Corelli (Arcangelo)
Violoniste et compositeur italien (Fusignano, près de Ravenne, 1653 – Rome 1713).
Issu de l'une des plus illustres familles de sa ville natale, il prit vraisemblablement ses premières leçons de musique à Faenza où se déroula la plus grande partie de son enfance. Mais ce fut à Bologne, où il séjourna de treize à dix-sept ans, qu'il reçut une formation suivie auprès de deux éminents représentants de la fameuse école bolonaise de violon : Giovanni Benvenuti et Leonardo Brugnoli. Il est probable qu'il y travailla également le contrepoint avec Giambattista Bassani. Dès 1670, il était admis à l'Accademia filarmonica. On manque de témoignages précis sur son activité dans les quelques années suivantes. Sans doute fit-il, à Rome, d'obscurs débuts de violoniste d'orchestre. Et c'est peut-être à cette époque que se situent ses rares voyages. Non pas, comme le prétend certaine légende, à Paris où Lully, jaloux de son talent, aurait pris soin de lui fermer toutes les portes, mais en Allemagne où l'on croit retrouver sa trace à Heidelberg et en Bavière, notamment à Munich. Ce qui est certain, c'est que, à l'exception d'un séjour à Naples en 1708, il ne quitta plus guère Rome à partir de 1680. Dans la Ville éternelle où l'ex-reine Christine de Suède, convertie au catholicisme, tint une véritable cour où les musiciens étaient rois, Corelli accumula, dès lors, les succès de virtuose, de chef d'orchestre et de compositeur. Nommé en 1682 maître de chapelle de l'église Saint-Louis-des-Français, il publia en 1685 ses douze premières Sonate a tre (deux violons et continuo). En 1687, il conduisit dans le palais de la reine Christine un mémorable concert qui réunissait 150 musiciens. Alors protégé par le cardinal Pamfili, il passa deux ans plus tard au service d'un autre prince de l'église, le cardinal Pietro Ottoboni, neveu du pape Alexandre VIII, qui devait l'héberger jusqu'à sa mort.
La gloire de Corelli ne connut pas d'éclipse avant 1708, année cruciale pendant laquelle il fit la connaissance de Haendel (dont il dirigea même un oratorio), rencontra Alessandro Scarlatti et revint ulcéré de Naples où son succès fut fort mitigé. Il semble qu'il n'ait jamais su briller dans d'autres compositions que les siennes, même écrites à son intention. On rapporte qu'à Naples, il avait raté un trait difficile dans une pièce de Scarlatti, puis s'était obstiné à jouer en ut majeur, par distraction, un passage en ut mineur. D'un naturel sensible et fort peu combatif, il se désespéra de ces échecs et renonça bientôt à se produire en public. Toutefois, il n'était nullement oublié quand il mourut à la fin de sa soixantième année, tandis qu'on achevait de graver ses douze Concerti grossi op. 6. Grand amateur d'art, il avait légué son importante collection de tableaux au cardinal Ottoboni, qui lui fit élever un monument funéraire au Panthéon de Rome, près du tombeau de Raphaël. L'épitaphe fait mention du titre de « marquis de Ladenburg » que lui avait décerné l'Électeur palatin Philippe-Guillaume, en remerciement d'une dédicace.
Par une exception remarquable dans l'histoire de la musique italienne, Corelli n'a jamais écrit pour les voix. Musique religieuse et opéra sont donc absents de son œuvre, qui comprend six numéros d'opus de douze pièces chacun. Les quatre premiers, publiés à Rome de 1681 à 1694, sont alternativement des Sonate da chiesa et des Sonate da camera pour deux violons et continuo. L'opus 5, pour violon et continuo, date de 1700. L'opus 6, enfin, réunit les Concertos grossos, d'une écriture particulièrement élaborée, qu'il ne faut pas confondre avec les Concertos grossos publiés à Londres en 1735, qui sont des transcriptions par Geminiani des opus 1, 2, 3 et 5.
