Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
J

jeu-parti (litt. « jeu partagé », provençal joc partit ou partimen)

Genre littéraire et musical en vogue aux XIIe et XIIIe siècles, consistant en un débat chanté soutenu par deux adversaires, qui disposent tour à tour d'une strophe (généralement 3 chacun) pour défendre un point de vue opposé, sur une même mélodie, selon des règles poétiques précises.

La dispute peut être arbitrée par un juge qui dispose lui-même d'une strophe ou d'une demi-strophe analogue à celle des adversaires. Le genre est resté vivant dans plusieurs traditions folkloriques : chiami-respondi corse, desafio (« défi ») portugais, etc.

   Parfois le premier partenaire indique le sujet et l'alternative des réponses ; le second choisit l'une d'elles et le premier se voit alors tenu de soutenir la thèse opposée. Pour certains érudits, ce serait là l'une des conditions de définition du jeu-parti, l'autre condition étant la présence d'un sujet amoureux ; ceux qui y échappent se rangeraient sous le terme plus général de tenson (en prov. tenso). Une variante du jeu-parti est le débat, marqué par le caractère fictif du cadre et des interlocuteurs, présentés en préambule dans une première strophe impersonnelle.

jeu (d'orgue)

Ensemble de tuyauterie d'un orgue correspondant à un timbre et à une hauteur donnés.

Chaque jeu, constitué d'un ou de plusieurs tuyaux par note, sur la totalité ou seulement sur une partie du clavier, représente une unité sonore de l'orgue. Tout orgue se singularise par le nombre et le choix de ses jeux, le caractère que le facteur leur a donné et la façon dont il les a harmonisés entre eux. La liste des jeux afférant à chaque clavier et au pédalier est dite « composition » de l'orgue. Les différents jeux de l'orgue se regroupent par grandes familles, selon leur mode d'émission du son : les jeux de fond, de mutation, de mixture et d'anche. Les diverses ressources de sonorités différentes d'autres instruments que l'orgue sont également appelées jeux, en particulier au clavecin, à l'harmonium et au synthétiseur.

   La hauteur d'un jeu est mesurée par la longueur, exprimée en pieds, de son tuyau le plus grave. Ainsi, un jeu de 8 pieds (qu'on écrit aussi 8') est un jeu dont le tuyau faisant entendre le do grave mesure huit pieds, soit environ 2,40 m ; il correspond à la hauteur normale des voix, l'octave de référence (celle du la[3-]) se trouvant alors au centre du clavier. Le jeu de 16 pieds, deux fois plus long, sonne à l'octave inférieure, celui de 32 pieds à la double octave ; de même, le jeu de 4 pieds sonne à l'octave supérieure, celui de 2 pieds à la double octave.

jeu de timbres

Instrument à percussion de la famille des « claviers ».

Son nom suffit à définir ce groupe de calottes métalliques, en nombre variable, disposées horizontalement du grave à l'aigu, que l'exécutant frappe à l'aide d'un petit maillet.

Jeunesses Musicales de France (J.M.F.)

Mouvement fondé en 1941 par René Nicoly pour « éveiller la sensibilité musicale des jeunes de toute condition… et établir un lien entre le phénomène musical et la culture générale ».

Chef de service aux éditions Durand et passionné de musique, R. Nicoly avait organisé dès le début de la Seconde Guerre mondiale des séances d'initiation musicale à l'intention des mobilisés. En 1941, il prit contact avec Marcel Cuvelier, qui dès 1940 avait réalisé en Belgique une expérience semblable, et fonda les J. M. F. malgré les contraintes de l'Occupation. D'abord parisien, le mouvement gagna bientôt la province, et prit son plein essor après la Libération. Une Fédération internationale des jeunesses musicales fut créée en 1945, qui, en 1976, devait regrouper 35 pays. En 1948, les J. M. F. ont leur journal. En 1957, elles comptent environ 200 000 adhérents dans 290 villes, qui bénéficient régulièrement de concerts commentés. La « conférence-concert » est en effet à la base de l'action des J. M. F. Des conférenciers aussi réputés qu'Émile Vuillermoz, Norbert Dufourcq, Roland-Manuel, Jacques Feschotte, accompagnent dans toute la France des interprètes non moins prestigieux : Ginette Neveu, Pierre Bernac, Hélène Bouvier, les Pasquier, Charles Panzera, Henri Mercckel, etc. Des œuvres sont commandées, des « opéras de poche » montés spécialement pour les tournées J. M. F.

   En 1969, René Nicoly est nommé administrateur de la Réunion des théâtres lyriques nationaux en pleine crise, et c'est dans les coulisses de l'Opéra en grève qu'il meurt subitement deux ans plus tard. Le professeur Louis Leprince-Ringuet lui succède à la présidence des J. M. F., qui connaissent alors de graves difficultés financières et ne retrouveront jamais l'activité et l'efficacité de leurs vingt premières années. Mais ne suffit-il pas à leur gloire d'avoir révélé la musique à une génération entière de Français ?

Joachim (Irène)

Cantatrice française (Paris 1913 – id. 2001).

Arrière-petite-fille du célèbre violoniste Joszef Joachim, elle débuta en 1939 à l'Opéra-Comique, où se déroula la plus grande partie de sa carrière. Irène Joachim a chanté notamment Micaela de Carmen, Rosenn du Roi d'Ys, Sophie de Werther, la Comtesse des Noces et surtout Mélisande, personnage auquel elle s'identifia de façon idéale. Spécialisée dans la musique française contemporaine (elle créa, Salle Favart, Amphitryon 38, Ginevra, Guignol, Marion et le Rossignol de Saint-Malo), elle n'en fut pas moins une remarquable interprète du lied romantique allemand. Sa beauté, sa présence physique, sa voix au timbre frais et pur ont fait d'elle une artiste lyrique particulièrement attachante. Une classe de chant lui a été confiée au Conservatoire de Paris.

Joachim (Joszef)

Violoniste et chef d'orchestre allemand d'origine hongroise (Kittsee, près de Presbourg, 1831 – Berlin 1907).

Il travailla avec G. Hellmesberger senior à Vienne et F. David à Leipzig, et, grâce à Mendelssohn, devint premier violon dans l'orchestre du Gewandhaus (1843). Il parut ensuite à Londres (1844), Dresde, Vienne et Prague (1846). Il fut premier violon à Weimar (1849), où il vécut dans le cercle de Liszt, directeur des concerts à Hanovre (1856), puis directeur de l'École supérieure de musique de Berlin (1868), à laquelle il donna un essor considérable. Il devint, dans cette même ville, sénateur puis vice-président de l'Académie des arts. Il forma plus de 400 élèves, et reste toujours cité comme modèle pour ses interprétations du concerto de Beethoven, qu'il imposa définitivement au répertoire, et des œuvres pour violon seul de Bach, que, grâce à la puissance de son jeu, il fut le premier à donner sans accompagnement. Ami fidèle de Brahms malgré de nombreuses brouilles, il fut le dédicataire et le premier interprète de son concerto (furent aussi écrits à son intention ceux de Schumann, Max Bruch et Dvořák). En 1869, il fonda un quatuor qui porta son nom, qu'il conduisit jusqu'à sa mort et dont les interprétations sont demeurées légendaires. Son œuvre la plus célèbre comme compositeur est le Concerto à la hongroise op. 11 pour violon et orchestre (1861).