avec Mozart à Mannheim en 1777-78. En 1778, il suivit avec son orchestre Karl Theodor à Munich, où il donna des concerts non plus seulement pour la cour, mais aussi en public, et où, en 1790, il reçut la visite de J. Haydn en route pour Londres. Il passa quelque temps à Vienne, en 1796, et mourut durant une visite chez son fils. Essentiellement compositeur de musique instrumentale, Johann Christian laissa, notamment, de la musique de chambre et plus de 100 symphonies. À partir des années 1770, il se consacra de plus en plus au ballet, genre où il put donner libre cours à son talent de coloriste (la Descente d'Hercule, les Meuniers provençaux, les Fêtes du sérail, la Foire de village hessoise). Beaucoup de ces ballets sont perdus. On lui doit également les opéras Azakia (1778) et les Croisés (1788), ainsi que le mélodrame Elektra (1780).
Karl Konrad ou Karl August (Mannheim 1771 – Munich 1806). Fils du précédent, élève de son père pour le violon, il devint en 1800 directeur de la musique à Munich.
canon
1. Genre polyphonique caractérisé par la similitude des voix qui se reproduisent l'une l'autre avec un décalage dans le temps. On appelle antécédent la partie proposée en premier, conséquents les parties suivantes, qui doivent être déduites automatiquement de l'antécédent, soit telles quelles, soit avec des modifications convenues à l'avance.
Le canon le plus simple, type Frère Jacques, est celui dans lequel chaque voix entre sur la mélodie de l'antécédent en un endroit convenu de celui-ci et laisse ensuite le canon se dérouler de lui-même, répétant la mélodie un nombre de fois indéfini. C'est le canon perpétuel ou ouvert ; chacun s'arrête quand il en a assez. Parfois, on modifie le chant donné au moment de finir ; le canon est dit fermé et la partie modifiée porte le nom de coda. Dans certaines formes de canon, le conséquent est plus long ou plus court que l'antécédent ; on complète alors par des parties libres qui échappent à l'automatisme du canon.
À côté de ces canons simples, les contrapuntistes n'ont jamais cessé de rechercher des procédés susceptibles de produire des canons élaborés (intervalles, rythmes). Par exemple, on peut faire commencer le conséquent sur un autre degré que l'antécédent ; ce genre de canon est désigné par l'intervalle qui sépare l'antécédent de sa réponse (canon « à la tierce », par exemple).
Le canon peut aussi transformer la mélodie de l'antécédent ; il peut commencer par la dernière note et continuer de droite à gauche (canon rétrograde, dit aussi à l'écrevisse), ou bien remplacer chaque intervalle montant par le même intervalle descendant et vice versa. On peut également mélanger ces procédés et proposer un renversement de la rétrogradation.
Sur le plan rythmique, on peut procéder soit à un resserrement des valeurs (canon en diminution), soit à leur élargissement (canon en augmentation). Ce genre de canon amène souvent à recourir à des parties libres pour combler la différence de longueur (cf. Bach, canons de l'Art de la fugue).
Les contrapuntistes se sont souvent complu à présenter leurs canons sous forme de devinette, en n'écrivant que l'antécédent et le programme et en laissant à l'usager le soin de trouver la « résolution ». Le plus célèbre exemple de ce type de canon énigmatique est la série proposée par Bach dans l'Offrande musicale avec la devise significative Quaerendo invenies (cherchez et vous trouverez).
Il y a enfin canon multiple (double, triple, etc.) quand plusieurs canons se déroulent simultanément. Tel est le cas du plus ancien canon identifié comme tel avec certitude, un double canon anglais sur le chant du coucou, Sumer is icumen in (v. 1300).
De nos jours, Olivier Messiaen a appliqué le nom de canon rythmique à une imitation ne portant que sur les valeurs, indépendamment de l'élément mélodique.
L'emploi du mot « canon » (grec ; « règle ») provient par dérivation de la « règle » ou mode d'emploi qui accompagnait généralement la notation de l'antécédent. La dénomination primitive était rotundellus ou rondellus, « qui tourne en rond », apparenté à rota (roue) et source du mot rondeau ; l'anglais round et l'allemand Radel se réfèrent à cette origine. Au XIVe siècle, la chace (chasse) en France et la caccia en Italie présentent le caractère de canons. À partir du XVe siècle, le canon est de plus en plus utilisé comme élément occasionnel de polyphonie, mais, en tant que genre, il n'est plus guère conservé que comme divertissement « domestique » : Haydn, Mozart, Cherubini en écriront souvent à ce titre. Le canon possède un abondant répertoire de caractère plus ou moins populaire dû au fait que, sous sa forme la plus simple, il constitue l'un des moyens d'accès les plus aisés vers la pratique polyphonique.
Le canon était autrefois considéré comme une variété de la fugue, bien que ses règles soient très différentes. C'est pourquoi Bach a pu inclure les canons (fugues canoniques) dans son Art de la fugue.
2. Par extension du sens précédent, passage en style de canon (dit aussi canonique), ou dans lequel figure un canon, qu'il soit complet ou non, mélangé ou non à d'autres parties non canoniques. Compris de la sorte, les canons sont fréquents dans la musique de toutes époques depuis le XIIIe siècle au moins, tout particulièrement dans les messes et motets de la Renaissance.
3. Dans l'Antiquité grecque, on appelait canon harmonique l'ensemble des proportions numériques calculées sur le monocorde pour définir les intervalles, d'où le nom de canonistes parfois donné aux harmoniciens de l'école pythagoricienne.
4. Dans la liturgie latine, le canon est la partie essentielle de la messe, incluant la consécration et dite à voix basse entre le Sanctus et le Pater.
5. Canon byzantin. Avec le « kontakion », le canon est la forme la plus importante dans la musique de l'Église byzantine, mais il se trouve également dans sa poésie. Sa période de floraison se situe aux VIIIe et IXe siècles, et on peut citer à ce titre le nom d'André de Crète, auteur du Grand Canon.