Parmi de très nombreuses rééditions, se distingue celle des œuvres complètes par J. et F. Chrysander (Londres, 1888-1891), revues par Joseph Joachim.
Le style violonistique de Corelli, perpétué jusqu'à Viotti et Rode par l'intermédiaire de ses élèves Geminiani, Somis, Gasparini, Locatelli, etc., fut essentiellement caractérisé par l'approfondissement des ressources expressives de l'instrument, d'où une certaine réaction contre les abus de la virtuosité pure (doubles cordes par exemple). Quant à la tessiture, Corelli ne dépasse jamais la troisième position, c'est-à-dire le ré au-dessus de la portée. Mais Corelli a également fait école en tant que compositeur ; il peut être, en effet, considéré comme l'inventeur du concerto grosso, qui donna lieu à tant de chefs-d'œuvre de la musique baroque.
Corkine (William)
Luthiste et compositeur anglais (déb. du XVIIe s.).
On sait qu'il jouissait aussi d'une bonne réputation en tant que virtuose de la lyra-viol, mais ce détail mis à part, on ne connaît rien de sa vie. En 1610, il publia un livre d'airs pour voix et luth suivi, en 1612, du Second Book of Ayres, Some to sing and play to the Base Violl alone, Others to be sung to the Lute and Base Violl, with New Corantoes, Pavins, Almaines…, titre qui révèle la pratique, fréquente à l'époque, d'accompagner la voix par une viole seule, l'instrumentiste pouvant ajouter quelques accords en doubles cordes afin d'affirmer l'harmonie. La disposition de l'édition originale de ces pièces indique également qu'elles étaient destinées surtout à des musiciens amateurs, chanteurs et instrumentistes réunis autour d'une table. Les deux livres d'airs ont été réédités par E. H. Fellowes dans The English Lute-Songs (série II, Stainer et Bell, Londres, 1926).
Cornelius (Peter)
Compositeur et poète allemand (Mayence 1824 – id. 1874).
Violoniste dans un orchestre de théâtre, acteur, il étudia la composition avec Siegfried Wilhelm Dehn à Berlin de 1844 à 1846. En 1852, il se rendit à Weimar où il se lia d'amitié avec Liszt. Il écrivit dans la Neue Zeitschrift für Musik, traduisit des conférences données en français par Liszt et s'adonna à la composition. Il vécut à Vienne de 1859 à 1864. Devenu l'ami intime de Richard Wagner, il suivit ce dernier à Munich en 1865, sur l'invitation du roi Louis II, et y enseigna l'harmonie à la Königliche Musikschule (École royale de musique), dirigée par Hans von Bülow. Attiré à la fois par la littérature et par la musique, il publia en 1861 un volume de poèmes, Lyrische Poesien, et, sensible à l'exemple de Wagner, il écrivit les livrets de ses propres opéras ainsi que des textes pour certains de ses lieder. Créé sous la direction de Liszt au théâtre de Weimar en décembre 1858 et accueilli par des sifflets, ce qui amena Liszt à remettre sa démission au grand-duc, le gracieux opéra-comique le Barbier de Bagdad a gagné plus tard une juste popularité en Allemagne et demeure l'œuvre la plus connue de Cornelius. L'influence de Wagner se révèle dans les opéras le Cid, représenté à Weimar en 1865, et Gunlöd, resté inachevé. La fine personnalité de Cornelius apparaît mieux dans ses lieder, qui, ainsi que ses duos et trios vocaux, empruntent leur texte quand le compositeur n'en était pas lui-même l'auteur à Heine, Hölderlin, Eichendorff, Chamisso, Uhland, Cervantes, Shakespeare, etc. Ce sont des œuvres à la prosodie raffinée, à l'écriture pianistique vive, frémissante, aux harmonies originales.
Cornelius a également écrit un requiem (1863), et des chœurs sur des textes de Goethe, Luther, Schiller, Horace, Thomas Moore, ainsi que sur des textes liturgiques.